Si le climat influence la salinité des océans, l’inverse est également vrai. La présence d’un océan très salé durant l’Archéen (plus de 2,5 milliards d’années) aurait permis le maintien d’un climat chaud malgré un Soleil encore peu brillant.


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    La composition de l'atmosphère a un impact direct sur le climat, cela va désormais de soi. La multitude d'études paléoclimatiques a d'ailleurs mis en évidence l'influence majeure de la composition atmosphérique sur l'évolution du climat terrestre, et ce depuis l'origine de la Terre. La composition des océans a cependant joué un rôle tout aussi important, voire crucial pour le maintien de conditions climatiques favorables à l'apparition de la vie au début de l'histoire de notre Planète. Les échanges chimiques entre l'océan et l'atmosphère sont en effet très intenses et permettent de réguler certains processus, notamment au niveau des taux de gaz à effet de serre. Dans ce contexte, la quantité de sel présente dans les océans serait un facteur à ne pas négliger.

    La salinité des océans influence le climat

    SalinitéSalinité des océans et climat sont deux paramètres liés. S'il est actuellement question de l’influence du climat sur la salinité en raison du réchauffement climatique et de l'évaporation qu'il engendre, l'inverse est également vrai : la salinité des océans a la capacité d'influencer le climat. C'est ce que démontre une nouvelle étude, publiée dans la revue Geophysical Reasearch Letters.

    Les océans ont la capacité de stocker des gaz sous forme dissoute. C'est notamment le cas du CO2 dont on parle tant actuellement. Or, la solubilité des gaz dans l'eau est intimement dépendante de la concentration en ionsions dissous dans les océans. Sachant que la salinité des océans est définie par la concentration en ions sodiumsodium (Na+) et chlorure (Cl-), il apparaît que la solubilité des gaz diminue avec l'augmentation de la salinité : un océan salé sera donc moins en capacité de capter des gaz à effet de serre, qui resteront dans l'atmosphère.

    Cristaux de sel. © Björn Appel, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0
    Cristaux de sel. © Björn Appel, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0

    Les multiples effets du sel

    L'effet du sel ne s'arrête cependant pas là. La salinité influence également directement la densité de l'eau (l'eau salée est plus dense que l'eau douce), ce qui impacte les circuits de circulation océaniques, altérant de fait les échanges de température entre l'eau et l'airair, en particulier au niveau des hautes latitudeslatitudes. Effet bien connu, le sel permet également d'abaisser le point de congélation de l'eau de mer, empêchant la formation de glace à la surface des océans. Ce phénomène limite la formation de la banquise : plus la salinité est importante, plus il faudra atteindre une température basse pour que la glace commence à se former.

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    Pourquoi le sel fait-il fondre la neige ?

    La salinité de l'eau affecte la formation de la banquise. © ESA
    La salinité de l'eau affecte la formation de la banquise. © ESA

    L'ensemble de ces effets sont étroitement liés et leur combinaison fait qu'une variation de la salinité peut entraîner des effets prononcés sur la circulation océanique, sur le transport de la chaleurchaleur vers les hautes latitudes et sur la formation de la banquisebanquise. Or, même de petites variations de la couverture glaciaire peuvent entraîner des modifications significatives du climat à travers la modification de la surface réflective que représente la glace.

    Un nombre important de causes peuvent entraîner des variations de la quantité de sel dans les océans : variation du niveau de l'eau, variation des apports externes (rivières...) ou au niveau des sources hydrothermalessources hydrothermales, augmentation ou diminution du taux d'altération des roches continentales... Toutes ces variables font qu'il est facile d'envisager que la salinité des océans a pu fortement changer au cours de l'histoire de la Terre.

    Un océan plus salé à l’Archéen aurait entraîné un climat chaud en dépit d’un Soleil encore peu brillant

    En se basant sur un modèle climatiquemodèle climatique prenant en compte les dynamiques océanique et atmosphérique, l'équipe de scientifiques américains montre que plus les océans sont salés, plus cela engendre un climat chaud. Les résultats de l'étude suggèrent qu'une augmentation de la quantité de sel de 20 à 50 g/kgkg dans l'eau des océans entraînerait une réduction de 71 % de la banquise. Ces estimations sont valables dans la configuration actuelle, mais également pour le passé.

    Durant l'ArchéenArchéen, qui correspond à la première période géologique de la Terre, les scientifiques montrent que la présence d'un océan plus salé que l'actuel aurait pu permettre le maintien d'un climat chaud, en association avec de forts taux de gaz à effet de serre (CO2 et CH4) dans l'atmosphère. Cette conclusion a son importance puisqu'à cette époque de la jeunesse de la Terre, le Soleil était alors beaucoup moins brillant (environ 20 % de moins qu'aujourd'hui). La présence d'un océan très salé aurait ainsi pu empêcher la Terre de se transformer alors en une boule de glace, assurant notamment des conditions favorables à l'apparition et au développement de la vie.