au sommaire
Les organismes des grands fonds risquent d’être affectés par le changement climatique. Si le nombre d’espèces diminue en surface, il y a moins de résidus qui chutent vers les fonds marins, où certaines espèces risquent de manquer de nourriture. À l'image, une pieuvre à anneaux bleus (Hapalochlaena), vivant dans les profondeurs de l'océan Indopacifique. © Tom Weilenmann, Flickr, cc by nc nd 2.0
Menée conjointement par le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE) et le National Oceanography Centre, une étude montre que la biomasse des organismes peuplant les grands fonds océaniques déclinera au cours de ce siècle de près de 38 % dans l'Atlantique nord et d'environ 5 % à l'échelle de l'océan global. Cette diminution s'explique par une réduction des apports de nourriture depuis la surface de l'océan. Ces réductions de biomasse touchent notamment des régions de forte biodiversité, comme certains canyons et monts sous-marins. Les résultats de l'étude sont commentés dans la revue Global Change Biology.
Il est à craindre que ces changements bouleversent le fonctionnement de ces écosystèmes marins. Cette étude repose sur la dernière génération de modèles du climat, en particulier celui développé à l'institut Pierre-Simon LaplacePierre-Simon Laplace, pour évaluer les altérations du transport de nourriture depuis la surface vers le fond des océans. Des projections issues de simulations climatiquessimulations climatiques ont été combinées à des relations empiriques entre apports de nourriture et biomasse des fonds océaniques pour estimer leur évolution.
Ces illustrations montrent les variations de la biomasse benthique de 2006 à 2015 et de 2091 à 2100 pour le scénario climatique modéré (RCP 4.5). En haut, les changements prévus dans la biomasse pour différentes tailles de la faune benthique dans la série temporelle modélisée. Les planisphères montrent des variations, en pourcentage, de la biomasse benthique sur fond marin (mg.C.m-2). © Daniel Jones et al., Global Change Biology, 2013
Au fond de l’océan, de moins en moins de résidus
De nombreuses études climatiques suggèrent un ralentissement de la circulation océanique à grande échelle et une séparationséparation accentuée entre les massesmasses d'eau de température ou de salinitésalinité différentes -- appelée stratification -- en réponse à un climat plus chaud et plus humide dans les hautes latitudeslatitudes. Cette interaction entre le réchauffement et la circulation océanique modifie le cycle des sels nutritifs et conduit à une diminution des premiers maillons de la chaîne alimentaire océanique. Les ressources nutritives, constituées de résidus végétaux et animaux, qui chutent lentement au travers de la colonne d'eau de la surface vers le fond diminuent à leur tour, affectant ensuite les organismes des grands fonds.
Les modifications de la biomasse ne sont pas homogènes à travers l'océan profond. Cependant, les projections indiquent une diminution de la biomasse pour la plupart des régions. Les réductions affecteront une fraction supérieure à 80 % des habitats clés, tels que les récifs de coraux profonds, les monts marins et les canyons. L'analyse suggère également une diminution de la taille des organismes, ce qui pourrait avoir des conséquences sur la pêchepêche profonde et contribuer à accentuer les effets d'une réduction des apports en nourriture.