Pour limiter le réchauffement climatique anthropique, nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Tout le monde semble d’accord sur ce point. Mais les trajectoires pour y arriver font encore débat. À la veille de l’ouverture de la COP28, de nouveaux travaux remettent quelques pendules à l’heure. Tous les combustibles fossiles doivent être abandonnés !
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À la fin de ce mois de novembre, à l'occasion de la COP28, les gouvernements du monde entier seront appelés à discuter de leurs ambitions en matièrematière de réduction de leurs émissionsémissions de gaz à effet de serre. En ligne de mire, toujours, l'objectif de maintenir le réchauffement climatique anthropique sous la barre des 1,5 °C. Et pour y arriver, nous n'avons plus d'autre choix que de réduire rapidement nos consommations de TOUS les combustiblescombustibles fossiles, affirment des chercheurs du Stockholm Environment Institute (Suède) dans la revue Nature Communications.
Cela vous semble une évidence ? Eh bien, sachez que le consensus reste difficile à trouver, en la matière. Il y a deux ans, à l'occasion de la COP26, un accord avait été trouvé autour de la réduction progressive de l'usage du charbon. Le recul nécessaire du recours au pétrolepétrole semble lui aussi presque faire l'unanimité. Reste le cas plus épineux du gazgaz. Ce fameux gaz que l'on appelle naturel, mais qui n'en reste pas moins fossile. Certains veulent continuer à compter plus ou moins largement sur lui.
Tous les combustibles fossiles nuisent au climat
Dans l'espoir d'éclairer un peu plus les débats et de dépasser les idéologies, les chercheurs du Stockholm Environment Institute ont étudié la centaine de scénarios d'atténuation - ceux qui mènent à un réchauffement contenu dans la limite de 1,5 °C ou à peu près - que l'on retrouve dans le dernier rapport d'évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climatGroupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec). Ils ont analysé l'efficacité et la rapiditérapidité ainsi que la faisabilité des différentes options proposées. Comme évoqué plus haut, la majorité propose des réductions substantielles des approvisionnements en charbon et en pétrole. Mais là aussi, la trajectoire pour le gaz fossile est moins nette. Elle est conditionnée notamment par trois facteurs : la tarification du carbonecarbone, la disponibilité de technologies de captage et de stockage du carbone (CSC) et d'élimination du dioxyde de carbone (CDR) et le déploiement des énergies renouvelables.
Les chercheurs notent que tous les scénarios qui envisagent un « rebond » du recours au carbone fossile n'imposent pour ainsi dire aucune contrainte en matière de potentiel de captage, de stockage et d'élimination de dioxyde de carbone (CO2). Or une étude, menée en 2020, montre que des facteurs aussi bien techniques - la capacité de stockage géologique, par exemple - que non techniques - comme les contraintes de gouvernance - limitent le potentiel du CSC et du CDR. Ainsi, si l'on s'en tient à ce que les experts ont alors appelé le « potentiel raisonnablement réalisable » de ces technologies, la production et l'utilisation mondiale de gaz fossile devraient être réduites deux fois plus rapidement. Comprenez qu'au lieu de les limiter de 42 % en 2050 par rapport à ce qu'elles étaient en 2020, il faudrait les limiter - toujours pour rester sous la barre des 1,5 °C de réchauffement climatique anthropique - de 84 % ! Pour le charbon et le pétrole, l'impact est moindre. D'une limitation respective de 95 % et de 62 %, il faudra passer à 99 % et 70 %.
Le gaz fossile, quelle que soit sa forme, n’est pas « plus propre »
Ceux qui jusqu'ici présentaient le gaz fossile comme « une énergieénergie de transition », voire « un carburant plus propre », pourraient donc bien avoir fait fausse route. D'autant que rester sur le recours limité des technologies de captage, de stockage et d'élimination de CO2 que permettent les scénarios qui font baisser tous les combustibles fossiles présente aussi d'autres avantages : une réduction de la pollution de l’air et de l'eau ou encore des gains pour la biodiversitébiodiversité et même pour les populations.
Et des travaux de chercheurs de l'université Cornell (États-Unis) confirment encore un peu plus aujourd'hui cette conclusion. Pour comprendre, rappelons que le gaz naturel liquéfiégaz naturel liquéfié (GNL) est encore plus volontiers présenté comme l'énergie fossileénergie fossile qui doit nous permettre de passer du charbon et du pétrole aux renouvelables. Parce qu'il est réputé émettre 40 % moins de CO2 que le charbon et 30 % moins que le pétrole. C'est toutefois sans compter les fuites, nous mettent en garde les chercheurs. Ils ont analysé l'empreinte du GNL transporté des États-Unis vers l'Europe et l'Asie sur l'ensemble de son cycle de vie. Selon eux, dans le meilleur des cas, le GNL serait quelque 24 % plus émetteur que le charbon. Dans le pire des cas, il est question d'une empreinte deux fois plus importante ! Ces chiffres restent à prendre avec des pincettes, car le processus de révision par les pairs de ces travaux n'est pas encore allé à son terme. Mais s'ils devaient être confirmés, c'est finalement la sortie du GNL qui pourrait devenir une priorité absolue.