On sait que les océans primitifs étaient riches en fer et que c’est dans cet environnement que la vie est apparue, il y a quatre milliards d’années. Une nouvelle étude révèle d’ailleurs à quel point ce métal a joué un rôle prédominant dans les toutes premières réactions métaboliques, supplantant les autres métaux disponibles.


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    FerFer, zinczinc, cuivrecuivre, sodiumsodium, magnésiummagnésium, sans compter le calciumcalcium... Autant de métauxmétaux qui sont essentiels au métabolismemétabolisme des êtres vivants, à leur survie. Ils sont en effet impliqués et nécessaires dans de nombreuses réactions biochimiques qui se jouent au sein de nos cellules. C'est le cas pour nous, humains, mais aussi pour l'ensemble des êtres vivants. Y compris les bactériesbactéries les plus simples.

    Rôle des métaux dans les réactions métaboliques de base

    Le fer, le cuivre et le zinc sont ainsi les métaux universellement essentiels, ce qui suggère qu'ils aient été sélectionnés dès l'origine du vivant. Le fer et le cuivre, sous forme d'ionsions, possèdent en effet des propriétés d'oxydationoxydation qui les rendent particulièrement intéressants dans les réactions biologiques impliquant des transferts d'électronsélectrons. Les ions de zinc sont, quant à eux, capables de se lier fortement à d'autres atomesatomes et jouent des rôles clés dans de nombreux processus biologiques.

     C'est au niveau des cheminées hydrothermales, qui crachent d'énormes quantités de métaux, que la vie serait apparue. © Ifremer (2013) https://image.ifremer.fr/data/00702/81434/
    C'est au niveau des cheminées hydrothermales, qui crachent d'énormes quantités de métaux, que la vie serait apparue. © Ifremer (2013) https://image.ifremer.fr/data/00702/81434/

    Bien qu'ils ne soient aujourd'hui présents que sous forme de traces dans les organismes, en comparaison par exemple du calcium, du potassiumpotassium, du sodium et du magnésium, leur universalité et leur rôle fondamental dans certaines réactions biochimiques laissent penser que ces trois éléments devaient être particulièrement disponibles dans les océans de la Terre primitive.

    Un océan primitif riche en fer

    On sait qu'il y a quatre milliards d'années, lorsque la vie est apparue, les océans étaient particulièrement riches en fer. Beaucoup plus qu'ils ne le sont aujourd'hui. Entre temps, la Grande Oxygénation est passée par là. En développant le processus de photosynthèse, les organismes primitifs se sont mis à produire de l'oxygène il y a environ 2,5 milliards d'années. Or, on le sait, oxygène et fer réagissent facilement pour former des oxydes de fer. L'oxygénation des océans a donc induit un changement majeur de composition de l'eau de mer, en capturant les ions libres du fer et en les faisant précipiter sous forme d'oxydes sur le fond océanique. Une réaction qui s'est perpétuée jusqu'à ce que tout le fer soit consommé.

    Les fers rubanés sont les témoins de l’oxygénation de l'atmosphère et des océans, <em>via</em> l'oxydation du fer. © James St. John, <em>Wikimedia Commons</em>, cc by 2.0
    Les fers rubanés sont les témoins de l’oxygénation de l'atmosphère et des océans, via l'oxydation du fer. © James St. John, Wikimedia Commons, cc by 2.0

    Si l'on sait, grâce à ces dépôts ferreux formés durant la Grande Oxygénation, que l'océan primordial était très riche en fer, la concentration des autres éléments métalliques restait mal contrainte, ainsi leur disponibilité pour des réactions biochimiques.

    Une équipe de chercheurs a donc produit un modèle permettant d'estimer les concentrations des principaux métaux : fer, manganèsemanganèse, cobaltcobalt, nickelnickel, cuivre et zinc. Puis, à partir de cette composition océanique, les scientifiques ont analysé quels métaux étaient les plus susceptibles d'être utilisés par les premières biomolécules.

    Le fer, un métal très efficace dans les réactions biochimiques

    Et là, surprise, il apparait que le fer ait tout raflé. Les concentrations en cobalt et en manganèse auraient, semble-t-il, été ridicules par rapport à l'énorme quantité de fer disponible, rendant cet élément le plus disponible pour les réactions biochimiques. De fait, les biomolécules auraient plutôt réagi avec le fer et le magnésium. Mais pas le zinc. Étonnant, quand on sait aujourd'hui le rôle majeur que joue cet élément dans notre organisme.

    Une substitution par d’autres métaux suite à la Grande Oxygénation

    Par rapport au fer et au magnésium, le zinc aurait en effet été moins efficace dans les réactions, et aurait donc été délaissé au profit des deux éléments plus compétitifs. Aujourd'hui, toutefois, les choses sont bien différentes : le fer semble en effet avoir été substitué par d'autres métaux, notamment le zinc, dans de nombreuses réactions métaboliques. Pourquoi ?

    Ce changement radical associé à cette diversification serait à mettre en lien avec la Grande Oxygénation. Dans l'article publié dans la revue PNAS, les chercheurs expliquent ainsi que, si le fer reste l'élément le plus compétitif pour les réactions métaboliques de base dans un environnement sans oxygène, ce n'est pas le cas dans un environnement oxygéné !

    La baisse drastique de la disponibilité du fer dans ce nouvel environnement oxydé va en effet forcer la vie à trouver d'autres solutions, notamment en utilisant les autres métaux disponibles. Cette adaptation aurait, entre autres, engendré une complexification des réactions et le développement de nouvelles fonctions biologiques. On peut ainsi penser que, si la vie est apparue si facilement sur Terre, c'est certainement grâce au fer, mais si elle s'est complexifiée par la suite, c'est grâce à sa disparition !