Depuis peu, l'historien américain Stephen Pyne et la philosophe française Joëlle Zask popularisent un nouveau concept : le pyrocène. L'ère du feu. Avec laquelle nous devrions désormais cohabiter. Mais de quoi s'agit-il ?

La plus ancienne trace de feu contrôlé par le genre Homo remonte à 790.000 ans. Cette domestication du feu serait une des raisons de l'accroissement du cerveau humain, et du rétrécissement de notre tube digestif. Elle marque le début d'une longue suite d'innovations, qui ont hissé notre espèce jusqu'à l'Anthropocène. L'ère de l'humain. Selon l'historien du feu Stephen Pyne et la philosophe Joëlle Zask, l'Anthropocène est désormais accompagnée du Pyrocène. L'ère du feu. Et la première aurait déclenché la seconde.

« Le point d'inflexion critique des temps modernes s'est produit lorsque nous avons commencé à faire brûler la biomasse fossilisée plutôt que la vivante » propose Stephen Pyne, dont les propos ont été traduits par The Conversation. Il témoigne qu'à mesure que progressait la maîtrise des incendies, leur nombre « a décliné au point où le feu ne pouvait plus accomplir son travail écologique ». Tandis que la société faisait « fi des feux latents dans les environnements vivants ».

Aujourd'hui, l'historien constate que « le feu est à la fois l'élément moteur et sa propre manifestation ». Au cœur d'une ère fragilisée par ses flammes. Il explique que si l'on « additionne les conséquences directes et indirectes - les endroits qui brûlent, les endroits qui ont besoin de brûler, les impacts périphériques [...], les effets omniprésents des changements climatiques [...], les bouleversements sur la vie des humains et de leur habitat, on se retrouve avec une pryogéographie qui ressemble étrangement à l'ère glaciaire, mais pour le feu ».

Vers une cohabitation avec les méga feux ?

Quant à Joëlle Zask, elle observait dans une interview pour Reporterre que « le feu est responsable d'une accélération du réchauffement climatique ». Puisque les méga feux, « des voisins infréquentables », émergent sur tous les continents. Amplifiés par le réchauffement climatique, ils l'aggraveraient à leur tour dans un cercle vicieux.

D'une part, car la fumée de ces méga feux peut déposer des particules sur les glaciers environnants. Ce qui les teinte d'un marron terne diminuant leur albédo, et donc accélérant potentiellement leur fonte. D'autre part, car ces gigantesques flammes provoquent des pyrocumulonimbus. Des nuages formés sous l'effet de la chaleur du feu et de l'évaporation des plantes brûlées. Ces pyrocumulonimbus sont chargés de particules de fumée et de suie. Ils induisent des orages dont les éclairs créent de nouveaux incendies.

Face à cela, Joëlle Zask prône « une sorte de coopération et de partenariat » qui développerait « un modèle de soin de la forêt où cette dernière ne serait pas uniquement vue sous l'angle de l'extractivisme ». Où l'humain deviendrait « l'auxiliaire de la nature ». Actuellement, elle déplore la plantation de forêts « industrielles », composées d'une seule espèce d'arbre