Pour imager les niveaux les plus profonds de notre Planète, il n’y a pas d’autres choix que de se servir des ondes sismiques générées lors des grands séismes. En voyageant jusqu’au centre de la Terre, elles permettent en effet de « voir » ce qui s'y passe. L’analyse d’ondes sismiques bien particulières appelées « précurseurs PKP » pourrait ainsi permettre de mieux comprendre la nature de l’interface entre le manteau et le noyau.


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    Lorsqu'un séisme se produit, ses ondes voyagent dans toutes les directions à l'intérieur de la Terre. Si la Terre était homogène, on les enregistrerait en différents points du globe avec un décalage temporel dépendant uniquement de la vitessevitesse dans ce milieu et de la longueur du trajet parcouru. Mais la Terre est composée de multiples enveloppes et de très nombreuses hétérogénéités, qui présentent chacune des caractéristiques physico-chimiques différentes. Ces hétérogénéités vont de fait influencer la propagation des ondes sismiques, dont le signal va être modifié. L'analyse de ces ondes va ainsi permettre de construire une image numérique de l’intérieur de la Terre et de caractériser les différents milieux.

    Des ondes particulières diffusées à la base du manteau

    Parmi les ondes qui ont longtemps intrigué les sismologuessismologues, il y a les précurseurs des ondes PKIKP. Les ondes PKIKP sont des ondes compressives qui traversent le manteaumanteau, le noyau externe et le noyau interne. Les enregistrements montrent cependant qu'elles sont précédées par des ondes dites « précurseurs PKP ». Étudiées depuis une soixantaine d'années maintenant, ces ondes particulières seraient générées par l’arrivée d’une onde P dans un milieu diffusant situé à la base du manteau. La nature de ce milieu et son extension au sein du manteau restent cependant très débattues.

    Les différentes trajectoires des ondes sismiques et leur complexité induite par la structure interne de la Terre. © Musée de sismologie de Strasbourg
    Les différentes trajectoires des ondes sismiques et leur complexité induite par la structure interne de la Terre. © Musée de sismologie de Strasbourg

    Une nouvelle étude, publiée dans la revue AGU Advances propose cependant une nouvelle hypothèse. D'après une équipe de chercheurs, les ondes précurseurs PKP se formeraient au niveau des zones de très faible vitesse (ULVZ pour ultra-low velocity zones)) que l'on trouve disséminées à l'interface entre le manteau et le noyau liquide externe. Ces zones qui ne font que 20 à 40 kilomètres d'épaisseur possèdent une composition et des propriétés particulières qui ont pour effet de faire ralentir les ondes sismiques qui les traversent, d'où leur nom. Leur origine était jusqu'à présent très mystérieuse.

    Schéma présentant la structure interne de la Terre. Les ondes précurseurs PKP se formeraient au niveau de l'interface noyau-manteau (<em>outer core</em>-<em>mantle</em>) dans les zones de faible vitesse. © Michael Thorne, <em>University of Utah</em>
    Schéma présentant la structure interne de la Terre. Les ondes précurseurs PKP se formeraient au niveau de l'interface noyau-manteau (outer core-mantle) dans les zones de faible vitesse. © Michael Thorne, University of Utah

    Du basalte transporté jusqu’au fond du manteau à l’origine de ces anomalies

    Grâce à de nouvelles modélisationsmodélisations basées sur l'analyse des ondes précurseurs PKP, les chercheurs proposent désormais que ces zones à faible vitesse résultent de la fusion partielle des basaltes composant la croûte océanique ayant plongé au niveau des zones de subduction et terminant sa course au niveau de l'interface noyau-manteau.

    Ces résultats aident à mieux contraindre la dynamique et la nature des niveaux profonds de la Terre.