au sommaire
Les oiseaux modernes ont des plumes, des os creux et un cerveaucerveau particulièrement volumineux en regard de leur taille. Pendant longtemps, ces trois paramètres ont uniquement été associés à ces vertébrés et à leurs ancêtres. Mais les choses ont changé depuis une vingtaine d'années. En 1996, le monde a fait la connaissance du Sinosauropteryx, un dinosaure non aviaire portant des plumes. Plus tard, nous avons appris que le Tyrannosaurus rex, comme d'autres théropodes, avait des os creux. Ainsi, les oiseaux ont été dépossédés de l'exclusivité de deux de leurs caractères. À la suite d'un article paru dans la revue Nature, une troisième vient de leur être arrachée !
Le volumevolume du cerveau des oiseaux, qui résulte principalement d'un important développement du prosencéphale, leur aurait permis d'acquérir l'acuité visuelleacuité visuelle et la coordination des mouvementsmouvements requises pour le vol. Selon les théories actuelles, l'archéoptéryx devait lui aussi posséder des régions cérébrales spécialisées dans le vol, et donc avoir un cerveau relativement plus volumineux que celui des dinosaures non aviaires. Et pour cause : il est considéré comme l'un des tout premiers oiseaux.
Selon les résultats d'Amy Balanoff du Muséum américain d'histoire naturelle (AMNH) et de ses collaborateurs, cette théorie n'aurait plus de raison d'être. En effet, des cerveaux plus volumineux que celui d'Archaeopteryx lithographica ont été trouvés chez des dinosaures non aviaires. Quel changement ces découvertes apportent-elles ?
Reconstitution tridimensionnelle du crâne (structure transparente) et du cerveau (éléments opaques) d’un Zanabazar, un dinosaure non aviaire de la famille des troödontidés. La zone orange correspond au bulbe olfactif, la verte au télencéphale, la rose aux lobes optiques, la bleue au cervelet, et enfin la jaune au tronc cérébral. © Amy Balanoff, AMNH
Des dinosaures prêts pour le vol avant les oiseaux
Au cours de l'étude, 24 crânescrânes de dinosaures non aviaires, d'archéoptéryx et d'oiseaux modernes ont été numérisés à l'aide d'un CT-scan haute définition. Les images ont ensuite été assemblées de manière à former un modèle tridimensionnel de chaque boîte crânienne. Il ne restait plus alors qu'à prendre des mesures de volume, ou autres. Grâce à la qualité des crânes virtuels, le bulbe olfactif, le cerveletcervelet, les lobes optiques, le télencéphale et le tronc cérébraltronc cérébral de chaque espèce ont été caractérisés avec précision, grâce aux empreintes laissées dans l'os. Le but de cette opération : suivre l'évolution du cerveau dans ses moindres détails, car sa taille ne fait pas tout.
Concrètement, des oviraptosaures et des déinonychosauresdéinonychosaures, deux dinosaures bipèdes pourvus de plumes, ont présenté des cerveaux dont la taille relative surclasse celle mesurée chez Archaeopteryx lithographicaArchaeopteryx lithographica. Ce résultat suggère deux informations d'importance. Premièrement, l'encéphalisation observée chez les oiseaux est apparue plusieurs fois au cours de l'évolution, dans des groupes différents. Deuxièmement, comme l'archéoptéryx, les dinosaures non aviaires cités possédaient eux aussi les capacités neuronales requises pour le vol, avant l'apparition des oiseaux.
Cette information tombe à pic car dernièrement, plusieurs études ont montré que des maniraptors autres que les oiseaux volaient aussi. Enfin, signalons qu'une empreinte trahissant peut-être la présence d'un wulst, l'équivalent du cortexcortex des mammifèresmammifères, aurait été trouvée chez l'archéoptéryx, mais pas chez les reptilesreptiles non aviaires. Or, chez les oiseaux modernes, cette structure anatomique intervient dans le contrôle moteur et dans le traitement des informations. Dans la suite de leurs travaux, les chercheurs vont tenter d'en apprendre plus sur l'apparition et le développement de cet organe.