La biodiversité océanique des micro-organismes végétaux, à la base des chaînes alimentaires des océans, était plus riche il y a 500 millions d'années et présentait une répartition spatiale différente. Une équipe de chercheurs pluridisciplinaire s'est attelée à en faire la cartographie.
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À très large échelle géographique (régionale à mondiale), la biodiversité présente des motifs d'organisation spatiale fondamentaux se retrouvant en milieux terrestres comme océaniques et chez la plupart des organismes, depuis les bactériesbactéries jusqu'aux grands mammifères. Parmi ces motifs dits « biogéographiques », le gradientgradient latitudinal de diversité (GLD), qui correspond à l'augmentation du nombre d'espèces des pôles vers l'équateur, est considéré comme le plus largement répandu sur Terre. Ce GLD est documenté chez un grand nombre d'espèces actuelles mais son origine, sa prépondérance dans le registre fossilefossile ainsi que ses mécanismes explicatifs restent largement débattus.
En associant l'étude de données fossiles et la modélisationmodélisation des climatsclimats anciens, une équipe de chercheurs -- dont certains issus du laboratoire Evolution, Ecologie et PaléontologiePaléontologie (EVO-ECO-Paleo - CNRS / Univ. Lille), du Laboratoire Paléontologie Évolution Paléoécosystèmes Paléoprimatologie (Palevoprim - CNRS / Univ Poitiers), du laboratoire Biogeosciences (BGS - CNRS - Comue UBFC) et du Laboratoire d'océanologie et de géosciences (LOG - CNRS / Univ. Littoral Côte d'OpaleOpale / Univ. Lille) -- a montré que les premiers représentants du phytoplancton -- les acritarches ‒ présentaient un gradient latitudinal de diversité dès l'apparition des principaux embranchementsembranchements d'animaux actuels au PaléozoïquePaléozoïque inférieur, il y a plus de 500 millions d'années (Fig. 2).
Le boom de la diversité marine dans la zone équatoriale
L'équipe a aussi mis en évidence dans ces travaux parus dans Science Advances d'importantes variations de ce GLD au cours du temps, notamment en réponse aux variations climatiques. Tandis que la première période (le Cambrien, -541 à -485.4 Ma) est caractérisée par un climat chaud avec des températures équatoriales trop élevées pour permettre à la vie de pleinement se diversifier, le refroidissement global observé à partir de la seconde période (l'OrdovicienOrdovicien, -485.4 à -443.8 Ma) s'accompagne d'une augmentation spectaculaire de la diversité marine et d'une colonisation de la zone équatoriale. Le GLD devient alors plus marqué et le pic maximum de diversité se rapproche de l'équateur (Fig. 2).
Mais ce gradient montre également une différence fondamentale avec ceux que l'on connaît aujourd'hui : il ne présente qu'un seul pic de diversité (on parle alors de gradient unimodal) situé aux moyennes latitudeslatitudes de l'hémisphère Sudhémisphère Sud, là où le maximum de diversité chez les espèces actuelles est classiquement situé à l'équateur ou se subdivise en deux pics centrés sur les basses/moyennes latitudes de chaque hémisphère (gradient bimodal).
L'utilisation d'un modèle de distribution spatiale de la biodiversité (Metal2) établi avec la paléogéographiepaléogéographie (Fig. 3) et le paléoclimat connus au Paléozoïque inférieur prédit pourtant un second pic dans l'hémisphère Nordhémisphère Nord. Ce modèle suggère que le GLD des acritarches observé grâce aux données fossiles correspondrait en fait à un gradient bimodal tronqué, dont le pic initialement situé dans l'hémisphère Nord ne peut plus être observé aujourd'hui. Cette absence de second pic dans cet hémisphère pourrait résulter d'une faible préservation des sédimentssédiments, et donc des fossiles qu'ils contiennent, dans cette zone alors essentiellement occupée par un immense océan appelé PanthalassaPanthalassa (Fig. 3). Mais le modèle Metal n'intègre pas certains paramètres indispensables à la survie du phytoplancton, comme par exemple la concentration en nutrimentsnutriments, liée à la proximité des continents. La faible diversité des acritarches observée dans l'hémisphère Nord pourrait donc également correspondre à un réel signal biologique reflétant une quantité limitée d'espace propice au développement du phytoplanctonphytoplancton dans cette zone géographique alors quasi exempte de continents (Fig. 3).