Aujourd’hui, dans INFRA, on va parler du Hum, le bourdonnement, un son mystérieux perçu par une fraction de la population à travers le monde entier, et qui continue, après plus d’un demi-siècle, à confondre les scientifiques. Dans cet épisode, il sera question d’infrasons, du Hum de Windsor, de Taos ou de Kokomo, de chapeaux en aluminium, de complot gouvernemental, et de poissons qui produisent des sons de corne de brume
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Personne ne sait vraiment quand le Hum a commencé. Des historienshistoriens affirment que les premiers témoignages remontent au XIXème siècle, pendant la Révolution industrielle. À cette époque, certains disent entendre un [bourdonnement constant, comme celui produit par une gigantesque nuée d'abeilles]. Avancez dans les années 1940 et 50 et des milliers de personnes cette fois déclarent être gênées par un [vrombissement] dans les régions de Londres et du South Hampton. Pour les plus rigoureux, toutefois, c'est autour des années 70 que se place le point d'origine du phénomène, avec les premiers témoignages documentés par les scientifiques. Cette incertitude qui entoure la chronologie du Hum n'est que le point départ d'une série de questions dont beaucoup peinent encore à trouver une réponse. S'agit-il d'un son, d'une onde électromagnétiqueonde électromagnétique ou d'une illusion auditive ? Pourquoi est-il audible à travers le monde entier ? A-t-il plusieurs sources distinctes ou une seule explication possible ? Et pourquoi est-ce que seulement 2 % des gens parviennent à le percevoir ?
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Le Hum, un son mystérieux depuis plus d'un demi-siècle
Commençons par ce que l'on sait. Le Hum est défini comme un son à basse fréquence, audible par une petite fraction de la population d'un bout à l'autre du globe, et généralement décrit comme le [bruit distant d'un moteur dieselmoteur diesel en marche]. Il peut parfois s'accompagner d'un sifflement, mais dans tous les cas, il doit être majoritairement grave, ne dépassant habituellement pas les 100 HzHz. [100 Hz : un son grave, similaire à celui d'une corne de brumebrume de bateau entendue au loin.] On surnomme ses victimes les « hearers », les entendeurs, et ce phénomène en apparence acoustique peut s'accompagner de tout un tas de symptômes plus ou moins désagréables : insomnie, nausées, spasmes musculaires, stress chronique, difficultés de concentration, fatigue, palpitations cardiaques, maux de tête, augmentation de la tension, fatigue oculaireoculaire, picotements, pressionpression auriculaire, sensation de corps qui vibre ou qui crépite électriquement, changements de personnalité, ou encore hallucinations (généralement auditives). Comme le précise Geoff Leventhall, grand expert du son et des vibrationsvibrations, le terme Hum qualifie un son répondant à ces critères et dont la source n'a pas encore été identifiée. Ce qui fait le Hum, c'est donc son mystère.
Basses fréquences et infrasons
Alors il existe tout plein de sources de bruits basses fréquences sur Terre, comme les séismesséismes, les tempêtestempêtes, les éruptions, l'activité géomagnétique, les avalanchesavalanches ou la foudrefoudre]. Et depuis l'avènement des machines, les humains n'ont fait qu'allonger la liste : transports, éolienneséoliennes, mines, usines, et j'en passe.
Les définitions peuvent varier, mais on situe généralement un son basse fréquence entre 10 et 100 Hz, et un infrason en dessous de 20 Hz, la limite théorique de l'audition humaine. Sauf que, comme on va le voir, un infrason, contrairement à la définition populaire, n'est pas forcément un son inaudible. Par exemple, peut-être que certains et certaines d'entre vous parviendrez à entendre cette onde à 15 Hz, si votre matériel audio le permet. [Une onde extrêmement basse, dont on parvient à distinguer chaque vibration, appelée cycle.] Pour être perçus, ces sons ont souvent besoin d'être plus forts qu'une conversation classique, autour de 100 dB, pour compenser le manque de sensibilité de nos oreilles à ces fréquences. C'est pour ça que, généralement, les bruits graves produits par l'activité terrestre ou humaine sont en dessous de notre seuil de perception. Ils sont tout simplement trop graves ou pas assez forts pour être détectés par nos oreilles. Seule une fraction de la population y est véritablement sensible. Et malheureusement pour ces personnes, encore aujourd'hui, l'OMS reconnaît que les standards et les instruments de mesure utilisés pour estimer une nuisancenuisance sonore prennent encore trop peu en considération cette sensibilité aux basses fréquences. On va voir que c'est un soucisouci récurrent dans l'étude du Hum. Même lorsque plusieurs centaines de personnes se plaignent d'un bruit, les scientifiques ne parviennent pas toujours à le mesurer objectivement.
