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Haroun Tazieff, Katia et Maurice Krafft ne sont plus parmi nous mais la volcanologie continue de progresser avec l'espoir de pouvoir prédire suffisamment à l'avance de grandes éruptions volcaniques. La difficulté est que - heureusement -, nous manquons d'expérience en la matièrematière.
Il y a respectivement 640.000 et 39.000 ans survenaient de gigantesques éruptions caldériques à Yellowstone (États-Unis) et dans les Campei Flegrei (Italie, près de Naples). S'il s'en produisait une semblable, les conséquences seraient dramatiques. De telles éruptions, durant lesquelles plusieurs dizaines à plusieurs centaines de kilomètres cubes de matériaux sont brutalement éjectés en quelques heures ou quelques jours, sont heureusement rares mais nous ne savons pas quels sont leurs signes précurseurs.
Il y a environ 3.600 ans, pendant l'âge du bronzeâge du bronze, à Santorin, en Méditerranée, l'humanité a assisté à l'une de ces éruptions caldériques. Ce genre de phénomène s'accompagne de la vidange de la chambre magmatique ce qui pour un édifice volcanique comme un supervolcan fait qu'il s'effondre alors en formant une caldeiracaldeira. Dans le cas de l'éruption de l'île de Santorin, seulement 40 à 60 km3 de magma ont été émis. Des chiffres modestes en comparaison des volumesvolumes de matière éjectés par les éruptions géantes de Yellowstone et des champs Phlégréens. Les estimations sont respectivement d'au moins 1.000 km3 et de 80 à 150 km3...
Une vue de la caldeira de Santorin du haut du nouveau volcan Nea Kamini dont la dernière éruption de lave date de 1950. © Wikipédia
Toutefois, beaucoup pensent que l'événement a fortement perturbé la civilisation minoenne alors florissante en Crête et sur Santorin. Comme l'explique un des documentaires des expéditions Cousteau, les tremblements de terre et surtout le tsunami destructeur qui ont accompagné cet événement n'ont pas pu ne pas laisser des traces matérielles et psychologiques importantes sur les populations de ces îles. Certains y voient même l'origine du mythe de l'Atlantide.
L'éruption de Santorin est donc un bon sujet d'étude si l'on veut tenter de comprendre ce qui s'est passé et d'en tirer des enseignements. On pourrait ainsi découvrir quels sont les signes précurseurs des éruptions formant des caldeiras, ce dont nous sommes toujours incapables.
Une chronologie du réveil des volcans enregistrée dans les ponces
Des volcanologuesvolcanologues viennent justement de publier dans Nature un article dans lequel ils annoncent avoir précisé le temps mis par le volcan de Santorin pour se réveiller. Tim Druitt, du laboratoire Magmas et volcans (université Blaise PascalBlaise Pascal, Clermont-Ferrand) et des collègues de Singapour, Nancy, Orléans et Genève se sont intéressés pour cela à des cristaux de feldspath, des plagioclases plus précisément, présents dans les ponces.
L'idée est particulièrement ingénieuse, comme l'explique Gareth Fabbro. On sait que des cristaux croissent dans les chambres magmatiques d'un volcan. Lorsqu'un nouveau magma de composition différente vient s'y mélanger, les anciens cristaux continuent de se développer mais à partir du nouveau magma. Les cristaux nouvellement formés se retrouvent en déséquilibre chimique et certains éléments tentent de migrer par diffusiondiffusion d'une partie du cristal à l'autre. Ce processus de diffusion se fait selon une échelle de temps connue.
Dans le cas présent, les chercheurs ont mesuré le taux de diffusion et de rééquilibrage du magnésiummagnésium, du strontiumstrontium et du titanetitane présent en très faibles quantités dans les plagioclases. Ils ont alors découvert que la plupart des cristaux n'avaient subi un tel processus de rééquilibrage qu'en moins de 100 ans, alors que la précédente éruption de Santorin s'était produite 18.000 ans avant celle d'il y a 3.600 ans.
Cette découverte était inattendue, car on pensait que la pressionpression magmatique montait lentement dans la chambre magmatique. Elle est aussi inquiétante car elle implique, si on la généralise aux supervolcans, qu'ils peuvent se réveiller très rapidement. Mais elle a un côté positif. En effet, si ce réveil est rapide, l'intensité de signaux précurseurs, qui restent à définir pour espérer faire des prévisions, est probablement assez forte et donc facile à mesurer.