Pour anticiper au mieux les séismes, il est important de connaître l’historique des failles. Des chercheurs sont donc partis sur les traces de l’origine de la faille est-anatolienne, responsable en février dernier de deux puissants et meurtriers séismes en Turquie.
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En février dernier, la Turquie et la Syrie étaient secouées par un puissant doublet de tremblements de terre. De magnitudemagnitude 7,8 et 7,5, ces deux séismes ont causé la mort de 50 000 personnes et produit d'innombrables dégâts. À l'origine de cette catastrophe, un brusque et important mouvement le long de l’une des deux failles principales qui sillonnent la Turquie. La faille est-anatolienne court en effet sur environ 700 kilomètres de l'est du pays vers le centre sud. Même si l'ampleur des séismes a pu surprendre, cette activité sismique n'est pas anormale. La faille est-anatolienne marque en effet la limite entre deux plaques tectoniques que sont la plaque Arabe au sud et la plaque anatolienne, qui porteporte la Turquie. Cette faille joue donc un rôle majeur en accommodant les mouvementsmouvements relatifs entre les deux blocs.
La faille est active et même si les séismes de février ont relâché une partie des contraintes accumulées par les roches, d'autres séismes sont à craindre dans la région, avec une échéance qu'il est cependant impossible à déterminer.
Les récents et terribles événements ont pourtant mis en lumièrelumière la nécessité de mieux connaître le fonctionnement et l'histoire de cette faille, relativement peu étudiée en comparaison de sa sœur jumelle, la faille nord-anatolienne dont le tracé passe par Istanbul, capitale de la Turquie.
Une faille qui n’a que 5 millions d’années
Une équipe internationale de chercheurs s'est donc intéressée à l'origine de cette faille et à son rôle dans la formation de la plaque anatolienne.
Les données, publiées dans la revue Geology, montrent que cette faille serait relativement jeune. Elle se serait formée il y a environ 5 millions d'années seulement, donnant ainsi naissance à la plaque anatolienne. Cela ne signifie cependant pas que la région était exempte de déformation avant cette date, bien au contraire. L'Anatolie est depuis longtemps soumise aux pressionspressions tectoniques qu'exerce la collision entre les plaques Arabe et Eurasie, entre lesquelles elle est prise en sandwich. L'étude de la déformation montre que cette pression était accommodée auparavant de façon plutôt distribuée, le long de multiples failles courant dans le centre et l'est de la Turquie. La compression d'axe N-S appliquée par la remontée de la plaque Arabe a ainsi commencé à être accommodée il y a 25 millions d'années par une extension du bloc anatolien suivant l'axe E-O. Le bloc anatolien était alors en quelque sorte écrasé entre l'Eurasie et l'Arabie. Mais les scientifiques notent cependant un changement majeur il y a 5 millions d'années. Auparavant distribuée, la déformation se localise en effet brusquement dans le sud-est de la plaque anatolienne, le long d'une grande faille dite décrochante. C'est la naissance de la faille est-anatolienne. Celle-ci se connecte alors aux deux autres grandes structures tectoniques déjà préexistantes, la faille nord-anatolienne et la faille du Levant.
La naissance d’une nouvelle plaque tectonique
Ces résultats ont été obtenus grâce à la thermochronologie, qui repose sur l'analyse de la température des roches à un moment de leur histoire. Ainsi, les roches situées au niveau de la faille est-anatolienne montrent un échauffement il y a environ 5 millions d'années, en lien avec l'activation d'une circulation de fluides chauds au sein des roches fracturées. Les analyses géochimiques révèlent de plus l'origine profonde de ces fluides, qui comportent une signature mantellique, signe du développement d'une faille majeure qui s'enracine profondément dans la lithosphère continentale. Un élément qui indique que la faille est-anatolienne n'est pas qu'une simple faille, mais également la limite d'une nouvelle plaque tectonique. Avec elle, naît ainsi la plaque Anatolie, dont le mouvement va désormais être accommodé par le jeu de ces deux grandes failles majeures qui délimitent ses frontières avec la plaque Arabe au sud et la plaque Eurasie au nord.
La naissance de la plaque Anatolie va ainsi être associée au développement d'un système « d'échappement ». Au lieu de se faire comprimer comme une vulgaire boîte de conserve, le bloc anatolien va se mettre à « fuir » vers l'ouest, grâce aux glissements que lui permettent désormais les deux failles, échappant ainsi à la compression nord-sud.