Histoire de compliquer un peu plus les choses, trois autres facteurs sont à prendre en compte. Déjà, plus une fréquence est basse, moins elle est perturbée par les obstacles qu'elle rencontre sur son chemin. Vous l'avez peut-être déjà remarqué : plus un son vous parvient de loin, plus ses fréquences les plus aiguës sont atténuées, dispersées aux quatre ventsvents. [Trois claquements de main, chacun plus distant que le précédent, illustrent ce propos.] Les sons basse fréquence peuvent donc venir d'une source très proche comme très lointaine en ayant subi très peu d'altérations, ce qui rend leur point d'origine d'autant plus difficile à localiser. D'autre part, le vent ou les changements de température peuvent au contraire contribuer à rendre un son plus fort ou à l'atténuer. Et enfin, il arrive que les entendeurs décrivent des bruits très différents les uns des autres, ou qu'au contraire, ils entendent exactement la même chose.
Alors je vous propose qu'on procède méthodiquement, en partant des sources possibles les plus proches, puis en s'éloignant petit à petit. [Un filet d'airair souffle à nos oreilles...] On va commencer cette enquête dans nos oreilles, et vous allez voir qu'elle va nous mener jusque dans les profondeurs insondables des océans [... et se résout en une vaguevague qui s'écrase sur les récifs.].
Le Hum dans la peau
Première étape : l'appareil auditif. Un véritable petit bijou d'évolution. Grâce à une architecture complexe et précise, qui mériterait qu'on y consacre un épisode entier, notre corps transforme de simples variations de pression dans l'air en sons, en bruits, en voix, ou en musique. Mais malgré sa complexité, ou peut-être à cause d'elle, notre oreille n'est pas entièrement immune eux anomaliesanomalies et autres hallucinations. Ainsi, elle peut être à l'origine d'émissionsémissions otoacoustiques spontanées : des sons produits inopinément par la cochléecochlée et qui peuvent parfois être entendus par votre oreille. Attention, ce ne sont pas des acouphènes. Contrairement à eux, les émissions otoacoustiques spontanées peuvent être enregistrées, à l'aide de minuscules micros qu'on insère dans le canal auditif. C'est fou, non ? Votre oreille produit des sons qu'un micro peut capter ! Et, d'après Franz Frosch, chercheur indépendant et lui-même victime du Hum, ses manifestations sont très proches de celles mentionnées par d'autres entendeurs. Par exemple, les deux phénomènes pourraient être atténuésatténués en réalisant des mouvementsmouvements de tête. Petit problème toutefois : les émissions otoacoustiques spontanées sont plutôt répandues ; on les trouve chez un peu plus de la moitié de la population, même si elles ne sont pas forcément audibles par tout le monde. On est bien au-dessus des 2 % d'entendeurs reportés pour le Hum.
Il est donc temps de passer à la deuxième hypothèse : celle du bourdonnement veineux, autrefois surnommé « bruit de diable » ou « bruit de rouet » [un rouet cliquète]. Ne vous laissez pas avoir par ces appellations sinistres, ce phénomène vasculaire est tout à fait bénin. Les personnes concernées entendent un léger bourdonnement, qui provient des vaisseaux situés dans leur cou et le haut de leur poitrine. Lorsque les vaisseaux se tordent ou se contractent dans cette région, ils peuvent perturber le flux sanguin, qui devient alors plus bruyant. Pour les fans de dynamique des fluides, on entend le sang passer d'un écoulement laminairelaminaire à un écoulement turbulent. Ce bourdonnement veineux est à distinguer du souffle cardiaque, qui pour sa part peut être problématique. Si vous avez un doute, mieux vaut consulter votre médecin. Quoi qu'il en soit, chez certaines personnes, il est assez bruyant pour devenir audible, sous la forme d'un son grave et pulsatile. [Un enregistrement de bourdonnement veineux : on entend battre le cœur, mais le son du micro est moins bon que ce qu'entendrait un patient.] Malheureusement, là aussi le phénomène est fréquent, mesurable et bien connu des médecins. Pas de quoi justifier un mystère persistant.
