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    La discontinuité de Mohorovičić, communément appelé « Moho », représente l'interface qui sépare la croûtecroûte du manteau terrestre. Il s'agit donc de l'une des principales limites dans la structure interne du globe.

    Le Moho a été dénommé ainsi en l'honneur de son découvreur, le sismologuesismologue croate Andrija Mohorovičić (1857-1936). En 1909, le chercheur observe en effet que les ondes P et S générées lors d'un séisme à Zagreb arrivent en deux salves distinctes. Il identifie ainsi des ondes directes P et S, mais également des ondes qui se réfléchissent sur une interface marquant un changement drastique de la vitessevitesse de propagation des ondes. Ces ondes réfléchies sont appelées PMP et SMSSMS.

    Portrait d'Andrija Mohorovičić. © Davorka Herak et Marijan Herak, Wikimedia Commons, domaine public
    Portrait d'Andrija Mohorovičić. © Davorka Herak et Marijan Herak, Wikimedia Commons, domaine public

    Deux milieux avec des vitesses d’ondes différentes

    En analysant la vitesse de propagation des ondes, il réussit à calculer la profondeur de cette interface, qui se situe à environ 54 kilomètres pour la région de Zagreb. Il définit alors cette limite sismologique comme une transition abrupte entre deux milieux de vitesses différentes : un milieu supérieur dans lequel les ondes P voyagent à une vitesse d'environ 6 km/s, et un milieu inférieur dans lequel elles voyagent à une vitesse bien plus rapide, de 8 km/s.

    Dans la croûte, les ondes P voyagent à une vitesse d'environ 6 km/s, alors que dans le manteau, elles voyagent à 8 km/s. La transition de vitesse a lieu très brusquement, au niveau d'une « discontinuité » sismologique. C'est ainsi qu'a été défini le Moho. © Steven Earle (2016), CC by 4.0
    Dans la croûte, les ondes P voyagent à une vitesse d'environ 6 km/s, alors que dans le manteau, elles voyagent à 8 km/s. La transition de vitesse a lieu très brusquement, au niveau d'une « discontinuité » sismologique. C'est ainsi qu'a été défini le Moho. © Steven Earle (2016), CC by 4.0

    Andrija Mohorovičić vient ainsi de mettre en évidence la transition entre la croûte et le manteau. La croûte est en effet principalement composée de roches felsiques (comme les granites) en ce qui concerne la croûte continentale, et de roche mafiques (comme les gabbros) en ce qui concerne la croûte océanique. Le manteau est quant à lui composé de roches ultra-mafiques que sont les péridotites. Cette différence minéralogique implique que la croûte présente en moyenne une densité de 2,7 à 2,9, ce qui est faible en comparaison de la densité du manteau qui est de 3,3. Or, c'est bien cette différence de densité qui explique que les ondes se propagent plus vite dans le manteau que dans la croûte.

    Moho pétrologique et Moho sismologique

    Certains affleurements géologiques permettent d'observer clairement cette transition pétrologique, sous la forme d'un « paléo-Moho », notamment dans les chaînes de collision, où des pans entiers de croûte et de manteau supérieur ont été arrachés et transportés par les processus tectoniques. De même, les données de sismique réflexion montrent la présence d’un fort réflecteur à la base de la croûte, qui illustre le changement d'impédance sismique entre les deux milieux.

    Il apparaît que le Moho peut être considéré sous deux angles différents : un angle pétrologique et un angle sismologique (ou géophysique). Si Moho pétrologique et Moho sismologique sont souvent concordants, ce n'est toutefois pas toujours le cas.

    Le Moho (pétrologique) est visible sur cette photo en Oman (wadi Bani Kharus) : les roches aux teintes roses représentent les gabbros de la croûte inférieure, les roches sombres à la base sont les péridotites du manteau. Le Moho se trouve donc à l'interface entre les deux unités. © 2016 Pierre Thomas (https://planet-terre.ens-lyon.fr)
    Le Moho (pétrologique) est visible sur cette photo en Oman (wadi Bani Kharus) : les roches aux teintes roses représentent les gabbros de la croûte inférieure, les roches sombres à la base sont les péridotites du manteau. Le Moho se trouve donc à l'interface entre les deux unités. © 2016 Pierre Thomas (https://planet-terre.ens-lyon.fr)

    Le Moho pétrologique représente en effet la limite existante entre la croûte continentale (ou océanique) et le manteau, en matièrematière de composition minéralogique. Le Moho sismologique indique quant à lui le passage dans un milieu possédant une vitesse de 8 km/s. Or, cette augmentation de la vitesse n'est pas nécessairement associée au passage d'une croûte felsique/mafique à un manteau ultra-mafique. L'hydratationhydratation des roches du manteau (processus de serpentinisation) peut en effet modifier la vitesse de propagation des ondes et mener à l'établissement d'un Moho sismologique, mais pas pétrologique dans le sens original du terme.

    Une croûte qui n’en est pas vraiment une et un Moho pétrologique absent

    Ce cas s'observe notamment dans le domaine océanique, lorsque la croûte mafique « classique » est absente et remplacée par du manteau exhumé par des processus tectoniques. Dans ce cas, le Moho pétrologique est absent, puisqu'il n'y a pas de croûte mafique comme définit par la conférence de Penrose en 1972. Les roches du manteau, des péridotites, se trouvent directement en surface. Elles sont cependant altérées par le contact avec l'eau de mer, ce qui provoque une modification minéralogique et abaisse la vitesse de propagation des ondes. Ainsi, d'un point de vue sismologique, on observe bien une « croûte » qui présente en surface des vitesses de propagation des ondes allant d'environ 6,5 à 7 km/s, soit des valeurs similaires à celles de la croûte mafique. Plus on descend en profondeur, plus le degré d’altération s’amenuise, jusqu'à se que l'on retrouve des péridotites fraîches possédant une vitesse de propagation de 8 km/s. Dans ce cas, le Moho géophysique correspond donc à un front de serpentinisation, qui sépare des péridotites altérées des péridotites fraîches.

    Le Moho sismologique, dans le cas du manteau exhumé, ne sera alors principalement visible que sur les données de sismique réfractionréfraction, qui illustrent en coupe l'évolution de la vitesse des ondes. Les données de réflexion sismique ne feront pas ou peu apparaître un réflecteur au niveau du front de serpentinisation car le changement d'impédance acoustique est trop graduel.

    Champ lexical : discontinuité de Mohorovicic | moho