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Loin d'être un handicap, le bilinguisme est un atout pour le développement du cerveau. La plupart des spécialistes s'accordent à reconnaître ses bienfaits pour la croissance de l’enfant. Une équipe américaine a par exemple mis en évidence la capacité des enfants bilingues à s'adapter plus rapidement aux changements.
Les personnes ayant été baignées tôt dans un universunivers multilingue peuvent facilement jongler d'une langue à l'autre sans s'emmêler les pinceaux. Il est fascinant d'observer de jeunes individus naviguer parfaitement entre deux langues, sans hésitation et avec une maîtrise parfaite de l'accent.
Selon cette étude, les bilingues seraient capables de classer les différentes langues par systèmes de sons. © clappstar, Flickr, cc by nc nd 2.0
Depuis de nombreuses années, les scientifiques se demandent comment le cerveau effectue les transitions linguistiques avec tant d'aisance. Sur ce sujet, deux courants de pensée s'affrontent. Les uns pensent que les bilingues possèdent une « case » cérébrale pour chaque langage. Les autres suggèrent, au contraire, que les deux langues sont mélangées et que les bilingues s'ajustent à chacune d'elles en rééquilibrant les sonorités. Des chercheurs de l'université d'Arizona viennent de trancher sur ce sujet. Dans leur étude, publiée dans la revue Psychological Science, ils avancent que les deux langues sont organisées par sons. Ainsi, par exemple, le « r » roulé espagnol et le « h » aspiré à l'anglaise seraient rangés dans des cases spécifiques du cerveau, accessibles quand nécessaire.
Les bilingues sautent facilement d'une langue à l'autre
Pour leurs expériences, les chercheurs ont étudié 32 bilingues anglo-espagnols ayant appris leur deuxième langue avant l'âge de 8 ans. Ils leur ont fait écouter deux mots : « bafri » et « pafri ». Ces derniers ne sont pas signifiants, et changent uniquement par leur première syllabe, « ba » ou « pa ». Or, lorsqu'un hispanique prononce ces mots, à l'écoute, la différence phonétique est très subtile, et donc difficile à détecter pour une personne uniquement anglophone (et donc ne parlant pas espagnol). Par cette étude les chercheurs ont voulu tester la capacité des bilingues à différencier ces deux sons.
Les participants ont été séparés en deux groupes. Dans l'un, les chercheurs ont prévenu le premier que les mots seraient prononcés à l'espagnole, c'est-à-dire en accentuant sur le « r ». Pour le deuxième, ils leur ont expliqué que les mots seraient énoncés avec la prononciation anglaise. Enfin, les auteurs leur ont demandé si la première syllabe était un « ba » ou un « pa ».
Deux systèmes de sons rangés dans le cerveau
Les résultats montrent que les participants perçoivent différemment les mots s'ils ont une sonorité anglaise ou espagnole. Cela montre que les bilingues sont capables de trier les sons provenant de deux langues différentes. « Si on les positionne en mode "anglais", ils agissent comme anglophones, et si on les place en position "espagnol", ils se comportent alors comme des hispanophones », résume Andrew Lotto, directeur de cette étude. Leur façon d'assembler et de prononcer les mots serait donc influencée par le monde qui les entoure.
La plupart des gens pensent que les différences majeures entre les langues sont la grammaire et les mots. Or, cette étude suggère que la véritable dissemblance vient des sons. Les personnes qui apprennent un deuxième langage sur le tard seraient déjà imprégnées des sons de leur langue maternelle et auraient alors beaucoup de mal à s'en défaire. « C'est pour cette raison que ces personnes ont très souvent un accent dans une langue étrangère », conclut le spécialiste.