Un exemple de bourdonnement veineux, aussi appelé « bruit de diable » par le passé. © Youtube, MohammedA
Une dernière hypothèse d'origine interne pourrait alors être... les acouphènes, tout simplement. Plus difficiles à objectiver, ceux-ci peuvent avoir une multitude d'origines différentes. Une perte d'audition liée à l'âge ou à un traumatisme, une infection de l'oreille, une accumulation de cérumencérumen, une blessure au niveau de la tête ou du cou, du stress, ou même des médicaments peuvent provoquer cette impression de tintement désagréable [un sifflement aigu]. Une étude de 1983, menée sur un petit échantillon d'entendeurs britanniques, suggère qu'un quart d'entre eux étaient atteints d'acouphènes à basse fréquence. On tient donc un début de piste, mais ce n'est pas tout à fait suffisant. Si ses causes étaient purement organiques, le Hum serait sûrement apparu beaucoup plus tôt dans la littérature. [Des sons de machines.] Or, les chercheurs parlent de témoignages datant de la Révolution industrielle, une ère où les machines commençaient à envahir les villes, notamment en Grande-Bretagne, où l'occurrence du Hum s'est particulièrement fait ressentir. Il faut donc peut-être chercher du côté d'une origine anthropique pour résoudre ce mystère. Et si le secret du Hum, c'était l'humain ? On poursuit notre enquête après une courte pause.
Un problème d'envergure mondiale
Quand on se rend sur la carte du Hum, créée par le Dr. Glen MacPherson, de l'université de Colombie-Britannique, et alimentée par des entendeurs volontaires, on se rend bien compte qu'on a affaire à un problème de niveau mondial. Depuis l'archipelarchipel de Hawaï jusqu'à la pointe est de la Nouvelle-Zélande, en passant par le Chili, l'Afrique du Sud et la Slovénie, la mappemonde est recouverte de petits points violets. Chacun s'accompagne d'une fiche détaillée avec l'âge et l'état de santé de la personne qui a signalé le bourdonnement, ainsi que des détails sur le son, sa fréquence, sa duréedurée ou encore le moment de la journée durant lequel il est le plus audible. Mais même si le phénomène est global, on remarque tout de même plusieurs choses. Une majorité des signalements provient de pays anglophones, comportant les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. On note aussi une concentration du Hum en Europe, en particulier aux Pays-Bas et en Belgique. Ainsi, même s'il n'est pas impossible de l'entendre en zone rurale ou même dans des régions sauvages, dans l'ensemble, le Hum est le plus fréquent dans des pays fortement industrialisés, avec une représentation importante dans les grandes villes et les zones portuaires. Copenhague, Bristol, Vancouver et Détroit ont toutes leurs ports et leurs Hums.
Car oui, il est temps de préciser quelque chose : si le Hum est un phénomène répandu mondialement, il défraye surtout la chronique lorsqu'il touche une ville en particulier. On lui donne alors le nom de la localité qu'il affecte : Bristol Hum, Taos Hum ou encore Largs Hum. Il existe aussi un Times Square Hum, mais si vous entendez celui-ci, pas de raison de vous inquiéter. Il s'agit en réalité d'une installation artistique mise en place en 1977 par le compositeur Max Neuhaus [un son à mi-chemin entre la vibration d'une grosse cloche et une corne de brume]. J'en profite aussi pour clarifier un autre point. Je parlais tout à l'heure de 2 % de la population capable d'entendre le Hum, et d'après les médias, on parle bien de 2 % de la population mondiale. Mais en faisant mes recherches, j'ai constaté que plusieurs articles parlaient plutôt de 2 % à 10 % des habitants au sein d'une communauté touchée par le Hum. Il est donc possible que le nombre d'entendeurs soit plus petit que la presse ne l'ait laissé entendre, même si l'origine de ce bruit n'en est pas moins énigmatique.
Alors justement, prenons quelques-uns de ces Hums locaux pour voir ce que la science a pu en retirer. Commençons avec mon préféré.
