Là où les humains utilisent la reconnaissance faciale, les chimpanzés se basent sur ce qu’ils voient sur leurs derrières. Un visage humain et des fesses de chimpanzé ont beaucoup de points communs...

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    Chez les espèces sociales comme les primates, il est important de reconnaître ses congénères. Pour cela, les humains utilisent le visage et ses caractéristiques : couleur des yeux, forme des sourcils et des lèvres, joues.... Les humains possèdent même des aires cérébrales spécialisées dans la reconnaissance des visages.

    Les différentes parties du visage humain servent à signaler des émotions, des intentions, donnent des informations sur la santé ou l'attirance sexuelle (des regards qui en disent long). Tout comme le feraient les fesses des chimpanzés.

    Des travaux avaient en effet déjà montré que ces singes n'utilisaient pas que le visage pour se reconnaître entre eux, mais aussi leurs fesses. Les visages humains et les derrières de chimpanzéschimpanzés ont beaucoup de points communs : ils sont apparents, symétriques, et jouent un rôle dans l'attirance sexuelle. Ils auraient évolué de façon à permettre une identification rapide : l'absence de poils révèle les contours et les couleurscouleurs. Les fesses de chimpanzé et les visages humains peuvent changer de couleur pour envoyer un signal : quand les femelles chimpanzés ovulent, leurs fesses sont gonflées et rougissent dans la zone anogénitale ; quand les humains sont gênés, ils rougissent et montrent de l'embarras.

    Or, d'après des chercheurs de l'université de Leiden, aux Pays-Bas, et de Kyoto, au Japon, les chimpanzés utilisent le même processus pour identifier une paire de fesses que nous un visage. Les chercheurs ont étudié les points communs entre la reconnaissance des visages chez l'Homme et celle des fesses chez les chimpanzés. Dans leurs expériences, des chimpanzés ont regardé des images de visages, de derrières et de pieds sur des écrans. Parfois, les images étaient dans le bon sens, parfois à l'envers. L'image était ensuite remplacée par deux images, l'une était celle présentée juste avant et l'autre une nouvelle. Les animaux devaient trouver quelle était l'image déjà vue. Les résultats sont décrits dans Plos One.

    Expériences réalisées. A : en haut, des visages humains ; au milieu, des fesses de chimpanzés et en bas, des pieds humains. Les images de droite sont inversées (<em>inverted</em>, en anglais). La bonne réponse est, de haut en bas : gauche, droite, droite. B : points communs entre le visage humain et les fesses de chimpanzés. C : un chimpanzé au cours d’une expérience. © Kret et Tomonaga,<em> Plos One</em>

    Expériences réalisées. A : en haut, des visages humains ; au milieu, des fesses de chimpanzés et en bas, des pieds humains. Les images de droite sont inversées (inverted, en anglais). La bonne réponse est, de haut en bas : gauche, droite, droite. B : points communs entre le visage humain et les fesses de chimpanzés. C : un chimpanzé au cours d’une expérience. © Kret et Tomonaga, Plos One

    Ils regardent les fesses comme nous cherchons un visage

    Pendant cette expérience, les singes retrouvaient plus rapidement les derrières dans le bon sens que les visages, les pieds ou les derrières à l'envers. Or, chez les humains, ce sont les visages inversés qui sont plus difficiles à reconnaître : nous reconnaissons plus facilement les visages quand ils sont à l'endroit et avons moins de difficultés à reconnaître des objets inversés (maisons, voituresvoitures...) qu'un visage dans le mauvais sens. Ce phénomène s'appelle l'effet d’inversion faciale. Notre cerveaucerveau aurait créé un raccourci pour que les visages soient reconnus de manière plus efficace et plus rapide, mais cela ne fonctionne que s'ils sont dans le bon sens.

    D'après la neuropsychologue Mariska Kret, de l'université de Leiden, si les chimpanzés peinent à reconnaître des fesses à l'envers, « c'est une bonne indication que cette catégorie a la priorité sur les autres objets ». En d'autres termes, les chimpanzés regardent les fesses dans une foule de derrières comme nous cherchons un visage connu dans un groupe.

    L'Homme aurait donc évolué d'une identification par les derrières à une identification par le visage : les signaux sociaux et sexuels qui provenaient des fesses seraient désormais envoyés par les visages. Autrement dit, nos visages auraient évolué pour ressembler plus à des derrières et être plus faciles à reconnaître.