Dans notre bonne vieille Europe, les oiseaux se meurent. C’est la triste conclusion d’une étude scientifique d’une ampleur sans précédent. Mais il est encore possible de les sauver. Les chercheurs nous expliquent comment.
au sommaire
En 40 ans, le nombre d'oiseaux sur le continent européen a décliné de 25 %. C'est la première information choc qui ressort de la plus vaste et la plus complète étude du genre à ce jour qui vient tout juste d'être publiée. Depuis les années 1980, ce ne sont ainsi pas moins de 800 millions d'oiseaux qui ont disparu. La bagatelle de 20 millions par an !
La tendance avait déjà été soulignée par d'autres travaux. Et différentes raisons à ce déclin ont été mises en évidence. Comme une série de pressionspressions exercées par les activités humaines sur celui qui constitue le plus grand groupe de vertébrés terrestres. Mais les effets relatifs de ces pressions multiples sur la dynamique des populations d’oiseaux à grande échelle restaient flous.
Pour lever le voile, l'équipe dirigée par deux chercheurs du CNRS a travaillé sur 37 années de données recueillies sur 170 espèces d'oiseaux différentes, vivant sur 20 000 sites dans quelque 28 pays d'Europe. Tout simplement le jeu de données le plus complet jamais réuni. Et s'ils confirment que les oiseaux souffrent de l'urbanisation ou encore de la modification des surfaces forestières, ils font surtout ressortir deux responsables principaux du déclin des oiseaux en Europe : l'augmentation des températures et... l'agriculture intensive.
Une urgence à repenser notre agriculture
Les chercheurs notent ainsi d'abord que les espèces qui préfèrent le froid sont plus durement touchées. Elles contribuent à 40 % du déclin. Alors que les espèces qui apprécient particulièrement le chaud ne contribuent qu'à hauteur de 18 %. Mais l'étude montre, avant toute autre chose, un déclin fort chez les oiseaux des milieux agricoles. Plus de la moitié d'entre eux ont disparu. En cause, l'intensification de l'agriculture qui nuit aux populations d'oiseaux. Comment ? Parce que l'utilisation accrue d'engrais et de pesticidespesticides a tendance à perturber la chaîne alimentaire des écosystèmesécosystèmes. Faisant des oiseaux insectivoresinsectivores, les plus touchés de tous.
En France, la situation n'est pas meilleure. Notre pays est l'un de ceux où la surface agricole exploitée de manière intensive est la plus élevée. Mais peut-être surtout aussi, l'un de ceux où elle a le plus augmenté récemment. La température a également augmenté d'environ 1 °C entre 1996 et 2016. La surface artificialisée est, quant à elle, supérieure à la moyenne européenne. La couverture forestière, en revanche, apparaît inférieure à la moyenne européenne. Même si, depuis 1996, elle se place sur une tendance à l'accroissement. Résultat, le nombre d'oiseaux agricoles et forestiers a diminué respectivement de 43 % et de 19 %. Le nombre d'oiseaux nichant en milieu urbain a, quant à lui, augmenté de 9 %. Mais certaines espèces d'oiseaux sont plus menacées. Elles ont vu leur population chuter de manière spectaculaire. De pas moins de 75 % environ. C'est le cas du moineau friquet, du tarier des prés ou encore du pipit farlouse.
Les chercheurs voient dans ces chiffres une preuve de plus de la dégradation environnementale profonde en cours. Ils rappellent que les oiseaux sont l'une des pierres angulaires des écosystèmes. Ils régulent d'autres espèces, disséminent des graines et constituent le repas de quelques prédateurs. Pour éviter de mettre plus encore en péril un équilibre de plus en plus fragile, les chercheurs demandent à repenser d'urgence notre mode de production alimentaire.