La découverte de nombreux crânes d’animaux dans une grotte suggère que Néandertal collectionnait les trophées de chasse, peut-être dans un but symbolique. Une pratique culturelle qui se serait transmise sur de nombreuses générations.


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    De nombreuses grottes et abris sous roche en Europe témoignent de la présence passée de nos ancêtres préhistoriques, qu'il s'agisse d’Homo sapiens ou de Néandertal. Parmi les traces laissées par ces groupes, les ossements d'animaux permettent souvent de reconstituer leur régime alimentaire et leurs pratiques de chasse. Mais, en explorant une grotte située dans la région de Madrid, en Espagne, un groupe de scientifiques a fait une bien étrange découverte.

    Une inhabituelle concentration de crânes possédant des cornes

    La grotte de Des-Cubierta, découverte en 1978 et déjà bien connue pour son occupation par NéandertalNéandertal il y a plus de 40 000 ans, a révélé de nouveaux secrets. Les chercheurs ont en effet mis au jour de nombreux ossements d'animaux, et en particulier des crânescrânes d'herbivores. Si la présence de restes d'animaux n'est pas surprenante pour une grotte ayant été habitée, c'est la grande quantité de crânes qui a immédiatement intrigué les scientifiques. La grotte est en effet jonchée de 35 crânes de bisons, d'aurochs, mais également de rhinocéros et de cerfs. Tous sont particulièrement imposants et possèdent des cornes ou des bois de grandes tailles. La mâchoire inférieure est généralement manquante, ainsi que les dents.

    Crâne de rhinocéros trouvé sur le site de Des-Cubierta en Espagne. © Baquedano et al. 2023, <em>Nature human behaviour</em>, CC by-sa 4.0
    Crâne de rhinocéros trouvé sur le site de Des-Cubierta en Espagne. © Baquedano et al. 2023, Nature human behaviour, CC by-sa 4.0

    Pour les scientifiques, il est très peu probable qu'il s'agisse là de restes de repas. L'analyse des crânes montre qu'ils ont été très soigneusement détachés du corps et nettoyé. De nombreuses marques de coupure et de chocs à l'aide d'objets tranchants sont en effet visibles et témoignent notamment de l'extraction de la cervelle. Étant donné la taille imposante de ces animaux, ce travail de préparation a forcément été réalisé à l'extérieur, avant que les crânes ne soient entreposés à l'intérieur de la grotte. Une pratique inhabituelle, les crânes des herbivores tués à la chasse, lourds à transporter et ne présentant aucun intérêt nutritionnel, étant généralement abandonnés sur place.

    Une pratique culturelle transmise sur de nombreuses générations

    L'assemblage de crânes retrouvé dans la grotte de Des-Cubierta suggère donc que leur présence est liée à une activité symbolique ou rituelle, comme la confection de trophées, la grotte ayant certainement servi de sanctuaire de chasse. Cette pratique se serait d'ailleurs perpétuée sur ce site pendant plusieurs siècles, suggérant la transmission d’une pratique culturelle de génération en génération.

    Cette découverte, détaillée dans un article publié dans Nature Human Behaviour, met en lumièrelumière le comportement culturel des Néandertaliens et le symbolisme attaché aux grands herbivores.