Comprendre l’origine et les processus responsables de la forte sismicité du Japon est essentiel pour protéger les habitants de cette région du monde. Dans ce contexte, la structure et la composition de la plaque supérieure semblent influencer largement la génération de puissants séismes au niveau de la zone de subduction.


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    Le Japon est bien connu pour être une région à haut risque sismique. En cause, la présence d'une zone de subductionzone de subduction au large de ses côtes, qui voit la plaque philippine plonger sous la plaque Eurasie au niveau de la Fosse de Nankai. Certaines caractéristiques font que cette zone de subduction est particulièrement sismogène. En premier lieu, la vitessevitesse de subduction, de 4,5 cm/an, ce qui est relativement élevé. Il y a également le fait que la plaque philippine est jeune (entre 27 et 15 millions d'années) et que la géométrie de la zone de subduction est plus complexe que pour la plupart des autres plaques tectoniques. L'une des zones les plus sismogènes se situe ainsi au niveau de la péninsule de Kii, où la pente du slab (la partie de la plaque s'enfonçant dans le manteaumanteau) est particulièrement importante. Au cours de l'histoire, la péninsule de Kii a ainsi connu de nombreux séismes de magnitudemagnitude (Mw) supérieure à 8.

    Localisation de la Fosse de Nankai au large du Japon. © Geodaugherty, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0
    Localisation de la Fosse de Nankai au large du Japon. © Geodaugherty, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0

    Une énorme intrusion magmatique dans la croûte japonaise

    Grâce à la collection d'une importante quantité de données sismiques, une équipe de chercheurs a pu construire un modèle 3D de la structure de vitesse de la croûtecroûte dans cette région. Les résultats montrent que la péninsule de Kii se situe au-dessus d'une énorme anomalie de vitesse sismique. Cette anomalieanomalie signe la présence d'un corps intrusif de forte densité dans la croûte japonaise : le plutonpluton de Kumano. Il s'agit d'une intrusion de matériel magmatique ayant cristallisé au sein de la croûte. Le pluton de Kumano forme le butoir devant lequel la plaque philippine se courbe pour entamer son grand plongeon. Une zone particulièrement critique.

    Schéma général d’une subduction. Le pluton de Kumano se situerait au sein de la plaque supérieure, dans la zone « forearc ». © Zyzzy2 Wikipedia, CC by-sa 3.0, Wikimedia Commons
    Schéma général d’une subduction. Le pluton de Kumano se situerait au sein de la plaque supérieure, dans la zone « forearc ». © Zyzzy2 Wikipedia, CC by-sa 3.0, Wikimedia Commons

    La présence de cette hétérogénéité dans la plaque supérieure semble en effet affecter sérieusement la dynamique de la zone de subduction sous la péninsule de Kii. Le pluton, en créant une surépaisseur de la plaque supérieure et en augmentant sa rigiditérigidité, force la plaque philippine à plonger de manière plus abrupte. Tous ces facteurs pourraient favoriser la survenue de mégaséismes.

    Pente du slab, failles et hydratation : les ingrédients pour la génération de puissants séismes

    En effet, plus la pente du slab est importante, plus la courbure de la croûte au niveau de la fosse de subduction sera forte. Or, la croûte océaniquecroûte océanique n'est pas élastique. Elle est rigide et cassante. Sous l'effet de la courbure prononcée, de nombreuses faillesfailles vont se développer, définissant ainsi une zone particulièrement sismogène. Les résultats de l'étude montrent que les failles pénètrent très profondément, jusqu'au MohoMoho. La présence de ces grandes failles va alors permettre à l'eau de mer de s'infiltrer dans la croûte et d'atteindre le manteau supérieur. Or, les roches du manteau, les péridotitespéridotites, sont extrêmement sensibles à l'hydratationhydratation. L'arrivée de l'eau en profondeur va ainsi provoquer une réaction d'altération connue sous le nom de serpentinisation : les péridotites se transforment en serpentinitesserpentinites, un minéral instable face à l’augmentation de la température. Les résultats montrent que de très nombreux séismes, certains de magnitude supérieure à 7, sont originaires de cette zone de manteau altéré.

    L'étude, publiée dans Nature Geoscience, montre à quel point les variations latérales dans la structure de la croûte supérieure et notamment la présence d'hétérogénéités majeures comme le pluton de Kumano, contrôlent la géométrie de la zone de subduction et la génération de mégaséismes. Jusqu'à présent, l'extension et l'impact du pluton de Kumano étaient largement sous-estimés. Ces résultats vont aider les scientifiques à évaluer le risque sismique réel de la région, tout en sachant qu'il ne sera jamais possible de prédire exactement quand, où et comment le prochain tremblement de terre aura lieu.