Clap de fin pour la COP29. Avec, peut-être plus que jamais, un bilan loin d’être à la hauteur des enjeux.


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    Dans la nuit de samedi à dimanche, après deux semaines d'échanges pas toujours cordiaux et d'âpres négociations, Mukhtar Babayev, le président azerbaïdjanais (et ancien dirigeant d'une compagnie pétrolière) de la 29e conférence des Nations unies sur le changement climatique, la COP29, a scellé, à Bakou l'adoption d'un accord entre les parties représentées. Mais avant d'en retenir la substance, revenons quelques jours en arrière.

    D’« une sortie des combustibles fossiles » à des « combustibles de transition »

    Parce que dès l'ouverture de cette conférence au royaume des énergies fossiles, Ilham Aliyev, le président de l'Azerbaïdjan avait affiché la couleurcouleur. « Le pétrolepétrole et le gazgaz sont des cadeaux de dieu. Les pays ne devraient pas être blâmés pour les avoir et ne devraient pas être blâmés pour avoir amené ces ressources sur le marché, car le marché en a besoin », déclarait-il avec aplomb.

    Le saviez-vous ?

    Environ 75 % des exportations de combustibles fossiles de l’Azerbaïdjan sont destinées aux marchés européens. Pas plus tard qu’en 2022, l’Europe a signé un accord avec Bakou pour doubler les importations de gaz du pays.

    Alors, on ne sera pas très surpris de constater que la mention de nécessaire « sortie des combustiblescombustibles fossiles », dont l'apparition dans l'accord de l'année dernière avait tant été saluée, a disparu du document final validé en fin de COP29. À la place, il est question de « combustibles de transition » pouvant contribuer à la fameuse « transition juste » à laquelle appelait l'accord de la COP28. Une victoire de plus, semble-t-il, pour les producteurs gaziers.

    Il faut dire que les lobbyistes des énergies fossiles étaient une fois de plus présents en nombre à Bakou. Au moins 1 773 avaient fait le déplacement. On le sait parce que depuis la COP28, les délégués ont l'obligation de faire mention de leur employeur. Au total, plus de 70 000 personnes ont participé à la conférence. C'est plus qu'à presque toutes les COP passées. Mais environ 15 000 de moins que l'année dernière.

    Le groupe qui s'était créé à l'occasion de la COP26 pour pousser à la sortie des énergies fossiles, la Beyond Oil and Gas Alliance, n'a, pour la première fois, pas convaincu de nouveau pays au ralliement. Tout juste, l'Union européenne et 25 autres pays, se sont-ils engagés à ne plus mettre en fonctionnement de nouvelle centrale à charbon sans système de capture du dioxyde de carbone (CO2). Le Royaume-Uni, la Colombie et la Nouvelle-Zélande ont, eux, rejoint une coalition de gouvernements - parmi lesquels, le gouvernement français - visant à éliminer, mais seulement progressivement, les subventions aux combustibles fossiles.

    Chaque année, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publie un suivi du financement climatique à destination des pays en développement. © OCDE
    Chaque année, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publie un suivi du financement climatique à destination des pays en développement. © OCDE

    L’argent, le nerf de la lutte contre le réchauffement climatique

    Mais le sujet phare de cette COP29 était celui du financement. Pour comprendre, rappelons qu'à l'occasion de la COP15 qui s'est tenue à Copenhague (Danemark), les pays en développement s'étaient vu promettre le versement de 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 et jusqu'en 2025. Objectif : les aider à financer leur transition énergétique, mais aussi leur adaptation au réchauffement climatique. La somme incluait aussi les réparations des dommages actuels et futurs causés par les événements météorologiques extrêmes (inondations, caniculescanicules, tempêtestempêtes, etc.). L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDEOCDE) suit les progrès accomplis en la matièrematière. Et sa dernière évaluation montrait qu'en 2022, les pays développés ont mobilisé un total de l'ordre de 115 milliards de dollars, dépassant pour la première fois l'objectif annuel fixé.

