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Comme un quart des mammifères, cette espèce de chauve-souris africaine encore non identifiée est menacée par la disparition de son habitat. © bayanga85, Flickr, CC by-sa 2.0
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Depuis plusieurs années, les biologistes s'alarment face à la disparition des espèces animales et végétales de plus en plus rapide. Une nouvelle étude basée sur un long travail de recherche fait le bilan de la situation actuelle et des efforts de protection de la biodiversité.
En plus d'un travail de synthèse des données existantes, l'équipe internationale de chercheurs a effectué un énorme effort de collecte d'information et de recensement d’espèces sur le terrain. Quatre cent vingt appareils photo à déclenchement automatique, disposés dans les forêts protégées de sept pays tropicaux sur trois continents, ont permis de récolter 52.000 clichés d'animaux de toute taille en deux ans de recherche. Plusieurs publications issues de ce travail sont parues ou à paraître dans les Philosophical Transactions of the Royal Society B.
Des efforts entrepris mais un bilan encore alarmant
Un constat : la pressionpression croissante des activités humaines sur l'environnement dépasse de loin les efforts de protection entrepris. La perte de biodiversité s’accélère, les menaces principales étant l'extension des terres agricoles et la déforestation qui détruisent l'habitat naturel des animaux, ainsi que les prélèvements trop importants (chasse) et l'introduction d'espèces invasives.
Exemple des clichés réalisés par des appareils photo à déclenchement automatique, la photo de ce tapir (Tapirus sp.) en vadrouille nocturne dans une forêt du Panama. © Smithsonian Wild, Flickr, CC by-nc-sa 2.0
Centrée sur les mammifères, l'étude montre qu'un quart des 5.339 espèces recensées est menacé de disparition. Pourtant, ils constituent le groupe le mieux protégé grâce à plusieurs espèces emblématiques dont la disparition touche le public. Parmi eux, les animaux insectivores comme les tatous, les fourmiliersfourmiliers, ou certains primatesprimates sont les plus menacés.
Les biologistes mettent également l'accent sur le problème de la fragmentation des espaces naturels. C'est la taille de la zone préservée qui semble faire sa richesse. Par exemple, plus la forêt est étendue, plus elle abrite un grand nombre d'espèces, dont celles de grande taille. Les écosystèmesécosystèmes sont plus forts, plus interconnectés et le risque d'extinction s'en trouve largement réduit.
Plus généralement enfin, le collectif de chercheurs met en évidence les lacunes des efforts actuels de protection de la biodiversité. Les mesures mises en place sont loin d'être inutiles. Sans elles, la dégradation serait bien plus avancée et rapide. Mais parce qu'un animal (comme le panda) va être plus « aimé » par le public qu'un autre, la répartition des efforts n'est pas rationnelle. Cela conduit à de graves manques et à des doublons alors que le peu de moyens disponibles devrait inciter à l'optimisation de leur utilisation dans des zones prioritaires. C'est l'idée des points chaudspoints chauds de biodiversitébiodiversité, émise par Norman Myers : agir là où l'argentargent récolté aura le plus grand et le meilleur impact.
En 2010 déjà, la conférence de l'Onu sur la biodiversité, à Nagoya, tirait un bilan et fixait des objectifs pour freiner la disparition des espèces. © Idé
Face à l’urgence, un changement de stratégie est nécessaire
Loin d'être uniquement critique, l'étude apporte aussi plusieurs solutions. Carlo Rondinini et Luigi Boitani de l'université Sapienza de Rome, et Ana Rodrigues du Centre d'écologie fonctionnelle et évolutive de Montpellier, coauteurs du bilan, définissent les principaux axes de travail pour mettre en place une conservation vraiment efficace.
Le monde de la recherche doit améliorer la connaissance des milieux, des espèces et de ce qui les menace. Ainsi pourront être déterminés les zones prioritaires, les actions les plus efficaces et de bons indicateurs permettant de suivre l'évolution de la situation. Pour être utiles, ces données devraient ensuite remonter à un responsable, une institution internationale qui organiserait et rationnaliserait les efforts de conservation au niveau mondial. Il serait alors possible de définir des objectifs chiffrés, adaptés à la réalité du terrain, qui assureraient de façon pérenne la survie des espèces.
Lors des campagnes d'identification d'espèces sur le terrain, comme ici lors de l'expédition Shanga 2010 en République centrafricaine, les naturalistes recueillent des milliers d'échantillons de plantes ou d'insectes. Pour les mammifères, le recours à la photo est plus approprié... © bayanga85, Flickr, CC by-sa 2.0
Bien sûr, une organisation mondiale de la préservation de la biodiversité n'est possible qu'en prenant en compte le contexte et l'intérêt des populations locales. Elles ne doivent pas souffrir mais au contraire bénéficier des mesures de protection dont elles sont les relais, les acteurs sur le terrain. Aux yeuxyeux des chercheurs, ces points sont les clés d'une stratégie globale de protection des écosystèmes, seule solution capable d'enrayer la perte de biodiversité.
Et chez nous ?
En France, des initiatives en ce sens sont déjà en œuvre. Le programme d'expéditions « La planète revisitée », coordonné par OlivierOlivier Pascal et l'association Pro-Natura International, tente de recenser un maximum d'espèces avant leur disparition en envoyant des brigades de naturalistes explorer ces fameux « points chauds », partout dans le monde.
La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRBFRB) finance de nombreux projets de recherche. Au niveau institutionnel enfin, la stratégie nationale pour la biodiversité 2011 - 2020, lancée au printemps est censée proposer pour chaque secteur d'activité un modèle de développement prenant en compte dès le départ la préservation de la richesse des écosystèmes naturels.
Enrayer la disparition rapide des espèces sauvages semble donc être une préoccupation qui commence à être prise au sérieux par les dirigeants. Reste à savoir si le passage à la vitessevitesse supérieure préconisé par les spécialistes se fera à temps pour limiter l'ampleur de ce qui est d'ores et déjà considéré comme la sixième extinction de masse.