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Alors même que Victor Lemoine se passionnait pour le Gastornis archaïque de Reims, de l'autre côté de l'Atlantique les paléontologuespaléontologues américains se lançaient à la découverte des richesses paléontologiques du Far West. L'un des plus célèbres d'entre eux fut Edward Drinker Cope (1840-1897).
Des oiseaux géants en Europe et en Amérique du Nord
Parmi les nombreux fossiles collectés par une de ses expéditions au Nouveau-Mexique, en 1874, dans des couches datant de l'Éocène inférieur, figuraient quelques restes d'un oiseauoiseau géant, qu'il décrivit en 1877 sous le nom de Diatryma gigantea, tout en indiquant que son plus proche parent était sans doute Gastornis. D'autres spécialistes allèrent plus loin en concluant que l'oiseau européen et celui du Nouveau-Mexique ne faisaient qu'un. Il devenait clair que ces oiseaux gigantesques du début du Tertiaire n'avaient pas seulement peuplé l'Europe, mais aussi l'Amérique du Nord.
En Europe, les années 1880 et 1890 virent la découverte de nouveaux restes, en Angleterre et en Belgique, qui furent attribués à Gastornis. Mais il s'agissait d'os isolés, et la seule reconstitution du squelette complet demeurait celle proposée par Victor Lemoine. Cela devait conduire à de nombreux malentendus lorsque des fossiles beaucoup plus complets furent trouvés en Amérique du Nord.
Un squelette presque complet
À cet égard, la description en 1917 par William Diller Matthew et Walter Granger d'un squelette presque complet trouvé dans l'Éocène inférieur du Wyoming représente un tournant.
Enfin il devenait possible de présenter une description détaillée de l'ostéologieostéologie d'un de ces oiseaux et d'en donner une reconstitution fiable. La surprise des paléontologues américains fut assez grande quand ils constatèrent que leur spécimen, décrit sous le nom de Diatryma steini, se distinguait du Gastornis européen tel que l'avait reconstitué Lemoine par de nombreuses différences significatives. Diatryma apparaissait comme un oiseau nettement plus massif que Gastornis, avec un cou plus court et plus robuste. Surtout, son crânecrâne au bec énorme et élevé ne ressemblait guère à celui décrit par Lemoine, au bec plus fin et plus allongé, et on ne relevait sur le spécimen américain aucune trace des insertions dentaires signalées par Lemoine.
Perte d'intérêt pour Gastornis
Ces différences conduisirent Matthew et Granger à séparer nettement Diatryma de Gastornis. Il leur semblait aussi souhaitable de réviser le matériel fossilefossile d'Europe en vue de mieux le comprendre, et ils encouragèrent leurs confrères européens à faire ce travail. En 1917, beaucoup de paléontologues européens avaient hélas d'autres préoccupations que la révision de Gastornis. Une fois les hostilités terminées, l'oiseau géant européen sombra dans un certain oubli. Le Diatryma américain, beaucoup mieux connu, devint emblématique de ces grands oiseaux du début du Tertiaire, et sa reconstitution figura dès lors dans de nombreux ouvrages de vulgarisation.
Conséquence de tout cela, lorsque de nouveaux restes furent découverts en Europe, notamment dans l'Éocène moyen du Geiseltal, en Allemagne centrale, dans les années 1950 et 1960, ils furent rapportés à Diatryma, non à l'obscur Gastornis.