    Par pays développés, il faut entendre ceux qui figurent sur une liste de pays désignés comme historiquement responsables du réchauffement climatique anthropique. Soit l'Europe et 23 autres pays - comme les États-Unis, le Japon, l'Australie ou le Canada. Et ce qui apparaît dans l'accord signé en clôture de cette COP29, c'est un objectif revu à la hausse. Une cible d'au moins 300 milliards de dollars par an à atteindre d'ici 2035. Mais ce Nouvel Objectif Collectif Quantifié (NCQG) est loin de satisfaire tout le monde.

    D'ailleurs, le groupe des petits États insulaires (Aosis) s'est, un temps retiré, des négociations, comparant la somme promise à « un crachat au visage des nations vulnérables ». « Nous comptons nos morts et ils nous offrent des miettes », déplorait alors le négociateur principal du Panama, Juan Carlos Monterrey Gómez. Ces dernières semaines, les pays du sud avaient évoqué un besoin de l'ordre de 1 300 milliards de dollars par an. Et l'accord final espère encore mobiliser « tous les acteurs » à augmenter les fonds provenant de « toutes les sources publiques et privées » pour atteindre ce chiffre. Il peut sembler énorme. Un peu moins, peut-être lorsque l'on sait que les dépenses militaires mondiales, par exemple, se sont élevées à 2 400 milliards de dollars en 2023.

    Alors que les pays développés sont appelés à « prendre l'initiative » en la matière, Pékin avait tracé une ligne rouge sur ce point. La Chine n'aura aucune obligation de participer à ce financement. Une analyse des chiffres montre pourtant que les émissionsémissions historiques du pays ont désormais provoqué plus de réchauffement climatique que celles des 27 États membres de l'Union européenne réunis.

    Cap sur le Brésil et la COP30

    Les représentants des pays du monde ont d'ores et déjà rendez-vous dans un an, entre le 10 et le 21 novembre 2025, à Belém, au Brésil. Cette COP30 est annoncée comme celle qui doit marquer une intensification des ambitions en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serregaz à effet de serre. Et la proximité de la ville avec la forêt amazonienne pourrait en faire une COP tournée vers la nature.

    En attendant, le Brésil a rejoint le clan extrêmement fermé des pays ayant publié leur nouvelle « contribution déterminée au niveau national » à la lutte contre le réchauffement climatique. Dans le cadre de l'Accord de Paris sur le climatclimat, ces CDN doivent être mises à jour tous les cinq ans. Tous les pays doivent rendre la leur publique d'ici février 2025.

    Une réduction de ses émissions - par rapport à celles de 2005 - de 37 % d'ici 2025 et de 43 % d'ici 2030. C'était l'engagement qu'avait pris le Brésil en 2016. La nouvelle CDN vise une réduction d'au moins 59 % - voire moins 67 % - à l'horizon 2035. Parmi les moyens que le pays qui abrite 60 % de la forêt amazonienne compte mobiliser pour y arriver : la restauration des forêts. Le Brésil compte mettre un terme à la déforestationdéforestation. « Illégale », en tout cas. Et renforcer les travaux de restauration actuels ainsi que mettre en place des « incitations positives » supplémentaires pour maintenir les forêts et la végétation. Déjà, les taux de déforestation en Amazonie brésilienne ont diminué de presque un tiers entre 2023 et 2024.

    Autre levier que le Brésil va actionner : celui de la réduction de sa consommation de combustibles fossiles. Déjà près de 90 % de son mix électrique est décarboné (principalement grâce à l'hydroélectricitéhydroélectricité). Mais le pays compte électrifier plus d'usages et pour cela, déployer du solaire photovoltaïque et de l'éolien. La nouvelle CDN évoque aussi une place pour les biocarburantsbiocarburants et les technologies de capture et de stockage du carbonecarbone. Tout cela, toutefois, ne dit rien des plans d'expansion de la production de combustibles fossiles destinée à l'exportation. En 2023, un rapport mentionnait une volonté du pays d'augmenter la production de pétrole de 63 % et de gaz de 124 % d'ici 2032. Alors que le gouvernement continuait de financer l'exploration et la production.

    La CDN affirme cependant que « le Brésil accueillerait favorablement le lancement de travaux internationaux visant à définir des calendriers de transition vers l'abandon des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques, de manière juste, ordonnée et équitable ». Un engagement que plusieurs organisations non gouvernementales soulignent, le qualifiant même de « joyau caché » de la CDN brésilienne.