Poissons hurleurs et aciérie vrombissante
Au milieu des années 80, plusieurs pénichards, des personnes vivant sur des péniches, amarrés dans le port de Sausalito en Californie, commencent à se plaindre d'un son grave, qui semble émaner des eaux une fois la nuit venue. [Un son de corne de brume.] Décrit comme une formation de hautbois, un générateurgénérateur distant ou encore un rasoir électrique dans une bassine d'eau, le bourdonnement est assez fort et dure assez longtemps pour empêcher les entendeurs de dormir. Certains commencent à parler d'installation militaire secrète tandis que d'autres rejettent l'histoire, la qualifiant simplement de légende urbaine. Mais c'est le directeur d'un aquarium qui finit par reconnaître le bruit et résoudre le mystère. À l'occasion de la saisonsaison des amours, un banc de poissonspoissons-crapauds à nageoire unie s'était réuni dans le port [en battant des nageoires sous l'eau] pour produire ce vacarme assourdissant. [Le même son de corne de brume, qui présente soudain une variation d'intensité, comme si une autre corne y répondait.] Alors oui, j'avoue avoir été surprise, probablement comme beaucoup d'entre vous, d'apprendre qu'un poisson pouvait produire autant de bruit. L'expression « muet comme une carpecarpe » ne s'applique manifestement pas à toutes les espècesespèces. Le poisson-crapaud à nageoire unie, pour sa part, est particulièrement vocal : les mâles grognent et vrombissent en faisant vibrer leur vessievessie natatoire, la poche qui les aide à contrôler leur flottaison. [Un mâle pousse plusieurs grognements ressemblant à des pets graves, puis un nouveau son de corne de brume.] Il n'est d'ailleurs pas le seul à produire du son : le poisson dit « grand tambour » utilise lui aussi sa vessie natatoire [plusieurs bruits percussifs], les hippocampeshippocampes entrechoquent des os de leur crânecrâne [on dirait qu'il entrechoque deux morceaux de noix de coconoix de coco], et les harengs pètent pour communiquer entre eux [un bruit ressemblant à un pet dans une bouteille en verre]. Je ne suis pas sûre que vous vouliez le savoir, mais... bon, voilà qui est fait.
Le Hum d'un poisson-crapaud à nageoire unie, enregistré par les chercheurs. © Youtube, Science News
Allez, direction Windsor, dans l'Ontario, une ville canadienne située juste en face du port de Détroit. [Un nouveau paysage portuaire, plus actif.] Je vous parlais du Hum de Détroit à l'instant, mais en réalité, il est mieux connu sous le nom de Hum de Windsor. En 2011, les résidents des deux villes se sont mis à entendre un [son basse fréquence] intermittent, capable de durer plusieurs heures d'affilée. On a là affaire à un Hum typique, un bruit distant de moteur de moteur diesel en marche parfois ressenti comme une sensation plutôt que comme un bruit. Malgré des investigations sur place, personne n'a été capable d'en identifier la source, jusqu'en 2020, quand la pandémiepandémie a forcé la fermeture d'une aciérie américaine, à la périphérie de Détroit. Mystère élucidé.
Mystère à Kokomo et Taos
Un cas plus complexe maintenant : la ville de Kokomo, dans l'Indiana. En 1999, les premières plaintes commencent à émerger. La source du bruit est difficile à identifier, car les entendeurs semblent répartis aléatoirement sur la carte, ne pointant vers aucun lieu en particulier. Les chercheurs parviennent tout de même à enregistrer des sons à 10 et 36 Hz chez certains des résidents, alors que ceux-ci expriment des symptômes. Les sons sont plus forts qu'un simple bruit de fond normal et grâce aux appareils de mesure, on finit enfin par trouver les coupables : des compresseurs d'air industriels près du centre-ville et une tour de refroidissement située plus loin. Les usines à l'origine de ces nuisances s'engagent à mettre en place des moyens pour les supprimer, mais... même après que les modifications ont été effectuées, le Hum de Kokomo persiste pour une partie des habitants. Plus étrange encore, dans plusieurs des maisons, les systèmes électriques sont en carafe [un grésillement électrique] : les grille-pains tombent en panne [un ressort de grille-pain saute], les [ampoules éclatent] et les voituresvoitures équipées d'un système d'allumage à distance [démarrent toutes seules dans leurs garagesgarages]. Et en menant de plus amples études, on découvre des champs électromagnétiqueschamps électromagnétiques puissants chez la majorité des personnes toujours affectées par le problème.
Eh bien, figurez-vous qu'on retrouve la même situation à Taos, dans le Nouveau-Mexique, au début des années 90. Cette fois, l'enquête est menée conjointement par le laboratoire de Los Alamos, les Laboratoires SandiaSandia, le laboratoire Phillips de l'US Air Force, et l'université du Nouveau-Mexique. Rien que ça. Le Hum de Taos reçoit énormément d'attention médiatique, mais malgré tous les efforts déployés, sa source reste impossible à identifier. Si ce n'est qu'une fois encore, on remarque des champs électromagnétiques élevés et des dysfonctionnements électriques dans les zones affectées. [Un bourdonnement électrique.] En cause, les lignes haute tensionhaute tension de la ville, manifestement un peu trop puissantes pour être situées aussi près des habitations.
