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Le massif de La Chartreuse est caractérisé par la roche calcairecalcaire. C'est ici, au mont Saint-Martin, que se situe la célèbre meulière des dauphins, découverte en 2002.
Falaise de la carrière de mont Saint-Martin. © Patafisik, CC BY-NC 4.0
La Chartreuse est un massif subalpin allant du Vercors jusqu'au Haut-Giffre, en passant par La Chartreuse, les Bauges, les Bornes pour la partie nord des Alpes. Le relief de La Chartreuse se caractérise, majoritairement, par la roche calcaire : roche sédimentaireroche sédimentaire formée au fond des océans. Une paroi de 400 m peut représenter 10 à 15 millions d'années. Les rochers encore visibles ont sédimenté depuis -140 millions d'années jusqu'à -110 millions d'années.
L’émergence des montagnes au Tertiaire
À partir de 65 millions d'années, la plaque Afrique entre en collision avec la plaque eurasienne. Le climatclimat est tropical. La collision avec l'Afrique fait émerger en Europe les massifs cristallins, Belledonne, le mont Blanc, etc., qui vont percer la couche sédimentaire et rejeter celle-ci vers l'avant dans le sens de la poussée, du SE au NONO dans le milieu de l'arc alpin. Ces roches sédimentaires rejetées vont subir la poussée et former les massifs actuels.
Particularités de La Chartreuse
Par rapport aux autres massifs subalpins, La Chartreuse se caractérise par son relief inversé. Les synclinaux perchés des plateaux sommitaux de La Chartreuse sont caractéristiques du massif. Son caractère fracturé est la deuxième caractéristique importante : failles transversales et nombreuses fractures. Elle a donc parmi les plus grands réseaux karstiques de France.
La meulière des dauphins à mont Saint-Martin
Au temps où les moulins broyaient le grain, les meuniers utilisaient des meules taillées dans des pierres particulières qui provenaient de carrières spécifiques : les meulières. La Chartreuse possédait plus d'une dizaine de carrières dont cinq, industrielles, expédiaient leur production très loin. La carrière se trouve dans un ancien éboulementéboulement gigantesque dont les blocs et les cailloux ont été cimentés par du calcaire dissous, le massif étant très arrosé. Ceci permet d'obtenir une bonne roche à meules : grains de tailles variées, ciment souple, qui permet à la meule de travailler sans se rompre.
Il faut imaginer, il y a 700 ans, un paysage aux arbres rares. Sur les pentes, de gros blocs tombés attiraient les ouvriers venus tailler les meules. La carrière de mont Saint-Martin est étirée sur un km et large de 200 m. Elle occupe le talus, à l'aplomb de la falaise. La meulière des dauphins a été découverte en 2002, grâce à un manuscrit du XIVe qui la mentionnait. Prospections et nombreuses lectures d'archives furent nécessaires pour en retracer l'histoire.
Pierre meulière. © Photo C.König DR
Il fallait deux mois à un artisan pour fabriquer une meule. Il traçait les contours sur la pierre puis creusait autour un fossé circulaire, large de 30 cm environ et profond d'autant, en pics, burins et broches qu'il frappait à coups de marteau. La meule détourée, il la décollait du rocher en ouvrant à sa base des encoches où il glissait des coins de boisbois sec. Mouillés ensuite, ces coins se dilataient et fissuraient la pierre : on pouvait dégager la meule brute.
Meule du mont Saint-Martin. © Photo C. König DR
Le travail de finition, les aplanir, les rendre parfaitement rondes et les doter d'un œilœil, était réalisé par les maîtres meuliers. Extraire des meules pesant une tonne et les descendre en plaine constituait un travail difficile, il ne fallait pas casser les pierres, c'était un véritable exploit.
La carrière de mont Saint-Martin, trésor historique
Cette carrière constitue un précieux monument de l'histoire du travail.
Les recherches concernant cette meulière ont été menées par différents instituts dont le laboratoire de recherche historique Rhône Alpes, le Département des sciences sociales et humaines de l'université Pierre Mendès France de Grenoble ; sous l'égide du conseil général de l'Isère.
Voici ce qui en ressort. En 1327, monsieur de Cornillon achète la part de maître Julien au profit du dauphin Guigues VIII, souverain du dauphiné. À cette époque, le nom du site est : « Les Merlières ». Il se peut que cette exploitation soit beaucoup plus ancienne et possédait sans doute déjà des meulières au temps romains. On peut penser que la meulière abritait diverses constructionsconstructions nécessaires au travail et en particulier une forge très proche. En effet, les outils devaient être réaffûtés chaque jour voire plusieurs fois par jour.
D'autre part vu la pente, les ouvriers devaient aménager de petits replats soutenus par des mursmurs pour pouvoir tailler les pierres dans des conditions optimales.
À noter qu'il fallait payer le dauphin pour avoir le droit d'exploiter. Cette taxe appelée « le cépage » est attestée sur une longue période sauf pendant les années de la pestepeste 1348 -1349, mais l'exploitation reprend tout de suite après l'épidémieépidémie. Ce « cépage » se montait à 1 florin delphinal valant 13 sous et 8 deniers.
Meule. © Photo C. König DR
Les meules de mont Saint-Martin ont pour caractéristiques :
- un diamètre d'environ 1,4 m ;
- une épaisseur de 30 cm ;
- un poids d'environ 400 kgkg pièce et jusqu'à une tonne vu la densité de la roche (env. 2.3).
Il y avait évidemment du déchetdéchet de taille mais aussi bien des meules cassées en cours de travail qui étaient abandonnées sur place dans le talus d'éboulis.
Traces d'outils dans la pierre en place. © Photo C.König DR
Cette exploitation a duré 200 ans au minimum et s'est arrêtée en 1519 semble-t-il puisque le châtelain delphinal mentionne : « pour le cépage des meules, rien reçu ». La carrière devait être en concurrence avec d'autres et peut-être le transport était-il trop difficile ou les blocs de taille épuisés ! On ne connaît pas la raison de l'abandon de cette exploitation.
Fabrication du pain. © BNF
En visitant ce site, on remarque que le sentier est assez raide par endroit et glissant quand il pleut. Il est impressionnant de voir dans quelles conditions les ouvriers devaient travailler, payés à la tache !