La canicule tardive que nous connaissons n'est pas anodine : intense et durable, elle fragilise la nature, change le paysage montagnard, affecte nos industries et aggrave encore plus la crise de l'eau que nous connaissons déjà.


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    L'épisode de chaleurchaleur tardif en cours est exceptionnel par sa duréedurée et son intensité, et surtout en raison de la succession de températures très élevées, avec des maximales dépassant 40 °C pendant cinq jours dans le sud-est et le sud-ouest. À Lyon par exemple, la série de six jours avec des températures maximales supérieures à 36 °C démarrant le 17 août est historique par sa durée, précise Météo France. Une telle série de journées de chaleur extrême n'est pas sans conséquence, sur la nature, l'agriculture, l'eau et les industries.

    En montagne, fonte massive de la neige et de la glace

    Dans la nuit du 20 au 21 août, l'isotherme 0 °C a été mesuré à 5 299 mètres d'altitude à Payerne en Suisse, un record absolu, devant les 5 184 mètres de juillet 2022. Le fait que la température de 0 °C ait été atteinte à partir de plus de 5 200 mètres signifie donc que le Mont-Blanc a connu une température positive à son sommet, un événement très rare. La préfecture de Haute-Savoie demande d'ailleurs cette semaine aux alpinistes de reporter leur ascension en raison du risque de chutes de pierres lié aux fortes chaleurs. Comme le précise le glaciologue Mélaine Le Roy, quatre refuges de montagne ont été fermés en quelques jours dans le massif des Écrins en raison de conditions d'accès dangereuses. Châtelleret, Selle, Pelvoux et Sélé sont interdits au public à cause des risques naturels liés à la chaleur des dernières semaines : inondations éclairs, chute de roches et glace instable.

    En Savoie, la fontefonte massive du glacier de la Mahure a fait gonfler le ruisseau du Grand-Pyx, à tel point qu'une passerellepasserelle habituellement fréquentée par les randonneurs a été emportée par les eaux. Vues du ciel, les Alpes apparaissent quasiment complètement déneigées.

    La nature et l'agriculture en souffrance  

    L'arboriculture et la viticulture vont subir les effets négatifs de températures supérieures à 40 °C sur la moitié sud : « en intervenant pendant la maturation des fruits/vignes, cette canicule aura des impacts agricoles inédits à étudier : échaudage, brûlure des feuilles/fruits, chute de fruits... C'est la première fois que les cultures sont confrontées à des températures aussi hautes et durables" explique l'agroclimatologue Serge Zaka. "Les températures observées et prévues (42, voire localement 43 °C, sur plusieurs jours) sont inédites pendant la fin de cycle de la viticulture et de l'arboriculture (limite de résistancerésistance physiologique) et concerneront les bassins de production les plus importants de France ». De plus, « l'échaudage et les brûlures démarrent généralement à 35 °C », précise-t-il. Le stressstress que les chaleurs extrêmes représentent peut faire tomber les fruits avant leur maturation, et pour ceux qui restent, abîmés, les prix de vente vont chuter.

    D'une manière générale, les arbresarbres sont en situation de stress sur les trois quarts du pays. Certains ont déjà subi deux canicules au cours de l'été : celle de juillet et celle de mi-août dans le sud. Plusieurs espècesespèces perdent leur écorce de manière précoce et excessive, et d'autres présentent des feuilles complètement jaunies, qui finissent par tomber. Le même constat avait déjà été fait lors de l'été 2022, et cette série d'étés anormalement chauds fragilise les arbres sur le long terme. Le stress qu'ils subissent les expose aux parasitesparasites et réduit leur espérance de vieespérance de vie.

     

    L'accès à l'eau devient encore plus problématique

    Rappelons que dans son dernier bulletin hydrogéologique, le BRGMBRGM annonce que « la situation des nappes phréatiquesnappes phréatiques continue de se dégrader lentement. Elle demeure peu satisfaisante sur une grande partie du pays : 72 % des niveaux des nappes restent sous les normales mensuelles ». Plus de 80 communes françaises n'ont plus d'eau potable et sont ravitaillées par camions citernes et bouteilles.

    En plus des stocks d'eau qui s'épuisent, le fonctionnement des centrales nucléairescentrales nucléaires devient plus difficile. Ces derniers jours, EDF a émis plusieurs alertes pour la centrale nucléaire de Bugey, située dans l'Ain. Les fortes chaleurs réchauffent les cours d'eau, dans lesquels les centrales nucléaires pompent pour se refroidir. Le problème, c'est qu'en effectuant cette action, les centrales contribuent aussi à faire grimper la température des cours d'eau, cela représente donc une menace supplémentaire pour la biodiversitébiodiversité aquatique. Ce lundi, le gouvernement a d'ailleurs demandé à 15 sites industriels sur 50 de réduire significativement la quantité d'eau prélevée pour leur fonctionnement. Il s'agit d'une mesure issue du plan eau annoncé en mars dernier.