Il y a environ 66 millions d’années, l’impact d’un astéroïde, avec les éventuels effets conjugués de forts épisodes volcaniques, aurait mené à l’extinction de la majeure partie des espèces vivantes, notamment via d’importantes variations climatiques. Une équipe de géologues pointe du doigt l’effet probablement sous-estimé d’éléments sulfurés dans l’atmosphère terrestre sur son climat ; ils avancent également que ces variations du cycle du soufre auraient été causées par l’impact, réduisant le rôle éventuel du volcanisme dans le processus d’extinction de masse.


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    Il y a environ 66 millions d'années, à la fin du Crétacé, est survenu un cataclysme à l'origine de la disparition de la majeure partie des espèces terrestres (dont les dinosaures), et de près des trois quarts des espèces marines : c'est l’extinction Crétacé-Paléogène (notée K-Pg), dont les causes ne sont encore pas tout à fait cernées. Les théories scientifiques s'accordent en général à dire que cette extinction aurait été le résultat des effets conjugués d'un impact météoritique et d'importants épisodes volcaniques : la datation du cratère de Chicxulub (situé au Mexique), et celle de roches formées par une activité volcanique massive dans les trapps du Deccan (Inde), pourraient coïncider avec l'épisode d'extinction. Ces évènements auraient causé d'abruptes variations climatiques à l'échelle terrestre, si rapides que les espèces vivantes n'auraient pas pu s'y adapter.

    Bien que ces évènements d'impact et d'activités volcaniques massives aient bien été identifiés, leur influence et leur effet réels sur le climat sont encore mal contraints. Dans une nouvelle étude, publiée dans Pnas, une équipe de scientifiques établit le rôle prépondérant de la déstabilisation du cycle du soufresoufre à cette période sur les fortes variations climatiques.

    La limite K-Pg, une archive géologique précieuse

    Bien que les impacts avec d'autres corps célestes fassent partie intégrante de l'histoire de notre Planète, les archives géologiques en résultant peuvent être avares en informations. C'est ce qui contribue à rendre l'impact de ChicxulubChicxulub unique : il a laissé derrière lui un mince dépôt de sédiments, appelé limite K-Pg, fréquemment représenté par une fine couche d'argileargile enrichie en iridiumiridium, et que l'on retrouve dans le monde entier, aussi bien dans les environnements terrestres que marins, marquant ainsi l'échelle mondiale des conséquences de l'impact.  

    Affleurement contenant la limite K-Pg, localisée dans un affluent de la rivière Brazos, au Texas. © James Witts
    Affleurement contenant la limite K-Pg, localisée dans un affluent de la rivière Brazos, au Texas. © James Witts

    L'équipe de géologuesgéologues a ainsi relevé plusieurs échantillons le long de la rivière Brazos au Texas, dans les couches de roches qui auraient enregistré les conséquences immédiates de l'impact de Chicxulub. Grâce à de nouvelles méthodes d'analyses, l'équipe a été en mesure de détecter dans ces échantillons des signatures géochimiques -- un fractionnement isotopique du soufre indépendant de la massemasse, caractérisé par une différence de comportement entre divers isotopesisotopes d'une même espèce chimiqueespèce chimique --, mais également dans des échantillons ultérieurs à la limite K-Pg : d'après les scientifiques, ce serait la preuve que d'importantes quantités de soufre aient été injectées jusque dans les couches supérieures de l'atmosphèreatmosphère

    Déstabilisation du cycle du soufre et du climat

    D'après les scientifiques, ces signatures géochimiques nécessitent des quantités massives d'aérosolsaérosols sulfatés dans la stratosphèrestratosphère (où ils auraient un temps de résidence plus élevé que dans les couches sous-jacentes), qui se seraient ensuite progressivement redéposés sous la forme de pluies acidesacides. D'après eux, ces aérosols pourraient avoir plusieurs origines : ils pourraient être le résultat de la photolysephotolyse de dioxyde de soufre dans l'atmosphère, lui-même provenant de l'éjection de la roche impactée (riche en gypsegypse, minéralminéral de sulfate hydraté) ; une autre origine pourrait être la combustioncombustion de la biomassebiomasse en conséquence de l'impact, émettant d'importantes quantités d'oxysulfure de carbonecarbone (COS). Dans les deux cas, ces gazgaz sont destinés à être oxydés dans l'atmosphère en aérosols sulfatés.

    L'étude souligne ainsi le rôle prépondérant du soufre dans les variations climatiques de la fin du Crétacé, et surtout son impact sur de longues échelles de temps après l'impact. Elle contribue également à mieux contraindre le rôle du volcanismevolcanisme dans les trapps du Deccantrapps du Deccan dans cette extinction : selon les chercheurs, les marqueurs géologiques de cette activité volcanique prennent place quelques centaines de milliers d'années avant et après le phénomène d'extinction. Ce faisant, les scientifiques avancent que l'impact de Chicxulub aurait été l'évènement déclencheur de l'extinction du Crétacé-PaléogènePaléogène, avec la contribution éventuelle d'épisodes volcaniques.