Hypothèses anthropiques
Alors, est-ce que le syndromesyndrome d'hypersensibilité électromagnétique, dit HSE, aurait quelque chose à voir avec ça ? Eh bien, je ne vais pas trop entrer dans le détail, car c'est un sujet à part entière, mais à ce jour, aucune étude scientifique n'a pu apporter de preuve solidesolide à l'existence de ce syndrome. Si des études semblent indiquer que les ondes électromagnétiques pourraient devenir audibles au-delà d'une certaine intensité, rien ne les relie pour l'instant au Hum. Une étude menée par Glen MacPherson, celui de la carte du Hum, a même démontré que les entendeurs percevaient toujours le son après avoir été placés dans une boîte isolée contre les ondes radio. Il y a donc « peut-être » quelque chose à creuser de ce côté-là, mais à défaut d'une explication solide et satisfaisante, je vous propose de poursuivre notre investigation. Petite note : si vous pensez être vous-même sensibles à ces ondes, sachez qu'un chapeau en aluminiumaluminium peut efficacement les bloquer. Ce n'est pas une blague, mais il va sans dire que je vous recommande de ne porter cet accessoire que chez vous.
Parmi les autres suspects d'origine anthropique, on trouve les oléoducsoléoducs. D'après deux études menées par le chercheur Victor Krylov, leurs vibrations pourraient se répercuter dans le sol et faire vibrer les bâtiments alentour, mais à ce jour, aucune mesure n'est venue corroborer cette hypothèse.
Les transformateurstransformateurs de puissance, pour leur part, sont connus pour générer un bourdonnement autour de 100 Hz, le double de la fréquence électrique du réseau. Placés trop près des zones résidentielles, ils peuvent générer un Hum. Mais comme on l'a dit, un Hum n'est un Hum que tant que sa source n'est pas identifiée. Pour ceux qui restent un mystère, la vérité est ailleurs. [La musique du générique de X-Files se met à jouer.] Oui, fans de X-Files, c'est à vous que je m'adresse ! Les hypermnésiques parmi vous se souviendront peut-être que l'agent Mulder fait très brièvement allusion au Hum de Taos, dans l'épisode 2 de la saison 6. Il y est question de contrôle mental mis en œuvre par le gouvernement à l'aide d'ondes extrêmement basse fréquence, ou ELF. Et je suis au plaisir de vous dire que lorsque l'on parle du Hum, les théories du complot vont bon train ! Elles incriminent le plus souvent des projets de l'armée, comme le LORAN ou le HAARP. Alors afin de ne décevoir personne, voyons si ces deux-là tiennent le coup.
Le LORAN est un système de radionavigation utilisant un réseau de puissants émetteurs radio. Ceux-ci communiquent de manière constante à une fréquence de 100 Hz, mais pour l'instant, aucune corrélation n'a pu être démontrée entre la répartition des entendeurs et celle des lieux d'émission. Quant au très controversé HAARP, un programme de recherche consacré à l'étude de l'ionosphèreionosphère, il n'est entré en service qu'au milieu des années 90. Il ne peut donc, au mieux, expliquer qu'une partie des Hums... mais là encore, il y a un hic. Tandis qu'on accuse le centre de produire des ondes radio capables de voyager sur des milliers de kilomètres, les Hums sont généralement relativement confinés dans les villes qu'ils affectent, avec un rayon de moins d'une centaine de kilomètres. Je n'irai pas jusqu'à m'aventurer à dire que l'armée n'a rien à voir avec le Hum. Je n'en sais rien. Mais une fois de plus, on se retrouve sans une explication véritablement satisfaisante. Après une dernière pause, je vous propose d'effectuer la dernière partie de notre voyage ; par-delà notre corps, les villes et les réseaux de satellites, jusqu'au plus profond des océans, où les chercheurs ont récemment fait une découverte intéressante. Je vous laisse prendre votre maillot, et on y va.
