au sommaire
Quand a-t-on commencé à mettre des épices dans nos plats ? Le commerce du poivre et de la cannelle s'est développé au Moyen-Orient environ 2.000 avant J.-C. Néanmoins, quelques découvertes de macrofossiles laissent penser que voilà 5.000 ans, on utilisait déjà du pavot à opium. Dans une nouvelle étude parue dans la revue Plos One, une équipe européenne avance qu'au Danemark et en Allemagne, les Hommes agrémentaient leurs plats d'épices il y a déjà 6.000 ans.
Les Hommes du Néolithique utilisaient semble-t-il de l'alliaire officinale (Alliaria petiolata) pour relever leur nourriture. Les graines de cette plante, aussi nommée herbe à ail, servent à fabriquer la moutarde. Il est presque certain que nos ancêtres utilisaient ces plantes par goût, car elles n'ont aucune valeur nutritionnelle.
Le commerce des épices a commencé 2.000 ans avant J.-C. au Moyen-Orient. C'est la volonté de contrôle des routes commerciales par l’Europe qui a poussé Vasco de Gama à partir en expédition vers l'Inde, à la fin du XVe siècle. © Yannickmorin, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0
Cette découverte est basée sur l'étude de phytolithes, des microfossilesmicrofossiles de plantes (partout où il y a eu une plante, il y a des phytolithes). Donc, les chercheurs se sont intéressés à des fragments de céramiquescéramiques carbonisés trouvés au Danemark et en Allemagne, pour y analyser la présence éventuelle de ce composé silicaté. Sur 74 échantillons, 26 disposaient de phytolithes, à l'aspect bien particulier. Ils avaient une forme globuleuse, une surface ridée et mesuraient en moyenne 7 micromètresmicromètres. L'équipe a alors passé en revue la forme de plus de 120 plantes européennes et asiatiques : les seules qui correspondaient étaient les herbes à ail.
Un plat agrémenté de moutarde vieux de plus de 6.000 ans
La datation au carbone de la matièrematière carbonisée dans le fragment de poterie révèle que le repas aurait été préparé entre 5.750 et 6.100 ans avant J.-C. En plus des phytolithes, l'équipe a découvert dans ce contenu carbonisé des résidus de graisse animale, ce qui renforce l'idée d'utilisation de la plante comme épice.
Toutes les plantes ne produisent pas forcément des phytolithes facilement distinguables. Mais celles des graines d'alliaire officinale sont si particulières qu'elles ne peuvent être confondues. Cette étude est la première à utiliser les microfossiles pour dater l'utilisation d'épices. La méthode pourrait être appliquée sur d'autres poteries, ustensiles de cuisine ou couverts plus anciens en vue de préciser à partir de quand l'Homme a-t-il attaché de l'importance au goût.
L'alliaire officinale se trouve dans une très vaste aire géographique. À ce jour, nous ne savons pas encore si son utilisation en tant qu'épice vient plutôt du nord de l'Europe, ou si cette pratique aurait été importée d'autres régions, comme le Proche-Orient. Cette découverte appuie l'idée qu'à la fin de l'âge de pierre, les Hommes ne mangeaient plus uniquement par nécessité, mais portaient une réelle attention au goût des aliments. La gastronomie était née.