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Les éléphants font de nombreux bruits audibles par l'Homme (dont les limites de l'audition vont de 20 à 20.000 HzHz). Le barrissement correspond certainement au plus célèbre d'entre d'eux. Mais les pachydermes peuvent aussi glousser lorsqu'ils se touchent ou gronder quand ils sont irrités. Plus surprenant : on sait depuis le début des années 1980 que les éléphants sont également capables d'entendre et d'émettre des infrasons (moins de 20 Hz) que nos oreilles ne perçoivent pas. L'avantage est évident, ces animaux intelligents peuvent communiquer entre eux, discrètement, jusqu'à plus de 10 km de distance.
Une certitude : ces sons viennent du larynxlarynx. En revanche, les mécanismes impliqués restent un mystère. Il est en effet difficile de demander à un éléphant vivant de parler avec la bouche ouverte et un endoscopeendoscope dans la gorge ! Les infrasons pourraient être émis par des contractions régulières des muscles de l'organe vocal, comme chez les chats qui ronronnent, impliquant alors un contrôle des vocalises par le système nerveux et donc le cerveaucerveau (mécanisme AMC pour active muscular contraction). Autre hypothèse : les infrasons pourraient simplement être générés par des vibrationsvibrations des cordes vocales au passage du flux d'airair expiré (mécanisme myoelastic-aerodynamic ou MEAD), à l'image de l'Homme lorsqu'il s'exprime. Dans ce cas, aucun contrôle du système nerveux n'est donc requis, hormis pour faire respirer l'animal.
Christian Herbst de l'University of Vienna vient de percer une partie du secret de la production des infrasons chez les pachydermes. Ses résultats sont présentés dans la revue Science. Il a produit des sons de basses fréquences en recréant un système respiratoire connecté à un larynx, extrait du cadavre d'un éléphant d'Afrique.
Des infrasons ont été accélérés pour être audibles dans la vidéo. Les vocalisations ont été émises par un groupe d'éléphants d'Afrique. Cet enregistrement a été réalisé à l'Addo Elephant National Park en Afrique du Sud. © 2012 Department of Cognitive Biology, University of Vienna
Éléphants et infrasons : mode d’emploi
Le larynx a été prélevé sur un éléphant Loxodonta africana mort naturellement en 2010, au zoo de Berlin. Cet organe a ensuite été connecté à un pseudopoumon, lui-même alimenté en gazgaz par une bouteille d'air comprimé. Le flux d'air et la pressionpression ont été régulés afin de recréer des conditions réelles d'expiration par un système de vannes. Pour gérer le taux d'hygrométrie de l'air expiré, le scientifique a utilisé un humidificateurhumidificateur. Enfin, les deux replis membraneux constituant les cordes vocalescordes vocales ont été filmés par une caméra à haute vitessevitesse, lors du passage du flux d'air sortant rythmiquement du pseudopoumon.
Des sons ont bel et bien été émis et enregistrés au passage de l'air lorsque la pression, à l'intérieur du larynx, était supérieure à 17 mbar. Ils ont ensuite été comparés à une base de donnéesbase de données de 470 échantillons récoltés au cours de ces 4 dernières années. Une correspondance a été établie avec des enregistrements d'appels de basses fréquences produits par des individus sauvages. Le mécanisme MEAD permettrait donc aux pachydermes de réaliser, à eux seuls, les infrasons aux motifs irréguliers, chose normale pour ce procédé.
Cependant, il n'est pas possible d'exclure une éventuelle utilisation de l'AMC, qui permet d'émettre des sons d'une seule fréquence au motif toujours régulier, à l'heure d'aujourd'hui. En effet, aucun élément pouvant provoquer la contraction des muscles du larynx n'a été utilisé pour tester ce mécanisme durant les expériences.