Le Hum de la Terre
Comme on l'a vu, il existe un Taos Hum, un Kokomo Hum ou encore un Bristol Hum. Mais il existe aussi un Earth Hum, un bourdonnement persistant émis par notre planète. Ce bruit est décrit pour la première fois en 1998 par une équipe japonaise, et il faudra attendre 2015 pour que des chercheurs français parviennent enfin à en découvrir la source exacte. En roulant contre le plancherplancher océanique, des vagues dites « infragravitaires » font résonner la Terre comme un bol tibétain [un murmure sous-marinsous-marin se transforme en vibration produite par un bol tibétain]. Elles génèrent ainsi un bruit de fond, particulièrement remarquable lors des tempêtes en mer, et depuis devenu un outil très utile pour mieux comprendre la structure interne qui se trouve sous nos pieds. Plusieurs personnes ont déclaré le mystère du Hum élucidé suite à la publication de cette étude, mais là aussi, et encore, et toujours, il y a un hic. Avec une période de l'ordre de 30 secondes, soit à peine 0,03 Hz, le murmure de la Terre est inaudible pour nos oreilles humaines. Même le pigeon, a priori doté de la meilleure audition basse fréquence, ne descend pas en dessous de 0,05 Hz dans des circonstances optimales. [Un roucoulement.]
Le mystère reste donc entier, ou en tout cas, ses réponses multiples. Dans certaines circonstances, le Hum n'est rien de plus qu'un son produit par le corps de celui ou celle qui l'entend. Dans d'autres, c'est un poisson qui chante à la lunelune. Pour certaines villes, victimes de l'industrialisation, c'est une usine qui vrombit. Et pour encore beaucoup de monde à travers le globe, c'est une énigme qui ne demande qu'à être résolue. Les solutions pour venir à bout du Hum sont quant à elles aussi variées que ses origines possibles. Certaines personnes déménagent, d'autres apprennent à vivre avec, grâce à la méditationméditation, une aide psychologique, de la thérapiethérapie comportementale et cognitive ou un recours aux anxiolytiquesanxiolytiques. Une autre tactique peut consister à utiliser des bruits blancsbruits blancs pour masquer ce bourdonnement. (Pour en apprendre plus à ce sujet, je vous renvoie à l'épisode précédent.) Et enfin, si vous êtes concerné·e, évitez d'améliorer l'isolation phoniqueisolation phonique de votre maison sans avoir préalablement mené des analyses acoustiques chez vous. Plusieurs entendeurs affirment que ces mesures n'ont fait qu'aggraver le problème en réduisant le bruit environnemental, et en rendant de ce fait le bourdonnement d'autant plus notable.
Alors justement, dites-moi : est-ce que vous l'entendez, vous, le Hum ? Partagez votre expérience en commentaire, et mieux encore, si vous ne l'avez pas encore fait, ajoutez-la à la carte de Glen MacPherson. J'ai entendu le Hum chez moi, il y a un an ou deux, sans savoir de quoi il s'agissait. Ce n'est qu'en écrivant cet épisode que ce souvenir m'est revenu, et je dois dire que je regrette un peu de ne pas avoir eu la présence d'esprit de l'enregistrer à l'époque. Maintenant que vous savez tout sur le Hum, vous savez quoi faire si jamais il vient vous titiller les oreilles. Si cet épisode vous a plu ou si vous avez des remarques ou des demandes, n'hésitez pas à me le faire savoir, soit en commentaire, soit en m'écrivant sur TwitterTwitter @Emma_Hollen. Si vous connaissez une personne sourde ou malentendante à qui ce podcast pourrait plaire, n'hésitez pas à le lui recommander. Des transcriptionstranscriptions détaillées sont fournies en description, avec les liens vers toutes les études que j'ai mentionnées. Pensez à vous abonner pour ne pas manquer le prochain épisode. On se retrouve normalement dans deux semaines. Je pars en vacances donc j'espère pouvoir sortir le prochain épisode à temps. Et d'ici là, écoutez le monde autrement.
C'est le moment du fun fact post-épisode pour les curieux et les curieuses qui en veulent toujours plus. Le Hum est probablement le bruit le plus mystérieux qui reste à élucider, mais il y en a quelques autres qui ont donné du fil à retordre aux scientifiques. On y retrouve Julia, Slow Down ou encore le fameux Bloop, dont ma collègue Julie KernJulie Kern vous a parlé dans un ancien épisode de Chasseurs de Science. Dans les trois cas, il semblerait que le coupable le plus probable soit un iceberg, un objet particulièrement bavard qui aura très certainement son propre épisode d'INFRA.