Si les points chauds sont à l’origine des éruptions les plus impressionnantes sur Terre, la façon dont ils sont alimentés en profondeur reste encore énigmatique. Une nouvelle étude a cependant produit un nouveau modèle qui permet de mieux appréhender l’architecture complexe de cette vaste tuyauterie magmatique, qui prend sa source à 2 900 kilomètres de profondeur.
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Les points chauds font partie des grandes structures magmatiques de la Terre. En surface, ils produisent d'importantes éruptions, qui donnent naissance à des archipels volcaniques comme Hawaï, ou à des volcans particulièrement actifs comme le Piton de la Fournaise sur l’île de La Réunion. Au cours de l'histoire de la Terre, les points chauds sont également impliqués dans les grands épisodes d'ouverture continentale, ou le déclenchement d'épisodes volcaniques majeurs comme ceux des trapps volcaniques, à l'origine de plusieurs extinctions de masse.
Une source située à 2 900 kilomètres de profondeur
Pourtant, le fonctionnement des points chauds est encore sujet à débat. Il est communément admis qu'ils sont liés à la remontée de panaches mantelliquespanaches mantelliques chauds, qui prennent naissance à une grande profondeur dans le manteaumanteau. Grâce à la tomographie sismiquetomographie sismique, il est désormais de plus en plus clair que la plupart des points chauds sur le globe dérivent de deux super-panaches mantelliques situés sous l’Afrique et sous le Pacifique. Ces deux immenses structures s'enracinent à la limite entre le manteau et le noyau externe, à 2 900 kilomètres de profondeur, au niveau de ce que l'on appelle les LLSVP (large low-shear velocity province), ou grandes provinces de faible vitessevitesse d'ondes S.
Mais la façon dont sont connectés, ou pas, ces super-panaches et les panaches mantelliques à l'origine des points chauds est cependant encore mal définie.
Des panaches mantelliques à l’architecture complexe
Des chercheurs de l'université de Princeton (États-Unis) et de l'Institut de physiquephysique du globe de Paris (IPGP) se sont donc penchés sur la question. Grâce à un dense réseau de sismomètressismomètres installés autour de La Réunion et dans l'archipelarchipel des Comores, ils ont pu recueillir de nombreuses données sismiques et produire un modèle 3D de l'architecture des panaches magmatiques situés sous ces deux points chauds de l'océan Indien.
Ce nouveau modèle met en lumièrelumière la complexité de la tuyauterie magmatique de ces points chauds. Plusieurs conduits de grand diamètre apparaissent ainsi, caractérisés par des faibles vitesses d'ondes sismiquesondes sismiques. Bien individualisés, ils s'enracinent cependant tous sur l'interface noyau-manteau, au niveau du LLSVP africain. Si les panaches de La Réunion et des Comores sont clairement visibles, leur architecture verticale est toutefois surprenante. Les résultats ont été publiés dans la revue Science Advances.
Deux grands paliers horizontaux
En effet, les grands conduits verticaux qui traversent le manteau inférieur alimentent des sortes de vastes réservoirs horizontaux. Le matériel mantellique chaud remontant de 2 900 kilomètres de profondeur semble ainsi stocké au niveau d'un premier palier s'étendant de 1 000 à 660 kilomètres, ce qui correspond plus ou moins à la zone de transition entre le manteau supérieur et le manteau inférieur. De là, de nouveaux conduits s'élèvent et se connectent à un nouveau réservoir situé au sein de l'asthénosphèreasthénosphère, entre 250 et 100 kilomètres de profondeur. Ce sont ces réservoirs asthénosphériques qui semblent alimenter les points chauds de La Réunion et des Comores. Étant donné l'étendue des réservoirs horizontaux, il apparaît que l'expression en surface du volcanismevolcanisme de point chaud n'est pas forcément située à l'aplomb de la racine profonde du panache. Les volcans peuvent ainsi être décalés de manière significative. Il semble également possible que certains points chauds, comme celui de Marion, prennent leur source non pas dans le réservoir asthénosphérique, mais dans le réservoir le plus profond.
Cette architecture fait penser, quoiqu'à une échelle beaucoup plus grande, aux dykesdykes et sillssills infiltrant la croûtecroûte et qui constituent les systèmes magmatiques alimentant tous les types de volcans.