La lutte contre le réchauffement climatique s’est longtemps concentrée sur une réduction de nos émissions de dioxyde de carbone (CO2). Mais un autre gaz à effet de serre menace de nous faire franchir un seuil difficilement tolérable : le méthane (CH4). Et ses émissions ont explosé.
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Le méthane (CH4), rappelons-le, c'est un gaz à effet de serre. Comme le dioxyde de carbone (C02), mais avec un pouvoir réchauffant largement plus important. Notamment pendant les vingt années qui suivent sa libération. Et il n'y en a pas eu autant dans notre atmosphère depuis au moins 800 000 ans ! La concentration de méthane dans l'airair a même été multipliée par presque trois depuis l'ère préindustrielle. Résultat, les scientifiques estiment que ce gazgaz-là est responsable d'environ 30 % du réchauffement climatique. C'est pourquoi plus de 150 pays se sont déjà engagés. En signant le Global Methane Pledge, ils ont promis de réduire leurs émissionsémissions de méthane de 30 % avant la fin de la décennie.
Mais le Global Methane Budget 2024 dont un résumé est publié dans les Environmental Research Letters par les chercheurs du Global Carbon Project montrent que les émissions mondiales de méthane au cours des cinq dernières années ont encore augmenté plus rapidement que jamais auparavant. « À l'heure actuelle, nos objectifs semblent aussi lointains qu'une oasis dans le désert, estime Rob Jackson, président du Global Carbon Project à l'université de Stanford (États-Unis). Nous espérons tous qu'ils ne sont pas un mirage. »
Les émissions de méthane de l’industrie des combustibles fossiles, de l’agriculture et des déchets
Il existe certes des sources naturelles de méthane. Les zones humides en sont un bel exemple. Mais ce sont bel et bien les émissions humaines qui ont augmenté de manière démesurée. De 20 % en 20 ans. Jusqu'à représenter aujourd'hui deux tiers des émissions de méthane dans notre atmosphère. Et 0,5 °C de réchauffement.
Les chercheurs attribuent cette hausse principalement à l'industrie des combustibles fossiles, à l'agriculture et à la gestion des déchetsdéchets. Plus précisément, à l'extraction du charboncharbon - dont la combustioncombustion est par ailleurs fortement émettrice de CO2 -, à la production et de l'utilisation de pétrolepétrole et de gaz fossilefossile - eux aussi émetteurs de CO2 -, à l'élevage de bovins et de moutons ainsi qu'à la décomposition des aliments et des déchets organiques dans les décharges. L'étude précise que pour chaque tonne de méthane émise par le secteur de l'énergieénergie, deux tonnes de CH4 sont émises par l'agriculture et les déchets.
Le saviez-vous ?
En 2020, notre atmosphère a cumulé deux fois la quantité de méthane moyenne ajoutée chaque année au cours de la décennie 2010. Les chercheurs y voient un effet pervers des mesures de confinement liées à la pandémie de Covid-19. Celles-ci ont, en effet, par exemple, mené à une réduction des émissions d’oxydes d’azote, les fameux NOx. Or les NOx empêchent une partie du méthane de s’accumuler dans notre atmosphère.
Il n'y a guère qu'en Europe que les émissions provenant des activités humaines ont baissé. Peut-être aussi en Australie. En revanche, elles ont explosé en Chine et dans l'Asie du Sud-Est.
Des sources de méthane pas si naturelles que ça
Ce qui change dans cette dernière évaluation de nos émissions de méthane, c'est que les scientifiques y ont inclus des émissions jusqu'ici considérées comme naturelles. Celles de certains lacs, par exemple. Les lacs artificiels. Parce que ces derniers sont responsables de l'émission d'environ 30 millions de tonnes de méthane par an. Le résultat de la décomposition de la matièrematière organique submergée. « Les émissions des réservoirs derrière les barrages sont tout autant une source humaine directe que les émissions de méthane d'une vachevache ou d'un champ de pétrole et de gaz », assure Rob Jackson. Ainsi les scientifiques estiment qu'environ un tiers des émissions de méthane des zones humides et des eaux douces au cours des dernières années ont été influencées par des facteurs d'origine humaine.
Rappelons en conclusion que pour être dans les clous des objectifs climatiques fixés par l'Accord de Paris, les émissions de méthane devraient diminuer de 45 % d'ici 2050 par rapport à celle de 2019. Et que des solutions parfois assez simples existent. Parmi lesquelles, la détection et la réparation des fuites, la récupération des gaz évacués et l'amélioration des pratiques de gestion des déchets. Dans le domaine de l'agriculture aussi, des mesures peuvent aider à limiter les émissions de méthane. Comme un changement dans l'alimentation du bétail ou l'amélioration de la gestion du fumier.