Rien n’indique que les tricératops et les stégosaures descendaient du dinosaure que l’on vient de découvrir au Venezuela. Mais Laquintasaura venezuelae avait certainement un ancêtre commun avec eux puisqu’il s’agit d’un ornithischien. Il éclaire d’un jour nouveau l’histoire des premiers représentants de ce grand groupe de dinosaures en suggérant notamment qu’ils vivaient en troupeaux plus tôt qu’on ne le pensait.

Les dinosaures sont apparus voici environ 230 millions d'années, au cours du Trias. Ils survivront à l'extinction massive du Trias-Jurassique, ou extinction T-J. Cet événement qui a vu la diversité de la biosphère diminuer de moitié et qui s'est accompagné de la disparition d'environ 20 % des espèces marines, aura libéré des niches écologiques lesquelles auront permis l'explosion radiative des dinosaures. Il semble clair aujourd'hui qu'il a été causé par des changements climatiques rapides provoqués par les émissions de gaz issues des grandes éruptions volcaniques qui ont accompagné la fracturation de la Pangée, le supercontinent de l'époque.

On est encore loin de tout connaître sur le monde des dinosaures comme le montre une récente publication dans Proceedings of the Royal Society B. Les paléontologues y annoncent, en effet, la découverte des restes fossilisés d'un petit dinosaure âgé d'environ 200 millions d'années dans la formation géologique de La Quinta, dans les Andes vénézuéliennes, autrefois proche de l'équateur.

<em>Laquintasaura venezuelae</em> devait pouvoir se nourrir d'insectes et peut-être aussi de petites proies bien que son régime alimentaire était probablement herbivore. © Mark Witton

Laquintasaura venezuelae devait pouvoir se nourrir d'insectes et peut-être aussi de petites proies bien que son régime alimentaire était probablement herbivore. © Mark Witton

Les restes d’ornithischiens du Trias sont rares

L'animal n'a rien de spectaculaire. Il devait mesurer environ 1 m de long, pour une hauteur de 25 cm. Baptisé Laquintasaura venezuelae, il était probablement herbivore, cependant ses dents indiquent qu'à l'occasion, il ne devait pas dédaigner les insectes. Ce qui fait tout le prix de cette découverte est tout d'abord qu'il s'agit du premier dinosaure découvert dans le nord de l'Amérique du Sud. La présence de ses cousins en Argentine est, elle, attestée depuis longtemps. Ce n'est pas n'importe quel dinosaure puisqu'il s'agit d'un ornithischien, un célèbre groupe qui donnera naissance aux tricératops et aux stégosaures qui possèdent donc un ancêtre commun avec Laquintasaura venezuelae.

Quelques-uns des restes fossilisés de <em>Laquintasaura venezuelae </em>sont représentés sur ce schéma, ainsi que leurs places sur la reconstitution d'une partie de son squelette. © Paul Barrett <em>et al.</em>, <em>Proceedings of the Royal Society B</em>

Quelques-uns des restes fossilisés de Laquintasaura venezuelae sont représentés sur ce schéma, ainsi que leurs places sur la reconstitution d'une partie de son squelette. © Paul Barrett et al., Proceedings of the Royal Society B

Or nous connaissons peu d'ornithischiens au Trias (trois espèces au Trias supérieur), de même qu'au tout début du Jurassique. Ce sont surtout des membres du second groupe majeur, les saurischiens, qui nous sont connus de cette époque. Les restes de Laquintasaura venezuelae sont donc une nouvelle porte qui s'ouvre sur les premiers dinosaures et leur séparation en deux principaux groupes, ornithischiens et saurischiens. Les fossiles trouvés suggèrent que ces petits dinosaures vivaient en troupeaux. Si tel était bien le cas, il s'agit d'une découverte importante qui ferait reculer d'au moins 40 millions d'années dans le passé l'apparition de ce comportement social chez les dinosaures ornithischiens.

La découverte remet aussi en question la répartition géographique des ornithischiens. En effet, les paléontologues pensaient auparavant qu'ils ne vivaient que dans les régions de la Pangée des moyennes à hautes latitudes, celles proches de l'équateur paraissant inhospitalières. Visiblement, ils se trompaient.