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    Grâce à l'érosion qui entaille ses reliefs, l'Arche de Fitzcarrald constitue un des rares endroits où l'on peut observer et étudier les sédimentssédiments miocènesmiocènes de la Mer Pebas.

    Caïman à lunettes. © BiacheB, <em>Wikimedia commons</em>, CC by-sa 4.0

    Caïman à lunettes. © BiacheB, Wikimedia commons, CC by-sa 4.0

    C'est aussi dans cette région que le premier fossilefossile du caïmancaïman géant Purussaurus est découvert au Pérou. En effet, en 1959, l'écrivain aventurier Peter Matthiessen trouve un maxillairemaxillaire fossile de grande taille dans la Quebrada Grasa du Rio Mapuya, dans le département d'Ucayali. Avec ce fossile de 125 kgkg, il navigue en pirogue sur plus de 300 km jusqu'à la ville de Pucallpa. Le maxillaire est détenu au commissariat de Pucallpa, puis perdu pendant près de 20 ans, avant d'être identifié comme celui du caïman géant Purussaurus par les paléontologuespaléontologues du Musée d'Histoire Naturelle de l'Université San Marcos de Lima (UNMSM).

    César Cruz et Peter Matthiessen avec le maxillaire de <em>Purussaurus</em>, Rio Mapuya (photo extraite du livre, « The Cloud Forest » de Peter Matthiessen, 1961) . Reproduction et utilisation interdites

    César Cruz et Peter Matthiessen avec le maxillaire de Purussaurus, Rio Mapuya (photo extraite du livre, « The Cloud Forest » de Peter Matthiessen, 1961) . Reproduction et utilisation interdites

    L'intérêt géologique et paléontologique de cette région ne restant plus à démontrer, en août 2005, un groupe de scientifiques français et péruviens (géologuesgéologues et paléontologues, voir liste des participants) décide de remonter les rivières Inuya et Mapuya sur les traces de Peter Matthiessen, au coeur de l'Arche de Fitzcarrald. L'Expédition Fitzcarrald 2005 durera 3 semaines et permettra de découvrir de nouveaux restes fossiles du caïman géant Purussaurus, mais aussi de la faunefaune qui cohabitait avec lui. Elle fournira en même temps, grâce à l'étude des sédiments miocènes, de précieux renseignements sur l'environnement de la Mer Pebas et sur sa disparition.

    Trajet de l'Expédition Fitzcarrald 2005 sur l'Arche de Fitzcarrald.  Reproduction et utilisation interdites

    Trajet de l'Expédition Fitzcarrald 2005 sur l'Arche de Fitzcarrald.  Reproduction et utilisation interdites

    L'expédition parcours 125 km en remontant les rivières Urubamba, Inuya et Mapuya, qui s'enfoncent vers le Brésil dans une région peu explorée par les scientifiques et relativement inhospitalière. Il n'existe pas de carte géologique précise de cette zone, et l'expédition espère collecter de nombreuses données inédites pour mieux comprendre l'histoire du bassin amazonien.

    Expédition Fitzcarrald 2005, Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Il faudra remonter pendant 6 jours les rivières Inuya et Mapuya avant d'atteindre la Quebrada Grasa.

    Expédition Fitzcarrald 2005, Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    C'est la saisonsaison sèche et le niveau des cours d'eau est très bas, la remontée est pénible, il faut souvent alléger et pousser les pirogues. Les membres de l'expédition souffriront de blessures aux pieds provoquées par la friction du sablesable pénétrant dans les chaussures. Ces rivières sont habitées par des raies d'eau douceeau douce - un des héritages de la Mer Pebas - cachées dans le sable, dont la piqûre très douloureuse - elles possèdent un dard venimeuxvenimeux sur la queue - peut entraîner de graves nécroses.

    Expédition Fitzcarrald 2005, Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Les affleurementsaffleurements géologiques sont nombreux et le cours d'eau en étiageétiage permet d'observer facilement les sédiments miocènes. En saison des pluies, ces affleurements sont recouverts par plusieurs mètres d'eau.

    Expédition Fitzcarrald 2005, affleurement de sédiments miocènes le long du Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, affleurement de sédiments miocènes le long du Rio Inuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Les sédiments miocènes sont encore de nos jours relativement meubles. On dégage et on taille l'affleurement à la machette de manière à mettre en évidence la succession lithologique et les figures sédimentaires. Ici, les figures sédimentaires confirment un environnement de dépôt tidaltidal (sous l'influence des marées) et donc la présence d'estuairesestuaires débouchant dans la Mer Pebas.

    Expédition Fitzcarrald 2005, entrée de la Quebrada Grasa. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, entrée de la Quebrada Grasa. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Après une semaine de remontée en pirogue et à pieds, la Quebrada Grasa est atteinte. C'est un petit affluent du Rio Mapuya, à première vue peu engageant.

