Saviez-vous que les lointains ancêtres des baleines possédaient quatre pattes et qu'ils n'étaient pas beaucoup plus gros qu'un loup ? Si l'on suit l’histoire de leur lignée, on observe une augmentation de la taille à mesure que ces animaux deviennent de plus en plus adaptés au milieu marin. Enfin, c’était sans compter cette nouvelle espèce miniature !


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    Les cétacés ont une histoire évolutive parsemée de formes toutes plus étonnantes les unes que les autres. Les basilosauridés sont les premiers archéocètes (« baleines anciennes ») à avoir adopté un mode de vie totalement aquatique. Quelques jours après la parution de l'étude qui révélait le plus grand d'entre eux, et peut-être le plus gros animal qui ait jamais vécu, ce fut au tour du plus petit basilosauridé d'être décrit dans une étude parue dans la revue Communications Biology.

    Le tout premier spécimen décrit de <em>Tutcetus</em> <em>rayanensis</em>, l'holotype, est contenu dans ce bloc (a). Le dessin (b) aide à distinguer les différents éléments. En bas à gauche, la canine C1 et la prémolaire P2 sont en train d'émerger de la mandibule droite, P2 pousse même la dent déciduale dP2 vers la sortie. © Antar <em>et al</em>. (2023)
    Le tout premier spécimen décrit de Tutcetus rayanensis, l'holotype, est contenu dans ce bloc (a). Le dessin (b) aide à distinguer les différents éléments. En bas à gauche, la canine C1 et la prémolaire P2 sont en train d'émerger de la mandibule droite, P2 pousse même la dent déciduale dP2 vers la sortie. © Antar et al. (2023)

    Pourquoi cette baleine préhistorique est-elle si petite ? 

    Avec ses 2,5 mètres de long pour moins de 200 kilogrammeskilogrammes, Tutcetus rayanensis n'est pas le plus impressionnant des basilosauridés, mais il apporte de nombreuses informations sur les premiers succès de l'iconique groupe qui a fini par supplanter les autres cétacés anciens. Le fossile qui a permis de décrire cette nouvelle espèce a été trouvé dans la dépression du Fayoum en Égypte, datée de l'Éocène moyen, à environ 41 millions d'années. Il est constitué d'un crânecrâne incomplet qui a conservé sa mandibulemandibule (mâchoire inférieure), d'une partie de l'appareil hyoïdien et de l'atlas, la première vertèbre cervicalevertèbre cervicale

    Le nom générique de Tutcetus vient en partie du pharaon égyptien Toutânkhamon, qui est décédé jeune à environ 18 ans. Comme lui, l'individu retrouvé serait un jeune, un « subadulte », à en juger par l'état avancé de la fusionfusion de ses os, associé à la présence de quelques dents déciduales (dents de laitdents de lait). Le développement rapide des dents semble indiquer que l'espèce atteignait précocement la maturité, et avait une espérance de vieespérance de vie plus limitée que d'autres basilosauridés plus grands et plus récents.

    Ce graphique, comportant la masse en ordonnées et l'âge des fossiles en abscisses, montre la tendance générale des archéocètes à augmenter de taille avec le temps. Toutes les silhouettes bleues appartiennent à des basilosauridés. <em>T. rayanensis</em> (en bleu foncé) se distingue par sa petite taille. © Antar <em>et al</em>. (2023)
    Ce graphique, comportant la masse en ordonnées et l'âge des fossiles en abscisses, montre la tendance générale des archéocètes à augmenter de taille avec le temps. Toutes les silhouettes bleues appartiennent à des basilosauridés. T. rayanensis (en bleu foncé) se distingue par sa petite taille. © Antar et al. (2023)

    Concernant la petite taille de TT. rayanensis, elle pourrait être un caractère ancestralcaractère ancestral conservé, puisque les cétacés plus anciens étaient relativement petits. Elle pourrait aussi être une adaptation à un réchauffement des températures survenu entre -48 et -41 millions d'années, car les animaux ont tendance à rapetisser lorsque les températures augmentent, en particulier s'ils sont aquatiques. Les auteurs privilégient cette seconde option car le rythme de vie rapide, tout comme la petite taille, est associé à des températures plus élevées.

    Ils avancent également que la forme du corps (et non pas sa taille) apporte de précieuses informations sur l'intensité de la compétition pour les ressources : un cétacé au corps allongé et hydrodynamique, comme T. rayanensis, serait un nageur efficace et avantagé dans un environnement pauvre en ressources. Ils proposent donc de considérer la taille ainsi que la forme du corps dans les analyses qui visent à reconstruire la niche écologique des cétacés fossiles et étudier l'impact du changement climatiquechangement climatique sur les cétacés actuels.