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    Krill (Dana 1852) - Euphausiacea

    Le nom générique de krill, d'origine norvégienne, désigne de petites crevettes des eaux froides appartenant à l'ordre des Euphausiacea, ou euphausiacés. L'espèce la plus représentative de la région arctique et du nord de l'Atlantique est Meganyctiphanes norvegica. Le krill est un maillon essentiel du réseau trophique (lien qui uni le prédateur et sa proie dans un écosystème) des océans. Ce terme regroupe plus de 85 espèces dont les adultes vivent en « essaims » dans les couches supérieures des océans, tandis que les œufs et les larves se développent entre 700 et 2.000 mètres de profondeur. Ces essaims forment parfois des bancs gigantesques s'étendant sur près de 450 km², et dont le poids a été estimé à 2 millions de tonnes. Ces essaims migrent en permanence. En journée, ils restent en profondeur pour éviter les prédateurs, et remontent à la surface la nuit. Lorsque l'essaim se sent en danger, il adopte un système de fuite en arrière propre aux crustacés.

    <em>Meganyctiphanes norvegica.</em> © Oystein Paulsen - GNU FDL Version 1.2
     
    Meganyctiphanes norvegica. © Oystein Paulsen - GNU FDL Version 1.2 

    Le krill le plus connu est le krill antarctiqueantarctique, Euphosia superba, qui grouille dans les eaux australes, et dont la répartition est circumpolairecircumpolaire avec des concentrations plus élevées dans le secteur de l'océan Atlantique. Le krill antarctique est l'espèce clé de l'écosystème antarctique car ce crustacé pélagiquepélagique constitue une source importante et essentielle de nourriture pour de nombreux animaux marins à fanonsfanons, tels que les baleines franches ou les rorqualsrorquals, mais aussi pour les calmarscalmars, les manchots, les oiseaux marins, quantité d'autres animaux dont les poissonspoissons, mais surtout les phoques crabiersphoques crabiers dont l'alimentation se compose à près de 98 % d'Euphosia superba. Le krill forme une biomassebiomasse estimée entre 125 et 725 millions de tonnes. Cette impressionnante quantité est rendue possible par la richesse en planctonplancton des eaux australes.

    Phoques crabier. © Jerzystrzelecki - GNU FDL Version 1.2

    Phoques crabier. © Jerzystrzelecki - GNU FDL Version 1.2

    Le krill est plus lourd que l'eau et doit constamment agiter ses pattes pour se maintenir à flot. Il dépense ainsi près de 40 % de son énergieénergie à ne pas couler au fond de l'eau. Il est capable d'émettre de la lumièrelumière par l'intermédiaire d'organes situés près des yeuxyeux, sur les côtés de la deuxième et de la septième patte et un sur les quatre sternumssternums. Ces organes diffusent régulièrement une luminositéluminosité jaune et verte pendant une poignée de secondes. La fonction de ces lumières pourrait jouer un rôle dans le phénomène de reproduction.

    Krill bioluminescent<em>. </em><em>© </em>Uwe Kils - GNU FDL Version 1.2

    Krill bioluminescent© Uwe Kils - GNU FDL Version 1.2

    Reproduction du krill

    La saisonsaison de ponte du krill antarctique s'étend généralement du mois de janvier à mars. Les pontes peuvent avoir lieu autant au-dessus du plateau continentalplateau continental que dans la partie supérieure des eaux océaniques profondes. Lors de la fécondationfécondation, le mâle libère un spermatophore qu'il fixe à proximité de l'ouverture génitale de la femelle. Cette dernière pond entre 6.000 et 10.000 œufs qui sont fertilisés par la semence libérée par le spermatophore. Si l'on s'en réfère à l'hypothèse de Marr extraite des résultats d'une expédition du RRS DiscoveryDiscovery (navire britannique trois-mâts barque lancé le 21 mars 1901 conçu pour la recherche en Antarctique), la gastrulationgastrulation (développement de l'embryonembryon dans l'œuf) s'effectuerait lors de la descente des œufs vers le fond océanique à une profondeur variant de 700 à 2.000 mètres selon que la ponte ait lieu au-dessus de la plateforme océanique ou des grands fonds.

    <em>Euphausia superb</em><em>a.</em> © Uwe Kils - CCA-S A 3.0 Unported license

    Euphausia superba. © Uwe Kils - CCA-S A 3.0 Unported license

    Après l'éclosion des œufs, les larves ou nauplius commencent à migrer vers la surface. Pendant les trois premières semaines, les larves s'alimentent du contenu de leur vitellus et terminent leur ascension. Le développement des larves suit différents stades de développement qui se caractérisent par l'apparition de pattes additionnelles, des yeux et des soies. Le krill muemue tout au long de sa croissance et change son exosqueletteexosquelette de chitinechitine toutes les deux ou trois semaines. Il atteindra sa maturité sexuelle et sa taille adulte vers 2 ou 3 ans.