    Expédition Fitzcarrald 2005, Quebrada Grasa. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, Quebrada Grasa. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    La Quebrada Grasa sera explorée pendant toute une journée sans rencontrer la moindre trace de fossile. Le maxillaire découvert par Matthiessen provient probablement d'un glissement de terrain de l'un des flancs de la Quebrada. Faute de temps, les recherches continueront les jours suivants le long du Rio Mapuya.

    Expédition Fitzcarrald 2005, fragment de mâchoire fossile du caïman <em>Purussaurus.</em> © P.O. Antoine Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, fragment de mâchoire fossile du caïman Purussaurus. © P.O. Antoine Reproduction et utilisation interdites

    L'équipe est vite consolée ; par endroits, le fond du Rio Mapuya est jonché de restes fossiles qui ont été transportés par le cours d'eau. On y trouve évidemment des restes de Purussaurus souvent spectaculaires - comme la mandibulemandibule découverte par Matthiessen ou le fragment de mâchoire ci-dessus - mais de faible intérêt pour les scientifiques qui recherchent des fossiles conservés en place dans les sédiments miocènes.

    Expédition Fitzcarrald 2005, un des gisements de fossiles du Rio Mapuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, un des gisements de fossiles du Rio Mapuya. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Quelques kilomètres plus haut, les affleurements de sédiments miocènes contenant les fossiles (en place) apparaissent enfin. Ils sont constitués de couches de sédiments grossiers (conglomératsconglomérats) déposés probablement par des tempêtestempêtes et où se sont accumulés des restes d'animaux morts.

    Expédition Fitzcarrald 2005, dent fossile d'herbivore du Miocène. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, dent fossile d'herbivore du Miocène. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Les fossiles les mieux préservées sont les dents ; on les trouve en abondance et elles sont facilement identifiables.

    Expédition Fitzcarrald 2005, maxillaire fossile de gavial (crocodile à rostre allongé) du Miocène. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, maxillaire fossile de gavial (crocodile à rostre allongé) du Miocène. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Globalement, la quête s'est avérée très fructueuse. Les chercheurs ont pu collecter 250 kg de fossiles, provenant d'une trentaine d'espècesespèces de vertébrésvertébrés, parmi lesquelles figurent 7 espèces de crocodilecrocodile et 13 espèces de mammifèresmammifères. On a ainsi retrouvé des restes de représentants de paresseuxparesseux et tatoustatous géants, d'herbivoresherbivores endémiquesendémiques de la taille du rhinocérosrhinocéros, de plusieurs rongeursrongeurs, d'un marsupialmarsupial et d'un dauphin. De nombreux restes de poissonspoissons, dont une vertèbre de requin de grande taille, ont également été découverts.

    Expédition Fitzcarrald 2005, carapace fossile d'une tortue aquatique « Matamata » du Miocène. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Expédition Fitzcarrald 2005, carapace fossile d'une tortue aquatique « Matamata » du Miocène. © IRD/ P. Baby Reproduction et utilisation interdites

    Cette carapace complète de tortue aquatiquetortue aquatique de plus de 150 kg constitue une des pièces les plus spectaculaires. Elle a été découverte le dernier jour de l'expédition et est actuellement exposée au Musée d'Histoire Naturelle de Lima (UNMSM). Elle a la particularité de présenter de nombreuses traces de morsuresmorsures du caïman géant Purussaurus.

    Section litho-stratigraphique relevée sur un des affleurements étudiés lors de l'Expédition Fitzcarrald. © N. Espurt Reproduction et utilisation interdites

    Section litho-stratigraphique relevée sur un des affleurements étudiés lors de l'Expédition Fitzcarrald. © N. Espurt Reproduction et utilisation interdites

    Sur chaque affleurement, les géologues relèvent une section litho-stratigraphique (log) où sont représentés les différentes couches géologiques avec leurs facièsfaciès sédimentaires et la localisation des différents fossiles rencontrés. Les successions lithologiques et les limites de dépôt permettent de définir des séquences sédimentaires et d'identifier différents environnements évoluant en fonction du climatclimat et de la tectonique. Le prélèvement de boisbois fossile et d'échantillons de sédiments argileux permettra de préciser l'âge des différents environnements sédimentaires à partir de l'identification de marqueurs bio-stratigraphiques tels que les pollenspollens.

    Membres de l'Expedición Fitzcarrald 2005

    Patrice BabyPatrice Baby (IRDIRD), Pierre-Olivier AntoinePierre-Olivier Antoine (Université Paul Sabatier de Toulouse, France), Rodolfo Salas Gismondi (Musée d'Histoire Naturelle de "Universidad Nacional Mayor de San Marcos"), Mario Urbina (Musée d'Histoire Naturelle de "Universidad Nacional Mayor de San Marcos"), François Pujos (IFEA), Dario De Franceschi (MNHNMNHN, France), Stéphane Brusset (Université Paul Sabatier de Toulouse, France), Nicolas Espurt (Université Paul Sabatier de Toulouse, France), Mouloud Benammi (UNAM, México), Badis Kouidrat (Devanlay Peru SAC), Dennis Uyen (Pluspetrol S.A., Peru)