Une image vaut mille mots a-t-on coutume de dire. Mais celle-ci vaut sans doute plus que tous les mots. L’image de notre planète comme rien de plus qu’un fragile petit point bleu, perdu dans l’immensité de l’Univers. De quoi remettre les choses en perspective en cette journée de la Terre.
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Il y a quelques jours, Makenzie Lystrup prenait la tête du Goddard Space Flight CenterGoddard Space Flight Center, l'un des principaux centres de terrain de la NasaNasa. La première femme à ce poste. Et symbole parmi les symboles, elle prêtait alors serment non plus sur la Bible, mais sur une copie du livre « Pale Blue Dot » -- comprenez « Un petit point bleu » -- de Carl SaganCarl Sagan paru en 1994.
Un symbole parce que celle que les scientifiques appellent Pale Blue Dot, c'est en fait une photo devenue emblématique. Iconique. Un cliché renvoyé par la sonde Voyager 1Voyager 1, en février 1990. Son dernier coup d'œilœil vers le Système solaire, alors qu'elle se trouvait à plus de six milliards de kilomètres de notre Terre. Une photo iconique, d'abord, parce qu'elle reste, aujourd'hui encore, l'une des photos les plus lointaines que nous ayons de notre planète. Qui apparait dessus comme... un petit point bleu.
Un symbole aussi parce que l'image n'a pas de réel intérêt scientifique. La photo d'origine est granuleuse. Et il faut bien l'avouer, on devine à peine notre Terre dans un rayon de SoleilSoleil. Un petit point bleu d'environ un pixelpixel seulement. Pour célébrer les 30 ans de la prise de vue, en 2020, la Nasa avait d'ailleurs publié une version revisitée de cette image.
Lorsqu'il a demandé cette photo, Carl Sagan savait qu'elle ne montrerait rien d'intéressant du strict point de vue du scientifique qu'il était. Mais il espérait qu'en découvrant notre Terre comme un petit point bleu, l'humanité prenne conscience de sa fragilité, de sa vulnérabilité. Qu'elle prenne conscience, aussi, qu'elle n'est rien de plus qu'un petit point dans l'immense océan cosmique.
Une image qui donne de la perspective
Alors qui de mieux que Carl Sagan lui-même pour décrire l'émotion qui se dégage de cette photo ? De ce petit point bleu... « De ce point de vue lointain, la Terre peut ne pas sembler d'un intérêt particulier.
Mais pour nous, c'est différent. Regardez encore ce point. C'est ici. C'est notre foyer. C'est nous. Sur lui tous ceux que vous aimez, tous ceux que vous connaissez, tous ceux dont vous avez entendu parler, tous les êtres humains qui aient jamais vécu, ont vécu leur vie. Toute la somme de nos joies et de nos souffrances, des milliers de religions aux convictions assurées, d'idéologies et de doctrines économiques, tous les chasseurs et cueilleurs, tous les héros et tous les lâches, tous les créateurs et destructeurs de civilisations, tous les rois et tous les paysans, tous les jeunes couples d'amoureux, tous les pères et mères, tous les enfants pleins d'espoir, les inventeurs et les explorateurs, tous les professeurs de morale, tous les politiciens corrompus, toutes les "superstars", tous les "guides suprêmes", tous les saints et pécheurs de l'histoire de notre espèce ont vécu ici -- sur un grain de poussière suspendu dans un rayon de soleil.
Nos postures, l'importance que nous nous imaginons avoir, l'illusion que nous avons quelque position privilégiée dans l'universunivers, sont mises en question par ce point de lumièrelumière pâle. Dans notre obscurité, dans toute cette immensité, il n'y a aucun signe qu'une aide viendra d'ailleurs nous sauver de nous-mêmes.
Pas de planète b
La Terre est jusqu'à présent le seul monde connu à abriter la vie. Il n'y a nulle part ailleurs, au moins dans un futur proche, vers où notre espèce pourrait migrer. Visiter, oui. S'installer, pas encore. Que vous le vouliez ou non, pour le moment c'est sur Terre que nous prenons position.
On a dit que l'astronomie incite à l'humilité et fortifie le caractère. Il n'y a peut-être pas de meilleure démonstration de la folie des vanités humaines que cette lointaine image de notre monde minuscule. Pour moi, cela souligne notre responsabilité de cohabiter plus fraternellement les uns avec les autres, et de préserver et chérir le point bleu pâle, la seule maison que nous ayons jamais connue. »
Des mots -- et une image -- qui pourraient prendre encore plus de valeur dans le contexte de crise climatique, de crise écologique que nous vivons aujourd'hui.
À peine une demi-heure après avoir pris ce cliché emblématique, le 14 février 1990, Voyager 1 éteignait définitivement ses caméras. Pour économiser une énergieénergie qui lui serait précieuse à poursuivre sa route. En août 2012, la mission a pénétré l'espace interstellaire. C'est désormais l'objet créé par l'homme le plus éloigné de notre Terre de tous les temps.