    Le krill et la pompe biologique

    Comme le krill se nourrit de manière désordonnée, il recrache régulièrement des agrégats de phytoplanctonphytoplancton et produit également des excréments contenant une quantité significative de carbonecarbone. Ces excréments jouent un rôle primordial dans la purification de l'atmosphèreatmosphère car ils permettent l'exportation du carbone vers les fonds marins. Ces matièresmatières fécales denses coulent rapidement dans les abysses. Ce processus de capture et de séquestration du carbone est nommé « pompe biologique ». Les eaux de l'Antarctique atteignant par endroits entre 2.000 et 4.000 mètres de profondeur, le krill permet d'exporter d'énormes quantités de dioxyde de carbone (CO2) fixé par le phytoplancton de la biosphèrebiosphère, et de les séquestrer pour un millier d'années. À l'inverse, il concentre malheureusement les polluants toxiques et les métauxmétaux lourds comme le mercuremercure ou le plombplomb.

    <em>Krill gravide. </em><em>© </em>Langdon Ketin and Robin Ross - <em>Public Library of Science </em>- CCA 2.5 license

    Krill gravide. © Langdon Ketin and Robin Ross - Public Library of Science - CCA 2.5 license

    En effet, les polluants organiques persistants (POPPOP) tels que le DDTDDT, le PCBPCB et les ignifugeants bromés utilisés pour se prémunir des incendies, libérés par les industries européenne, américaines et asiatiques, pénètrent la chaîne alimentairechaîne alimentaire. Ces effets sont particulièrement néfastes aux animaux polaires qui emmagasinent de la graisse pour survivre à l'hiverhiver ou pour effectuer de longues migrations. Le krill est le premier maillon de cette chaîne infectée qui menace non seulement de nombreuses espèces animales, mais également les populations humaines qui s'en nourrissent.

    Selon un rapport de l'ONU, le destin des régions polaires est crucial pour la planète. Elles sont mises en péril non seulement par les modifications climatiques (fontefonte de la banquise), mais la sécurité alimentaire et la santé des peuples indigènesindigènes sont menacées par l'augmentation des produits chimiques toxiques, d'autant que le krill est exploité industriellement en tant qu'aliment pour l'aquacultureaquaculture et complément alimentaire. (Rapport GEO-4 Global Environment Outlook - United Nation Environment Programme - Nairobi - Kenya 25 octobre 2007).

    Le krill, bientôt menacé ?

    Comme dans tout ce qu'il entreprend, l'Homme ne connaît pas la mesure. Il semble bien décidé à vider les océans de tout ce qui y vit... Bien que saturés de POP, et malgré la biomasse phénoménale qu'il représente, le krill est menacé par la surpêchesurpêche pratiquée par les Norvégiens, les Japonais et les Coréens. Selon l'Antarctic Krill Conservation Project, la demande serait plus importante que l'offre. L'hypothèse d'un épuisement des stocks à long terme semble bien réelle. Or, certains experts pensent que la population de krill a déjà diminué de 80 % à cause de la hausse des températures moyennes dans les régions polaires. En effet, la fonte des glaces a pour effet de réduire la salinitésalinité des eaux, ce qui a pour effet de réduire la taille du phytoplancton dont se nourrit le krill.

    Gros plan de la tête d'un krill. © Uwe Kils - GNU FDL Version 1.2

    Gros plan de la tête d'un krill. © Uwe Kils - GNU FDL Version 1.2

    Le krill est devenu un enjeu économique auquel comptent participer également les Russes et les Chinois... Si rien n'est fait pour enrayer cette course au krill, cette ressource risque de connaître le sort du thon rougethon rouge ou d'autres espèces surexploitées. L'AKCP invite donc les États membres de la convention sur la Conservation de la flore marine de l'Antarctique à veiller à ce que l'écosystème marin antarctique soit préservé. Ceux-ci devront envisager la création de zones protégées, exemptes de pêchepêche, afin de permettre aux essaims de krill de se reconstituer.  Bien évidemment les pays membres ne sont pas parmi ceux qui pillent ce patrimoine de l'humanité.

    Détail des pattes d'un krill. © Uwe Kils - GNU FDL Version 1.2

    Détail des pattes d'un krill. © Uwe Kils - GNU FDL Version 1.2

    On l'aura compris, le krill est un élément essentiel à l'équilibre des écosystèmes de notre planète. Sa disparition aurait des conséquences graves sur notre survie et sur celle de nombreuses espèces animales. 

    Champ lexical : euphausia | euphausia superba | meganyctiphanes norvegica