C’est la fin d’une longue controverse en paléontologie. Le réexamen d’un fossile trouvé en 1995 démontre que les grenouilles et les salamandres dérivent d’un ancêtre commun bien plus récent qu'on ne le pensait. Etonnamment, la période mise en évidence pour la séparation de ces deux groupes de batraciens diffère nettement de ce que semblaient indiquer les données moléculaires.

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    Corps de salamandre et tête de grenouille : Gerobatrachus hottoni en balade au Permien. Crédit : université de Calgary

    Corps de salamandre et tête de grenouille : Gerobatrachus hottoni en balade au Permien. Crédit : université de Calgary

    Les paléontologuespaléontologues sont heureux, en particulier Jason Anderson, professeur assistant à la  Faculté de médecine vétérinairevétérinaire de l'Université de Calgary. Ils tiennent maintenant le chaînon manquantchaînon manquant établissant un lien indiscutable entre les grenouilles et les crapauds d'une part (c'est-à-dire les anoures) et les salamandres et les tritonstritons d'autre part (les urodèles).

    Ces batraciensbatraciens diffèrent par leur apparence et leurs modes de vie. Très inféodés au milieu aquatique, les urodèles ont un corps allongé, une longue queue et quatre petites pattes. Les anoures (étymologiquement sans queue) se reconnaissent immédiatement à leurs longues pattes arrière. Spectaculaire, la métamorphose transforme une larve ressemblant à un poisson, avec des branchies, en un animal à poumonspoumons. Les anoures ont su s'éloigner du milieu aquatique, avec des stratégies variées. Certaines espèces de crapaud ont même inventé la viviparitéviviparité...

    De telles différences incitent à éloigner ces deux groupes et les données génétiquesgénétiques (l'horloge moléculairehorloge moléculaire) plaident d'ailleurs pour une séparationséparation assez ancienne. Il est même possible que les urodèles ne constituent pas un groupe homogène. Bref, les premiers conquérants vertébrésvertébrés des terresterres émergées conservent encore bien des mystères...

    Le fossile <em>Gerobatrachus hottoni</em> tenu par Jason Anderson. Crédit : <em>University of Calgary</em>

    Le fossile Gerobatrachus hottoni tenu par Jason Anderson. Crédit : University of Calgary

    C'est en réexaminant un fossilefossile trouvé au Texas en 1995 par Peter Kroehler ,  lors d'une campagne de fouille organisée par la Smithsonian Institution, que Jason Anderson et ses collègues ont réalisé que le petit fossile découvert alors avait de nombreux points communs avec à la fois les salamandres et les grenouilles.

    Le crânecrâne, la colonne vertébralecolonne vertébrale et des dents de Gerobatrachus hottoni (baptisé ainsi en l'honneur de Nicholas Hotton) sont un mélange de caractéristiques appartenant aux anoures et aux urodèles. Notamment, le fossile possède deux os de la chevillecheville fusionnés, une caractéristique des urodèles, mais un crâne léger et large, similaire à celui d'un anoure.

    Gros plan sur <em>Gerobatrachus hottoni</em>. Crédit : <em>University of Calgary</em>

    Gros plan sur Gerobatrachus hottoni. Crédit : University of Calgary

    Il n'est pas sûr que les grenouilles, les crapauds, les salamandres et les tritons dérivent précisément du Gerobatrachus hottoni mais en tout cas ce dernier doit être étroitement apparenté à leur ancêtre, un batracien du groupe des temnospondyles. La découverte permet ainsi aux chercheurs de corriger les estimations sur la date de la séparation des deux groupes, jusque-là basées sur les horloges moléculaires. Elle serait bien plus récente que ce que l'on pensait. Ils l'estiment maintenant à une période située quelque part entre 240 et 275 millions d'années. Gerobatrachus, lui, vivait au PermienPermien, il y a 290 millions d'années.