Si la vie a repris ses droits dans la zone contaminée de la centrale de Tchernobyl, animaux et plantes restent sévèrement marqués génétiquement par une exposition continue aux radiations radioactives... sauf de minuscules vers, qui semblent posséder une incroyable capacité de résilience  !

Les organismes vivants ont depuis longtemps prouvé leur résistance à des environnements variés, parfois extrêmes, et leur incroyable adaptabilité. Mais il y a une chose que nous avons du mal à supporter : ce sont les radiations radioactives. Mortelles à fortes doses, elles altèrent et endommagent l’ADN lors d’expositions à des taux plus faibles, induisant de multiples mutations. Un effet confirmé par le tragique accident de Tchernobyl. En près de 40 ans, les scientifiques ont en effet pu observer comment une exposition continue aux radiations influence le génome des animaux et des plantes vivant dans la zone d'exclusion, où la radioactivité dépasse largement, aujourd'hui et encore pour plusieurs centaines voire milliers d'années, les taux naturels.

Ni animal, ni plante, ni champignon, le blob est l'une des plus étranges créatures du règne animal. Et ses capacités de résistances aux conditions les plus extrêmes sont hallucinantes ! © Futura

Des petits vers à l’incroyable capacité de résilience

Si la biodiversité dans la zone d'exclusion a fortement augmenté ces dernières années, montrant les capacités d'adaptation de certaines espèces, toutes les formes de vie résidant à proximité de la centrale montrent des mutations génétiques. Ou presque.

Des scientifiques ont en effet découvert de minuscules vers dont le génome ne semble avoir été altéré en aucune manière par la radioactivité. Ces vers - que l'on appelle des nématodes et qui parasitent souvent animaux et végétaux - possèdent, certes, un bagage génétique bien moins complexe que le nôtre ou que celui d'autres animaux. Leur cycle de vie est également extrêmement rapide, ce qui en fait des organismes particulièrement intéressants à étudier pour comprendre la résilience des organismes face aux radiations nocives. Plusieurs douzaines de générations de nématodes peuvent ainsi se succéder au cours de la vie d'un chien, par exemple.

Nématodes collectés dans la zone d'exclusion de Tchernobyl. © Sophia Tintori
Nématodes collectés dans la zone d'exclusion de Tchernobyl. © Sophia Tintori

Une capacité de réparation de l’ADN

Des scientifiques ukrainiens et américains se sont donc rendus dans la zone d'exclusion pour réaliser des prélèvements de sol, de fruits et de végétaux, dans lesquels les petits vers ont été collectés. Et le séquençage de leur génome a révélé une étonnante surprise : les scientifiques n'ont trouvé aucun dommage lié aux radiations ! Il leur aurait été impossible de différencier les vers provenant de Tchernobyl de vers issus d'autres régions du monde.

La chercheuse de l'université de New York Sophia Tintori réalise des échantillonnages dans la zone d'exclusion de Tchernobyl. © Matthew Rockman
La chercheuse de l'université de New York Sophia Tintori réalise des échantillonnages dans la zone d'exclusion de Tchernobyl. © Matthew Rockman

Cette absence de signature dans le génome des nématodes de Tchernobyl serait liée à une formidable capacité de résilience de ces petits organismes, leur permettant de réparer leur ADN au fil des générations. Ces résultats, publiés dans la revue PNAS, pourraient s'avérer précieux pour la recherche sur le cancer.