L'ambroisie à feuilles d'armoise, une plante hautement allergisante dont le pollen atteint son pic en août, provoque des symptômes souvent aigus. Les estimations du nombre de personnes allergiques à l’avenir inquiètent les autorités sanitaires, car cela pourrait concerner 10 millions de Français à l'horizon 2050. Comment expliquer ce chiffre et, surtout, comment lutter contre cette progression ? 


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    Originaire d'Amérique du Nord, l'ambroisie a été introduite en France au XIXe siècle. Historiquement, ses zones d'implantation étaient restreintes à quelques régions, mais une accélération de l'expansion est observée depuis 2005, favorisée par les activités agricoles. Avec une saison pollinique durant près de deux mois - ce qui en fait l'une des plus longues -, de plus en plus de personnes sont touchées sur le territoire. Bien que seulement 3 % des Français y soient sensibilisés à l'heure actuelle, les estimations futures sont alarmantes : jusqu'à 15 % de la population française pourrait devenir allergique d'ici 2050

    Quels facteurs peuvent expliquer ce risque de propagation future ?

    Bien que la pollution atmosphérique aggrave les symptômes d'allergie, notamment lors des pics de pollution à l'ozone ou aux particules fines, son rôle dans la sensibilisation aux allergies n'est pas encore prouvé. L'augmentation du CO2 atmosphérique et le réchauffement climatique sont également suspectés d'influencer les allergies

    Le pollen d’ambroisie à feuilles d’armoise (<em>Ambrosia artemisiifolia L.</em>) est responsable d’allergies, influencées par l’augmentation de la pollution et du CO<sub>2</sub> atmosphériques associée au changement climatique. © Elena, Adobe Stock
    Le pollen d’ambroisie à feuilles d’armoise (Ambrosia artemisiifolia L.) est responsable d’allergies, influencées par l’augmentation de la pollution et du CO2 atmosphériques associée au changement climatique. © Elena, Adobe Stock

    Pour étudier les effets d'une augmentation du taux de CO2 atmosphérique sur la production de pollen d’ambroisie, des scientifiques ont cultivé cette plante dans des serres avec des niveaux de CO2 correspondant à ceux actuels et à ceux projetés pour le futur. Les résultats sont préoccupants : une élévation du CO2 peut multiplier la production de pollenpollen jusqu’à trois fois, accélérer la croissance de l'ambroisie, et prolonger sa période de pollinisation.

    De plus, il a été observé que le pollen produit dans une atmosphèreatmosphère riche en CO2 contient plus d'allergènes. Concernant l'augmentation des températures à la surface de la Terre, induite par le CO2 et autres gaz à effet de serregaz à effet de serre, elle risque d'augmenter la production de pollen et prolonger la saisonsaison pollinique, exacerbant ainsi les symptômes allergiques sur une période plus longue.

    Un futur climatique qui pousse à agir

    Outre la réduction des émissionsémissions de CO2, la stratégie principale pour limiter la propagation de l'ambroisie repose sur l'éradication des jeunes plants, avant qu'ils ne mûrissent et libèrent du pollen. Pour cela, il est nécessaire de coordonner les efforts, notamment grâce au Réseau national de surveillance aérobiologique (RNSA) qui informe les citoyens, par la suite capables d'effectuer des signalements sur les zones infestées. 


    Allergies : 4 fois plus de pollen d’ambroisie en Europe d’ici 2050 ?

    Article du CNRS, publié le 26 mai 2015

    Les concentrations dans l'airair du pollen d'ambroisie à feuilles d'armoiseambroisie à feuilles d'armoise, très allergisant, pourraient avoir quadruplé en Europe à l'horizon 2050. Le changement climatique serait responsable des deux tiers de cette augmentation, le tiers restant serait dû quant à lui à la colonisation de la plante, favorisée par les activités humaines. Ces estimations montrent qu'il est aujourd'hui nécessaire de mettre en place une gestion coordonnée de cette plante invasive au niveau européen par un suivi sur le long terme des pollens et une cartographie de la présence des plantes.

    Ambrosia artemisiifolia est une plante à pollen très allergisant, d'origine nord-américaine. Les principales manifestations cliniques de l'allergie provoquée par cette plante sont des rhinites, des conjonctivites, des trachéites et des crises d’asthme souvent graves. Le pic de pollinisation de cette plante, qui a déjà colonisé en France, la Bourgogne, l'Auvergne et la région Rhône-Alpes, a lieu en août et en septembre, allongeant ainsi, pour toutes les personnes sensibles, la période des allergies jusqu'à l'automneautomne. Plusieurs études ont déjà montré que le réchauffement climatiqueréchauffement climatique permettra à l'ambroisie de s'établir dans des régions où le climatclimat ne lui était auparavant pas favorable, sans toutefois quantifier l'augmentation des concentrations de son pollen dans l'air ambiant.

    L'évolution géographique de la contamination de l'air par les pollens dépend de plusieurs facteurs : la capacité de la plante à atteindre de nouveaux territoires via différents phénomènes de dispersion de ses graines, et le changement climatique qui permet à la plante de s'épanouir sur ces nouveaux territoires. Pour prédire l'effet du climat et des différents modes de dispersion des graines sur la concentration atmosphérique en pollen, les chercheurs ont utilisé plusieurs types de modèles numériquesmodèles numériques. Les premiers simulent le changement climatique en fonction de la quantité de gaz à effet de serre qui pourrait être émise dans les années à venir par les activités humaines. Les seconds modélisent l'invasion de la plante, la production et le relâchement des pollens et leur dispersion dans l'air. Avec ces modèles, qui ont permis de tester différents scénarios de diffusiondiffusion des graines et de changement climatique, les chercheurs ont déterminé que le facteur d'augmentation des concentrations du pollen d’ambroisie serait en moyenne de quatre, d'ici 2050. Pour confirmer les tendances énoncées, qui comportent nécessairement une part d'incertitude, il est nécessaire de mettre en place un suivi sur le long terme de ces pollens et cartographier l'évolution de la présence des plantes en Europe.

    Grain de pollen d’<em>Ambrosia artemisiifolia</em> au microscope électronique à balayage. © Marie Majaura, CC BY-SA 3.0
    Grain de pollen d’Ambrosia artemisiifolia au microscope électronique à balayage. © Marie Majaura, CC BY-SA 3.0

    Vers de meilleures prévisions des concentrations de pollen

    Avec cette étude publiée dans la revue Nature Climate Change le 25 mai 2015, les chercheurs du CNRS, du CEA, de l'Ineris et du RNSA en collaboration avec plusieurs instituts européens ont également déterminé la responsabilité propre de chacun de ces facteurs dans l'augmentation du pollen dans l'air. La dispersion des graines, qu'elle soit d'origine naturelle, avec l'eau de ruissèlement et les cours d'eau, ou humaine, via le transport routier, les voies ferrées et les pratiques agricoles, est responsable d'un tiers de l'augmentation de la concentration du pollen. Le changement climatique est quant à lui responsable des deux autres tiers. D'une part, il favorise l'expansion de l'ambroisie au nord et au nord-est de l'Europe notamment. D'une autre part, son effet se traduit principalement par l'accroissement de la production de pollen induite par l'augmentation du CO2 et son effet favorable au développement de la végétation.

    Ces résultats, obtenus dans le cadre du projet européen ATOPICA3, ouvrent également la voie à une nouvelle génération d'outils de prévision à court terme des concentrations de pollen et devraient, à terme, permettre d'inscrire l'ambroisie dans les alertes de préventionprévention contre l'allergie.