L’astéroïde qui a éradiqué les dinosaures de la surface de la planète il y a 66 millions d’années a peut-être eu un « avantage » : favoriser l’émergence de plantes qui ont ensuite donné naissance à la luxuriante forêt tropicale telle que nous la connaissons aujourd’hui.
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Il y a 66 millions d'années, au Crétacé, les forêts tropicales d'Amérique du Sud étaient constituées de couverts clairsemés dominés par des conifères et d'autres gymnospermes à graines. Les plantes à fleurs, ou angiospermes, qui représentent environ 80 % de notre flore moderne, étaient encore rares. Puis l'astéroïdeastéroïde tueur est arrivé, dévastant la moitié de toutes les espèces végétales terrestres. De ces cendres ont émergé de nouvelles plantes qui ont sans doute favorisé l'émergence des foisonnantes forêts tropicales modernes, suggère une nouvelle étude parue dans la revue Science.
Les chercheurs du Smithsonian Tropical Research Institute (STRI) au Panama ont analysé plus de 6.000 fossilesfossiles de feuilles et 50.000 fossiles de pollenpollen de Colombie afin de reconstituer la flore de la région entre 72 et 58 millions d'années, avant et après l'impact. Ils se sont notamment basés sur trois méthodes : densité des nervures de feuilles et rapport entre les isotopesisotopes de carbonecarbone, qui témoignent de leur degré d'exposition au soleilsoleil (et donc du type de couvert végétal), ainsi que les signes de dommages causés par les insectesinsectes, qui donnent une indication sur la biodiversitébiodiversité de la forêt.
“Six millions d’années après la destruction de la forêt par l’astéroïde, les plantes à fleurs représentaient 85 à 90 % de la diversité végétale en Colombie”
« Tous ces indices nous ont raconté la même histoire, relate Carlos Jaramillo, du Smithsonian Tropical Research Institute. À l’époque des dinosaures, le couvert était dominé par les conifères et d'autres gymnospermes à graines. Les membres du genre Araucariaceae, ancêtres du pin Kauri et du pin de l'île Norfolk d'aujourd'hui, étaient les plus communs. » Six millions d'années après la destruction de cette forêt par l'astéroïde, ces derniers avaient quasiment disparu et les plantes à fleurs représentaient 85 à 90 % de la diversité végétale en Colombie, ajoute-t-il.
Les plantes à fleurs fertilisées par les incendies de forêt
Mais pourquoi les plantes n'ont-elles pas repoussé à l'identique ? Les chercheurs avancent trois hypothèses.
- La disparition de dinosauresdinosaures, qui dévoraient la végétation et piétinaient les broussailles, a permis au feuillage de s'épanouir entre les arbresarbres.
- Les conifères, qui tiraient leur avantage de leur grande taille, n'avaient pas de représentants dans le sous-étage arbustif. Cette spécialisation les a rendus plus vulnérables lorsqu'il a fallu remplir les nouvelles niches écologiques.
- Les tsunamistsunamis survenus après l'impact et les feux de forêt ont apporté des sédimentssédiments riches en carbone et de débris qui ont fertilisé le sol. Cela aurait donné aux angiospermesangiospermes un avantage concurrentiel car ces derniers ont tendance à croître plus rapidement que les gymnospermes dans les sols riches en nutrimentsnutriments.
« Ces trois hypothèses ne s'excluent d'ailleurs pas mutuellement », fait remarquer Carlos Jaramillo.
Un scénario bis avec le réchauffement climatique ?
Selon les chercheurs, cette étude donne également un aperçu de ce qui pourrait advenir de la forêt tropicale à l'heure du changement climatiquechangement climatique. Environ 10 millions d'années après la fin du Crétacé, la TerreTerre a été inondée de CO2 et le monde a connu un réchauffement de 5 °C, un événement appelé maximum thermique du Paléocène-Éocènemaximum thermique du Paléocène-Éocène (PETM). Un scénario susceptible de se reproduire avec les gigantesques quantités de CO2 émises actuellement par les activités humaines. Mais quel est le problème, me direz-vous, puisque la flore s'est régénérée de façon plutôt favorable après la catastrophe ? Sauf qu'il a tout de même fallu six millions d'années à la végétation pour repartir. « Pouvons-nous nous permettre d'attendre aussi longtemps ? », questionne Peter Wilf, paléobotaniste de l'Université de Pennsylvanie interrogé par le Smithsonian magazine.