Depuis quelques années, la mer de Glace est devenue le symbole du réchauffement climatique en France : celle qui était avant une immense étendue blanche, et une visite incontournable pour tous les touristes en Haute-Savoie, ressemble désormais à une autoroute de gravats.


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    Le glacier existe toujours, mais il n'est en fait pas visible par les visiteurs. Contrairement à ce que les dernières photos, terriblement grises, postées par les internautes laissent penser, la mer de Glace est toujours un glacier, comme le précise Christian Vincent, ingénieur de recherche spécialisé dans l'étude de l'impact du réchauffement climatique sur les glaciers, pour l'IGEIGE (Institut des Géosciences de l'Environnement). « Ce que l'on voit de la gare du Montenvers n'est que la langue terminale. Le glacier fait 13 kilomètres de long environ. Il y a encore beaucoup de glace au glacier de la mer de Glace (dans son ensemble) même si la langue terminale est couverte de débris rocheux. Par endroits, il y a encore 350 mètres d'épaisseur de glace. »

    Les dernières images donneraient-elles un tableau plus sombre que la réalité ? Elles ne reflètent pas l'intégralité du glacier, mais l'évolution de ce glacier emblématique reste très pessimiste : « depuis le début du XXe siècle, les glaciers d'Argentière et de la mer de Glace ont perdu respectivement 34 et 45 mètres équivalent en eau, soit 38 et 50 mètres d'épaisseur de glace, en moyenne sur toute leur surface. Ces pertes représentent respectivement 25 et 32 % de leurs épaisseurs moyennes depuis le début du XXe siècle », explique le chercheur dans une étude publiée dans La Météorologie.

    Cette fontefonte n'est pas linéaire, et subit des à-coups : il y a des « années qualifiées d'extrêmes, comme ce fut le cas en 2003, en 2015, ou en 2019. Cependant, c'est réellement l’année 2022 qui sera dorénavant classée comme l'année record pour les pertes de massemasse les plus déficitaires sur les glaciers ».

    Au moins 80 % de la mer de Glace va disparaître

    À ce rythme, les jours de ce glacier français sont comptés. Les simulations climatiquessimulations climatiques effectuées par le chercheur ont montré que « dans les prochaines décennies, il est projeté que le glacier de la mer de Glace se scinde en deux, laissant une zone de glace stagnante à l'aval de cette rupture de pente », précise l'étude. « La fonte de cette glace devrait nécessiter plusieurs décennies, tandis que le front du glacier va continuer à reculer vers des altitudes plus élevées. » 

    Pour un scénario climatique intermédiaire, avec un effort effectué en faveur du climat, et donc une réduction des émissionsémissions de gaz à effet de serre avant la fin du siècle, les simulations indiquent que la surface de la mer de Glace pourrait tout de même diminuer de 80 % selon Christian Vincent. Et dans l'hypothèse la plus pessimiste d'une croissance ininterrompue des émissions de gaz à effet de serre (malheureusement probable au vu de la trajectoire actuelle), la Mer de Glace pourrait disparaître dans sa quasi-totalité entre 2090 et 2100. « La zone d'équilibre se situerait vers 3 500 mètres au cours de la dernière décennie de ce siècle. Dans cette hypothèse, excepté les plus hautes pentes du Mont-Blanc du Tacul, la zone d'accumulation serait réduite à néant. »