Récolte de neige marine. © NOAA

Récolte de neige marine. © NOAA

Si la neige marine convoque dans l'esprit le tableau étrange et poétique de flocons de neige tourbillonnant sous l'eau, ce terme désigne en réalité un processus naturel essentiel à la préservation des organismes marins. Observée pour la première fois dans les années 1950 grâce aux projecteurs des sous-marins, la neige marine se compose de particules biogéniques et minérales qui s'assemblent pour former des agrégats flottant dans une colonne d'eau. Ces agrégats - ou flocons - jouent un rôle crucial dans l'écosystème marin et le cycle du carbone global.

La neige marine se forme principalement à partir de la matière organique produite par le phytoplancton, de petites plantes flottantes qui réalisent la photosynthèse à la surface des océans. Lorsque ces organismes meurent ou sont consommés par le zooplancton, des fragments de matière organique et des excréments de zooplancton se combinent pour créer des agrégats plus gros. Les turbulences de surface aident ces particules microscopiques à se rassembler pour former des « flocons » visibles à l'œil nu, d'une taille allant de 100 microns à 2 mm.

Le frigo des océans

Ces flocons de neige marine peuvent contenir des résidus de coquilles, du sable et d'autres débris minéraux, formant un mélange hétérogène. Leur composition variée en font des habitats temporaires pour une multitude d'organismes marins, y compris les bactéries et les protozoaires en quête de nourriture, qui colonisent ces particules.

La neige marine est une source de nourriture essentielle pour de nombreux organismes marins. Les flocons nourrissent les crustacés et les poissons à toutes les profondeurs, contribuant à la richesse de la biodiversité océanique. Les flocons descendent lentement vers le fond marin, formant une « pluie » continue de matière organique. Le zooplancton et les mollusques planctoniques, tels que les ptéropodes, sont capables de détecter et de capturer ces flocons grâce à des antennes sensibles ou des pièges à mucus.

La neige marine ne se contente pas de tomber passivement. Les courants marins peuvent la concentrer en rideaux de plusieurs kilomètres, influençant sa distribution et son dépôt au fond de l'océan. La vitesse de chute des flocons varie selon leur taille et leur densité, ce qui affecte le temps nécessaire pour qu'ils atteignent les grandes profondeurs.

© tonaquatic, Adobe Stock
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Un phénomène essentiel pour les écosystèmes

La neige marine joue un rôle crucial dans le cycle du carbone océanique. En transportant la matière organique des couches supérieures de l'océan vers les profondeurs, elle contribue à la pompe biologique de carbone. Ce processus aide à séquestrer le CO2 atmosphérique (jusqu'à 15 Gigatonnes par an !), le stockant à long terme dans les sédiments marins. Les dépôts de neige marine, sur des périodes géologiques, peuvent conduire à la formation d'hydrocarbures comme le pétrole et le gaz naturel.

Comprendre les mécanismes de formation et de transformation de la neige marine est essentiel pour améliorer les modèles climatiques. Ces modèles prennent en compte la capacité des océans à absorber et à séquestrer le carbone, un élément crucial pour prévoir l'évolution du climat mondial. Les développements technologiques - robots sous-marins et capteurs sophistiqués - permettent aujourd'hui aux scientifiques d'observer ces processus en temps réel et de mieux comprendre les dynamiques océaniques.

La neige marine, bien que peu connue du grand public, est un phénomène vital pour la santé des écosystèmes océaniques et la régulation du climat terrestre. Sa capacité à nourrir les organismes marins et à stocker le carbone en fait un acteur clé dans le maintien de l'équilibre écologique des océans.