Il y a 4 milliards d’années, la vie apparaît comme un monde mort et hostile. Pourtant, tout au fond des océans se jouent des réactions chimiques qui vont permettre la formation des premières briques de base du vivant.
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Après avoir brossé le portrait de la Terre primitive dans le premier épisode des « Origines mystérieuses de la vie sur Terre », découvrons désormais ce qui se passe dans les profondeurs de cet océan gigantesque. Pour cela, il faut plonger. Profond. Là où la lumièrelumière ne pénètre jamais.
Car c'est dans le noir absolu, loin de l'agitation des vagues et des interactions avec l'atmosphère que sont en train de se produire les réactions chimiquesréactions chimiques qui vont donner naissance aux tout premiers organismes vivants.
Les sources hydrothermales, ouvertures sur un autre monde
Là, vers trois à cinq kilomètres de profondeur, se dressent d'étonnantes constructionsconstructions minérales. Surgissant dans la nuit éternelle, ces cheminées tortueuses s’élevant parfois sur plusieurs dizaines de mètres de haut crachent un fluide chaud, qui trouble la limpidité des eaux. Par ces évents infernaux, la Terre évacue sa chaleurchaleur interne. L'eau qui s'infiltre dans la croûtecroûte par les multiples failles et fissures se réchauffe en effet en profondeur et ressort par ces « bouches » avec une composition chimique différente, qui varie en fonction de la nature des roches rencontrées.
Il s'avère que la croûte primitive de la Terre qui compose le fond océanique est alors largement composée de roches ultramafiques, riches en ferfer et en magnésiummagnésium.
À leur contact, les fluides hydrothermaux se chargent en ces éléments métalliques et deviennent alcalins. Mais l'altération de ces roches produit également de grandes quantités de dihydrogène (H2). Dans ce fluide au pH proche de 12, aucune vie n'est possible. Ni dans l'océan acideacide qui entoure ces cheminéescheminées dantesques qui grandissent petit à petit par la précipitation des oxydes métalliques. Non, tout va se passer dans une zone très restreinte, à l'interface même entre ces deux environnements.
Construction des premières briques de base
Alors que le fluide hydrothermal surchauffé surgit des évents qui s'ouvrent dans la croûte, il entre en contact avec l'eau de mer froide et acide, riche en CO2. Va alors se produire une réaction élémentaireréaction élémentaire, totalement essentielle pour la suite de l'histoire du vivant. H2 et CO2 vont en effet réagir pour former du méthane (CH4) et d'autres hydrocarbureshydrocarbures.
Le méthane. Voilà qu'apparaît l'un des principaux composés organiques, qui sur la Terre d'aujourd'hui, est un marqueur du vivant. Mais, il y a 4 milliards d'années, cela ne l'est pas encore. Ce méthane-là est en effet d'origine abiotiqueabiotique. Par le biais de ces réactions géochimiques, noyaux des premières réactions métaboliques, les briques du vivant apparaissent donc. Mais ce n'est pas suffisant. Il manque quelque chose. Quelque chose sans quoi la vie n'est pas la vie : l'énergieénergie.
La question cruciale de l’énergie
Car il ne suffit pas de mettre du beurre, de la farine, des œufs et du sucresucre ensemble pour obtenir un gâteau. L'étape cruciale, celle qui va transformer cette mixture en quelque chose de mangeable, c'est la chaleur du four.
La question de l'énergie, c'est d'ailleurs ce qui a mis en défaut l'idée de la « soupe primordiale », hypothèse longtemps en vogue selon laquelle la vie aurait émergé dans les océans à partir des éléments présents et d'une petite étincelle apportée par les éclairs ou les rayons UVUV du SoleilSoleil. Pourtant, cela n'aurait de loin pas été suffisant pour entraîner la construction des premières cellules.
Étrangement, le milieu a priori le plus hostile qui soit à la surface de cette Terre primitive aurait en fait été le plus favorable à l'élaboration du vivant. Zoomons donc sur ces cheminées qui crachent ce fluide basique et chaud. Zoomons encore, car le processus essentiel qui se passe est de l'ordre... atomique !
Un déséquilibre chimique à l’origine de la vie
Car c'est aux mouvementsmouvements des protonsprotons et électronsélectrons qu'il faut désormais prêter attention. C'est au sein de la roche qui forme les grandes cheminées que va se jouer un phénomène majeur, que l'on retrouve encore aujourd'hui au sein de nos propres cellules. Cette paroi minérale poreuse sépare en effet deux fluides de composition très différente : d'un côté le fluide hydrothermal basique, de l'autre l'eau de mer acide. Au niveau de cette « membrane » minérale règne donc un état de fort déséquilibre chimique. Et c’est bien de ce déséquilibre que va naître la vie.
La nature tendant toujours vers l'équilibre, il va ainsi s'opérer un transfert de charges, notamment des ionsions H+, à travers cette membrane minérale poreuse. Un processus qui va libérer de l'énergie. Nous nous trouvons désormais au cœur du réacteur qui va permettre la polymérisation des premières briques élémentaires à la surface de certains minéraux, qui vont servir de catalyseurcatalyseur. Ces réactions vont mettre en jeu les nombreuses moléculesmolécules organiques présentes dans l'environnement immédiat, comme les acides aminésacides aminés et les hydrocarbures. De ces réactions prébiotiquesprébiotiques vont se former les premières vésicules et des molécules organiques plus complexes, comme l'acide ribonucléiqueacide ribonucléique. Le fameux ARN. La machine est en route. Elle ne s'arrêtera pas. Car elle est immuable comme le sont toutes les réactions chimiques.
La stabilité dans le temps de cet environnement, qui assure un apport énergétique constant, va favoriser la formation d'un grand nombre de molécules organiques, qui vont se combiner, jusqu'à l'émergenceémergence du processus d'autoréplication. La vie est née.
Cette histoire formidable ne représente cependant qu'un scénario parmi de nombreux autres. Car remonter aux origines de la vie est un chemin semé d'embûches. Explications au prochain épisode !