Dépoussiéré, le concept du ballon dirigeable bénéficie aujourd’hui des technologies les plus sophistiquées et fait phosphorer militaires et civils de concert. Son grand retour en force est loin d’être une lubie pour passionnés fortunés.
Très utilisés au début du XXe siècle, les dirigeables ont été délaissés au profit de l’aviation ; et le tragique incendie, en 1937, de l’Hindenburg de la firme allemande Zeppelin, aux États-Unis, signa la fin des vols commerciaux transatlantiques. Mais, pour mémoire, le LZ 127 Graf Zeppelin avait effectué, durant son exploitation (1928 à 1937), 590 vols, un tour du monde, 143 traversées de l'Atlantique et une du Pacifique, il avait transporté 13.110 passagers.
Cette belle au bois dormant technologique revient sur la sellette et motive plus que jamais les grandes puissances mondiales. En France, la filière du dirigeable se structure et fait partie des programmes d'Industrie du Futur dans le cadre « Plans de la nouvelle France industrielle ». La conquête spatiale se réinvente au Safe Cluster (Security and Aerospace actors for the Future of Earth) en Région Sud (ex-Paca) qui se rêve en Airship Village, à l’horizon 2020.
Les ballons dirigeables répondent aux nouveaux défis écologiques, énergétiques et économiques ainsi qu’aux besoins exprimés par l’industrie, réinventant jusqu’au voyage avec, dans un futur proche, des concepts de croisière de luxe dans les airs. Sans oublier les applications militaires de ces forteresses volantes.
Les nouveaux usages identifiés du dirigeable, habité ou autonome, sont multiples. Il peut relayer ou se substituer aux satellites de télécommunication ; en vol stationnaire et mieux qu’un drone, il effectue des missions de surveillance sur des périodes indéfinies (maritime et terrestre, scientifique et environnementale). Cargo aérien, il peut aussi livrer des hôpitaux de campagne et apporter des secours humanitaires lors de catastrophe naturelle sur des zones rendues inaccessibles, car il peut se poser presque partout. Il solutionne le transport aérien de fret complexe (éolienne, tronc d'arbre).
S’il présente quelques inconvénients (lenteur et vulnérabilité face aux conditions aérologiques), il dispose de nombreux avantages. Outre une faible dépendance aux infrastructures aéroportuaires, il consomme dix fois moins qu’un avion et 20 fois moins qu’un hélicoptère pour la même charge et la même distance, le dirigeable n’a qu’une très faible empreinte environnementale. Les moteurs électriques devraient progressivement remplacer le kérosène. La rareté du gaz porteur, l’hélium, oblige à concevoir des motorisations hybrides et alternatives.
Pour cette raison, il reste encore quelques obstacles à dépasser : les dirigeables doivent être pourvus de structures en carbone extrêmement résistantes. Les enveloppes devront être adaptées pour recevoir des panneaux photovoltaïques et être équipées des dernières technologies de textiles intelligents (capteurs connectés), auto-réparants, ultra-résistants et ultra-légers afin de minimiser les fuites de gaz.
Que de défis à relever mais à portée de main. La Nasa songe à déployer dans quelques décennies un dirigeable sur Vénus quand d’autres rêvent, comme l'architecte Tiagos Barros, à des ballons sphériques assemblés en un nuage de mini-village ambulant. Partons à la découverte de ces voiliers des airs...