Dans les monts de l’Oural, se trouve un site étonnant, classé comme l’une des sept merveilles de Russie. Sept piliers de pierre gigantesques s’élèvent en effet à plus de 30 mètres au-dessus du sol. Mais quels processus sont à l’origine de leur formation ?


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    Quelles sont ces étranges silhouettes qui se dressent dans l'aubeaube brumeuse et froide des montagnes de l'Oural ? Mesurant entre 30 et 42 mètres de haut, ces piliers de pierre sont communément appelés Man-Pupu-Nyor (« Petite montagne des idoles »), ou encore les « sept géants de l'Oural ». Situés dans la République de Komi, en Russie, et plus précisément dans la réserve de Pechoro-Ilychski, ces formations géologiques sont considérées comme l'une des « sept merveilles de Russie », fréquemment visitée par les touristes.

    Décrite pour la première fois en 1846, ces rochers sont longtemps restés mystérieux. Et pour cause : pour les comprendre leur formation, il faut remonter plus de 400 millions d'années en arrière !

    Dans son manteau d'hiver, le paysage de Man-Pupu-Nyor est encore plus étrange © Фото Алексей Романов, Wikimedia Commons, cc by-sa 4.0
    Dans son manteau d'hiver, le paysage de Man-Pupu-Nyor est encore plus étrange © Фото Алексей Романов, Wikimedia Commons, cc by-sa 4.0

    Une roche sédimentaire ancienne et très dure

    En 2017, une analyse des roches qui les composent révèle que les piliers sont faits de quartzite, une roche sédimentaire très dure, qui, comme son nom l'indique, est principalement composée de quartz cimentés. Dans cette roche claire, on trouve des alternances de bandes plus sombres composées d'hématite, de mica, de tourmaline. La roche qui compose les géants de l'Oural est donc un ancien grèsgrès qui a été métamorphisé. Le grès est une roche sédimentaire détritique, issu de l'érosion de roches magmatiquesroches magmatiques riches en quartz, et du dépôt des particules sédimentaires. Au fil de la compaction, les grains sont cimentés et le sédimentsédiment meuble devient une roche indurée. Si la pressionpression continue d'augmenter, on va alors voir apparaitre certains nouveaux minérauxminéraux, comme les micas, via des réactions minéralogiques entre les minéraux existants et les fluides circulants dans la roche. C'est ce qui s'est passé pour les quartzites du Man-Pupu-Nyor.

    Les cristaux de zirconzircon retrouvés dans les quartzites ont d'ailleurs pu être datés. Ils révèlent des âges allant du CambrienCambrien (541 à 485 millions d'années) à l'OrdovicienOrdovicien (485 à 443 millions d'années), indiquant que le les particules sédimentaires constituant aujourd'hui les sept piliers ont été déposées durant ces périodes.

    Les sept géants de l'Oural représentent une formation géologique impressionnante dont l'histoire géologique remonte à plus de 400 millions d'années © Kasimys, Wikimedia Commons, cc by-sa 4.0
    Les sept géants de l'Oural représentent une formation géologique impressionnante dont l'histoire géologique remonte à plus de 400 millions d'années © Kasimys, Wikimedia Commons, cc by-sa 4.0

    Une histoire géologique très ancienne mais des structures récentes

    À cette époque, le paysage de la région est bien différent. Les continents ne sont en effet pas ceux que l'on connait actuellement. La collision de deux blocs continentaux, nommés Baltica et Arctida, va entrainer dans cette zone la formation d'une chaîne de montagnes dite « pré-Ouralienne-Timanide ». C'est l'érosion de cette chaîne qui va produire les sédiments qui composent les piliers. Bien plus tard, à la fin du CarbonifèreCarbonifère, vers 299 millions d'années, le mouvementmouvement des plaques tectoniquesplaques tectoniques va entrainer une intense déformation de la croûte continentalecroûte continentale, qui va mener au soulèvement de la chaîne ouralienne. La constructionconstruction de cette haute chaîne va se continuer jusqu'au début du JurassiqueJurassique, il y a 200 millions d'années environ. Actuellement, elle s'étire sur plus de 2 500 km, entre la mer de Kara au nord et les steppessteppes du Kazakhstan au sud. Il s'agit donc d'une vieille chaîne de montagnes (on parle de chaîne hercyniennechaîne hercynienne) que les éléments ne vont tarder à abraser. Sous l'effet de l'érosion, les reliefs vont ainsi progressivement perdre de leur hauteur et les sédiments produits vont s'accumuler sur les anciens terrains sédimentaires ordoviciens.

    Petit à petit, l’Oural est presque totalement arasé et va former les reliefs doux que l'on connait aujourd'hui. Le sommet de cette chaîne ne culmine ainsi plus qu'à 1 895 mètres d'altitude. Pourtant, toujours pas de géants de pierre à l'horizon.

    Le travail de sculpture du vent et de l’eau

    Ce n'est certainement que relativement récemment qu'ils ont été formés, après le retrait des glaciersglaciers qui ont recouvert la région durant les dernières glaciationsglaciations. Une fois libérés de l'épaisse calotte polairecalotte polaire les recouvrant, ces terrains sédimentaires ont continué à être érodés par l'eau, le ventvent et la neige. Progressivement, les roches superficielles les plus meubles ont été fragmentées et les particules sédimentaires emportées, jusqu'à arriver sur le niveau plus ancien et induré de quartzite. Localement, ce niveau a dû présenter certaines variations d'indurationinduration ou de minéralogie qui lui a permis de résister à l'érosion. Alors que le paysage alentour était lentement arasé, les sept piliers ont donc commencé à se dessiner. C'est ce que l'on appelle l'érosion différentielle, un processus qui est souvent à l'origine de sculptures étranges, comme dans le désert blanc !

    Formes étranges sculptées par le vent dans le Désert Blanc en Egypte © Maria Salama, imaggeo.egu.eu
    Formes étranges sculptées par le vent dans le Désert Blanc en Egypte © Maria Salama, imaggeo.egu.eu