Si nous ne réagissons pas « immédiatement et de manière spectaculaire », nous allons mener notre monde à un réchauffement climatique de l’ordre de 3 °C. C’est ce que nous annonce le dernier rapport des experts de l’ONU à quelques jours de l’ouverture de la COP28.
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Ce vendredi 17 novembre 2023, notre planète a franchi, pour la toute première fois depuis le début des mesures, le seuil des 2 °C de réchauffement climatique. Celui mentionné dans l'Accord de Paris sur le climat comme celui sous lequel nous ambitionnons de rester « largement ».
Un choc. Mais pas réellement une surprise. Car nous continuons inlassablement d'émettre des gaz à effet de serre (GES). Et il y a quelques jours, l'Organisation météorologique mondiale (OMM) le confirmait : la concentration en dioxyde de carbone (CO2), en méthane (CH4) et en protoxyde d'azoteprotoxyde d'azote (N2O) dans notre atmosphère n'a jamais été aussi importante.
Aujourd'hui, c'est le Programme des Nations unies pour l'environnementProgramme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) qui, dans son rapport annuel sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions, tire une fois de plus la sonnettesonnette d'alarme. Même si les pays respectent les engagements qu'ils ont pris dans le cadre de l'Accord de Paris, notre monde apparaît en effet sur la voie d'un réchauffement climatique anthropique compris entre +2,5 et +2,9 °C par rapport aux moyennes préindustrielles. C'est bien au-delà, donc du désormais fameux +1,5 °C initialement visé. Déjà, d'ailleurs, au début de ce mois d'octobre 2023, notre Planète avait connu pas moins de 86 jours au-delà de ce seuil !
La tendance est à un réchauffement climatique de l’ordre de 3 °C !
S'exprimant à l'occasion de la publication par l'Unep de son rapport annuel sur l'écart entre les besoins et les perspectives en matièrematière de réduction des émissionsémissions, António Guterres, le secrétaire général des Nations unies n'hésitait plus à parler non pas d'« écart », mais de « canyon d'émissions, un canyon jonché de promesses non tenues, de records battus et de vies brisées. » Et pour ceux qui seraient tentés d'estimer sa réaction exagérée, une très récente étude montre que plus de 70 000 décès sont imputables à la chaleurchaleur de l'été 2022. Rien qu'Europe.
Pour mettre d'autres chiffres sur les mots, les experts rapportent qu'entre 2021 et 2022, nos émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 1,2 %. Elles ont ainsi atteint un nouveau niveau record de 57,4 gigatonnes d'équivalent CO2 (GtCO2eq). Ainsi, pour maintenir la température mondiale dans la limite définie par l'Accord de Paris de +1,5 °C de réchauffement, il faudrait que nous nous entendions pour rehausser nos objectifs de réduction de nos émissions de 22 GtCO2eq d'ici 2030. Cela revient à une baisse nécessaire de 42 % !
Rester sous la barre des 1,5 °C de réchauffement climatique
Les experts de l'Unep expliquent qu'il reste physiquement possible de maintenir le réchauffement climatique sous la barre des +1,5 °C. Mais que dans la réalité, aucun pays du G20, par exemple, ne réduit ses émissions à un rythme compatible avec les ambitions de zéro émission nette. Résultat, la probabilité de tenir l'objectif de l'Accord de Paris n'est plus que de 14 %. Dans le scénario le plus optimiste.
Mickaël Mann, climatologueclimatologue à l'université de Pennsylvanie (États-Unis), lui, veut continuer d'y croire. « La fenêtrefenêtre d'opportunités se réduit et il est urgent de faire baisser nos émissions. Mais le réchauffement planétaire peut TOUJOURS être maintenu en dessous de 1,5 °C », assure-t-il sur X. Notamment parce qu'une étude scientifique publiée il y a quelques jours seulement montre que, pour les 50 prochaines années au moins, si nous arrêtons d'émettre des gaz à effet de serre, le réchauffement s'arrêtera. Même si les calottes glaciairescalottes glaciaires continueront probablement de fondre et que le niveau de la mer continuer d'augmenter. « Et que nous aurons peut-être l'une ou l'autre mauvaise surprise. » Arrêter d'émettre du CO2 reviendra à arrêter le réchauffement. Voilà au moins une nouvelle porteuse d'espoir.
Le budget carbone s’épuise, mais l’espoir demeure
Un espoir qu'il ne tient qu'à nous de transformer en réalité. « Il faut pour cela prendre dès maintenant des mesures spectaculaires. Nous savons que c'est encore possible en nous attaquant à l'origine néfaste de la crise climatique : les combustibles fossiles », rappelle António Guterres. Car le rapport sur l'écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions le souligne une fois de plus : le charboncharbon, le pétrolepétrole et le gaz extraits au cours de la duréedurée de vie des mines et des champs en exploitation ou en projet émettraient plus de 3,5 fois le budget carbone disponible pour limiter le réchauffement à +1,5 °C, et même la quasi-totalité du budget disponible pour +2 °C.
Les scientifiques préviennent aussi qu'espérer, pour compenser ces émissions, atteindre des niveaux élevés d'élimination du CO2 reste « incertain et associé à des risques ». Les conditions pour un déploiement à grande échelle pourraient en effet ne pas être réunies à temps.
C'est pour cette raison aussi que les experts de l'Unep appellent par ailleurs à une transition juste et équitable vers les énergies renouvelables. À quelques jours seulement de l'ouverture à Dubaï de la 28e Conférence des parties signataires de la Convention-Cadre de l'Organisation des Nations unies sur les changements climatiques -- celle que l'on nomme communément la COP28 --, ils demandent aux pays du G20, en particulier, à la fois de prendre des mesures plus ambitieuses et plus rapides et de soutenir financièrement et techniquement, les pays en développement. D'autant qu'une nouvelle étude menée par Oxfam International confirme aujourd'hui que le 1 % le plus riche de la population mondiale est responsable de la même quantité d'émissions de carbone que les deux tiers les plus pauvres de la planète. Chez nous, en France, les 1 % les plus riches émettent autant de carbone en un an que les 50 % les plus pauvres en 10 ans. Et Bernard Arnault, l'homme le plus riche de notre pays, a une empreinte carbone 1 270 fois supérieure à celle du Français moyen. Hors celle de ses investissements...