Les Archaea ultrathermophiles, de bien plus étranges créatures…

Les Archaea ultrathermophiles, de bien plus étranges créatures…

Sur Terre, la plupart des formes de vie connues sont adaptées aux températures ambiantes, entre 15 et 45° C. Mais certains microorganismes thermophiles ont leur croissance maximale située entre 45° et 70 °C. C'est le cas des Archaea.


Microbiologistes isolant des souches anaérobies. © Ifremer/Dugornay/Daniel Desbruyères

Dans les milieux volcaniques terrestres et sous-marins, des microorganismes ultrathermophiles, qui se multiplient à des températures supérieures à 80° C, ont été mis en évidence, isolés et cultivés à partir de 1972, date de la découverte de Sulfolobus acidocaldarius dans un geyser du parc de Yellowstone aux États-Unis.

Ces microorganismes appartiennent presque exclusivement au domaine des Archaea, dont un grand nombre sont aujourd'hui décrites à partir d'échantillons de cheminées hydrothermales ou de fluide.

Record à battre : une croissance à 121° C

Aujourd'hui, plusieurs dizaines de souches croissant au-dessus de 80° C ont été isolées du milieu hydrothermal, et le record était détenu par une souche provenant d'une cheminée de la dorsale médio-atlantique (3.400 mètres de profondeur), Pyrolobus fumarii. Elle présente une croissance maximum à 105° C et se divise jusqu'à 113° C à un pH optimum de 5,5 ! Mais en 2003, un autre microorganisme a depuis battu ce record avec une capacité à vivre à 121° C !

On ne connaît pas encore la valeur limite au-delà de laquelle la vie n'est plus possible, et on ne saisit encore qu'imparfaitement les mécanismes qui permettent aux biopolymères de résister à de telles contraintes.

Les biotechnologies : premières intéressées par les abysses

Ces microorganismes de l'impossible sont fascinants pour les industriels des biotechnologies. Leurs constituants (enzymes, polymères), qui fonctionnent à des températures élevées, présentent aussi une réelle stabilité à l'agression physique et chimique et peuvent trouver des applications après clonage et expression dans des microorganismes plus faciles à cultiver en fermenteur.

Ainsi, les « extrêmozymes » pourraient apporter des réponses à des questions industrielles anciennes qui nécessitent l'utilisation d'enzymes à des températures élevées pour diminuer la viscosité ou augmenter la solubilité de certains constituants, ou pour éviter les contaminations par des bactéries pathogènes mésophiles.

Ils peuvent être aussi employés dans des filières beaucoup plus nouvelles, telles que les techniques d'amplification des acides nucléiques utilisées, entre autres, pour le diagnostic médical ou pour les recherches génétiques.