Les épisodes glaciaires extrêmes, appelés Terre boule de neige, ont marqué l’histoire du climat terrestre. Pourtant, les mécanismes derrière ces glaciations restent encore mal compris. Une nouvelle étude révèle cependant pourquoi et comment ils auraient pris fin.


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    Si le climat a globalement été tempéré voire plutôt chaud dans l'ensemble de l'histoire de la planète, il est cependant marqué par quelques épisodes glaciaires exceptionnels durant lesquels la Terre a été (quasiment) totalement recouverte d'une épaisse couche de glace. On appelle ces événements les épisodes de « Terre boule de neige ». Il ne s'agit pas d'événements anecdotiques, loin de là.

    Chacun a en effet duré plusieurs dizaines de millions d'années. Ils sont d'ailleurs supposés avoir joué un rôle majeur dans l'évolution du vivant. Rappelons que ces épisodes se sont produits durant le Protérozoïque (2,5 milliards d'années à 542 millions d'années), une période durant laquelle les organismes vont évoluer lentement, jusqu'à l'explosion du Cambrien qui suit la dernière glaciationglaciation globale, la glaciation marinoenne (650-635 millions d'années).

    Plusieurs épisodes de Terre boule de neige ont jalonné l'histoire climatique terrestre. © Nasa
    Plusieurs épisodes de Terre boule de neige ont jalonné l'histoire climatique terrestre. © Nasa

    Des glaciations extrêmes qui se terminent très brutalement

    Si les conditions qui régnaient alors sur Terre durant ces événements extrêmes sont d'un intérêt majeur pour la science, la nature de leur terminaison et de la transition vers des périodes plus chaudes l'est tout autant. Ces derniers points restent d'ailleurs encore très peu documentés. Il est en effet intéressant de noter que chaque épisode de Terre boule de neige a été suivi par un réchauffement dramatique du climat.

    Pour étudier les mécanismes climatiques liés à ces changements brutaux, des chercheurs se sont intéressés à des roches calcaires appelées « couvertures carbonatées ». Il s'agit de niveaux caractéristiques qui se sont formés lors de la fontefonte de la couche de glace et qui témoignent donc de ces transitions climatiques majeures. Ils recouvrent directement les dépôts glaciaires des épisodes Terre boule de neige.

    Ces sédiments carbonatés sont caractéristiques car ils recouvrent directement les dépôts glaciaires des épisodes de Terre boule de neige. © Yarong Liu
    Ces sédiments carbonatés sont caractéristiques car ils recouvrent directement les dépôts glaciaires des épisodes de Terre boule de neige. © Yarong Liu

    Des sédiments sensibles aux conditions environnementales

    Les scientifiques de l'université de Washington ont ainsi observé de près la couche de carbonates datant de 640 millions d'années, marquant la fin de la glaciation marinoenne. L'avantage des carbonates, c'est qu'ils sont très sensibles aux conditions chimiques de l'atmosphèreatmosphère et des océans. Leur apparition soudaine dans les registres sédimentaires à la fin de l'épisode glaciaire est donc un marqueur fort d'un changement environnemental dramatique.

    Durant le pic de glaciation, la couverture de glace recouvrant l'ensemble de la Terre reflète la lumièrelumière du SoleilSoleil, un processus qui participe au maintien d'un climat froid. Les chercheurs expliquent l'absence de sédimentssédiments carbonatés à cette époque par le fait que l'atmosphère était alors riche en CO2. Les quelques régions océaniques libres de glace qui devaient exister auraient ainsi permis l’acidification de l’eau de mer via les échanges avec l'atmosphère. Cette eau acideacide aurait eu tendance à empêcher le dépôt de sédiments carbonatés malgré la présence d'un niveau alcalin riche en calciumcalcium, résultat de l'altération à basse température du fond océanique.

    Le rôle de l’altération des roches continentales

    Mais on sait à quel point les interactions entre l'atmosphère et les roches sont cruciales dans la régulation du cycle du carbonecycle du carbone, via les processus d’altération qui captent le carbone atmosphérique. La surface terrestre étant recouverte de glace, ce cycle aurait été bloqué, entraînant une hausse du CO2 délivré dans l'atmosphère par les volcansvolcans.

    À un moment, ce taux aurait permis d'embrayer un effet de serreeffet de serre surpassant l'effet d'albédoalbédo de la glace. Les températures se seraient alors mises à monter, faisant fondre la croûtecroûte gelée encerclant la Terre et permettant la reprise des processus d'altération continentale et donc d'un cycle du carbone. Les conditions océaniques permettent alors aux sédiments carbonatés de se déposer durant cette phase de déglaciation. Alors que l'effet d'albédo diminue, le taux de CO2 reste toutefois très haut dans l'atmosphère, ce qui entraîne alors un réchauffement très rapide du climat. Il faudra un certain temps pour que les processus d'altération, via la capture du carbone atmosphérique et son enfouissement dans les sédiments des fonds marins, ne régulent l'état climatique.

    Ces résultats ont été publiés dans la revue Nature Communications. De futures recherches devraient permettre de mieux comprendre comment la vie a pu survivre dans ce tumulte climatique et notamment évoluer vers des formes plus complexes.