Une espèce fossile précédemment considérée comme un radiodonte, un prédateur nectonique du Cambrien, vient d'être réanalysée. Sa morphologie permet à des paléontologues de la classer parmi les opabiniidés, dont le dernier spécimen a été découvert il y a plus d'un siècle.


au sommaire


    Une espèce fossile ayant un nom est-elle nécessairement bien connue ? Si la question se pose, la réponse qui y fait suite est certainement non. Certaines espèces aujourd'hui disparues sont par exemple des ichnoespèces, c'est-à-dire des espèces définies non par leurs restes mais par les traces qu'elles ont laissées derrière elles. Il peut s'agir de terriers, d'empreintes générées par la locomotion ou de coprolithes qui sont des fècesfèces fossilisées. La classification phylogénétiquephylogénétique d'autres groupes demeure également incertaine, c'est notamment le cas des conodontes qui sont des organismes aquatiques vermiformes et pour lesquels l'appartenance au cladeclade des vertébrés est toujours débattue.

    Le groupe des opabiniidés ne comprenait, jusqu'à récemment, qu'une seule espèce nommée Opabinia regalis

    Ce groupe n'est pas le seul dont la classification suscite des interrogations chez les paléontologuespaléontologues, c'est en effet aussi le cas du groupe des opabiniidés. Ce groupe d'euarthropodes (myriapodes, chélicérates et pancrustacés, y compris les insectesinsectes) ne comprenait, jusqu'à récemment, qu'une seule espèce nommée Opabinia regalis, qui possédait cinq yeux pédonculés et un proboscisproboscis. Cette espèce a été identifiée dans les schistes de Burgess situés dans le parc national Yoho au Canada. Ces schistesschistes sont datés du CambrienCambrien, il y a 508 millions d'années et ont été découverts, ainsi que la faunefaune fossile qui s'y trouvait, en 1909.

    Vers une segmentation et des appendices ?

    Les auteurs d'une nouvelle étude parue dans le journal Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences réévaluent la description d'un spécimen fossilefossile auparavant classé aux côtés d'Anomalocaris, parmi les radiodontes anomalocarididés. Ce fossile provient de la formation de Drumian Wheeler dans l'Utah et date du Cambrien et plus précisément du Drumien (entre il y a 500,5 et 504,5 millions d'années).

    <em>Anomalocaris</em> était un prédateur qui chassait à proximité du fond des mers, au Cambrien. © anibal, Adobe Stock
    Anomalocaris était un prédateur qui chassait à proximité du fond des mers, au Cambrien. © anibal, Adobe Stock

    Cette espèce est nommée Utaurora comosa par les auteurs, en référence à l'État américain de laquelle elle provient. Le terme « auroraaurora » est inspiré du nom de la déesse romaine de l'aurore qui a transformé son amant en cigale, un euarthropode. U. comosa est à présent classée par les auteurs parmi les opabiniidés, notamment en raison de la présence de son proboscis.

    Comparaison des morphologies d'<em>Opabinia regalis</em> (a) et d'<em>Utaurora comosa</em> (b). (c), dessin d'interprétation de (b). © Pates et al, 2022
    Comparaison des morphologies d'Opabinia regalis (a) et d'Utaurora comosa (b). (c), dessin d'interprétation de (b). © Pates et al, 2022

    La révision de la classification phylogénétique de cette espèce est importante car il s'agit de la seconde espèce classée parmi les opabiniidés, qui est le premier groupe à présenter une bouche orientée vers l'arrière. Par ailleurs, les sillons dorsaux que présentent ces organismes (13 à 15 segments chez U. comosa et 15 chez O. regalis) sont supposés être les précurseurs d'une segmentation complète du corps alors que les extensions latérales servant à la nage seraient des précurseurs d'appendices.