Après l'effondrement meurtrier du glacier italien de la Marmolada dimanche dernier, la question d'une catastrophe similaire se pose pour les glaciers français qui subissent aussi les effets du réchauffement climatique.
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C'est un véritable symbole de l'histoire naturelle des Alpes qui s'est écroulé dimanche 3 juillet en Italie. Une partie du glacier de la Marmolada, qui culmine à 3.343 mètres d'altitude dans les Dolomites, s'est effondrée en faisant plusieurs victimes. Un événement survenu le lendemain d'un record absolu de chaleurchaleur enregistré sur la zone, avec une température exceptionnelle de 10 °C.
Selon Ludovic Ravanel, géomorphologue au CNRS et spécialiste du changement climatiquechangement climatique en montagne, l'effondrementeffondrement du glacier des Alpes italiennes est lié au changement climatique « de manière évidente », et cela pour plusieurs raisons. « Les températures relevées à l'échelle récente, et les températures relevées ces 30 dernières années. Les 10 °C relevés la veille ont favorisé la fontefonte de la glace et l'eau de fonte a pu s'accumuler sous le glacier, l'eau a augmenté les pressionspressions hydrauliques, ça peut entraîner une rupture sous le glacier ou entre plusieurs massesmasses de glace. Quand on regarde les vidéos, on remarque la quantité d'eau ressortie lors de l'événement, cela traduit une fonte très importante liée aux températures anormales. Mais il faut aussi savoir que tous les glaciers alpins sont en phase de retrait depuis les années 1990 à cause de trois décennies de chaleur. »
Plusieurs glaciers risquent de s'effondrer en France
Les Alpes françaises aussi sont fortement touchées par le réchauffement climatique. Le 18 juin dernier, le sommet du mont Blanc a lui aussi battu un record absolu de chaleur avec 10,4 °C. « La France aussi connaîtra des glaciers qui se déstabilisent à cause de poches d'eau », précise Ludovic Ravanel. Rappelons que le 12 juillet 1892, la rupture d'une poche d'eau à l'intérieur du glacier de Tête-Rousse avait entraîné « la catastrophe de Saint-Gervais », une crue qui a fait au moins 200 victimes. Ce glacier de Haute-Savoie est suivi de très près par l'Institut des géosciences de l'environnement (IGE) depuis la fin des années 2000 : « la possibilité qu'une poche d'eau entraîne une nouvelle catastrophe est jugée très probable. Il a d'ailleurs fallu vidanger le glacier plusieurs fois entre 2008 et 2012 ». Le glacier de Rochemelon, situé en Italie à 3.538 mètres d'altitude, présente aussi un risque pour la vallée française de la Haute-Maurienne et a déjà dû être vidangé plusieurs fois. Sur le massif du Mont-Blanc, « le glacier de Takonnaz est également très surveillé par l'IGEIGE pour le danger qu'il représente pour Chamonix, il domine la vallée et c'est un grand couloir d'avalanches, explique le spécialiste. À proximité, le glacier de la Charpoua s'est déjà déstabilisé, mais le risque pour la population a été géré car on a dévié le chemin d'accès ».
Avec les glaciers, les risques sont multiples : ils peuvent être glaciaires, avec un effondrement de glaces comme en Italie, ou périglaciaires. Cette dernière catégorie regroupe les avalanches rocheuses, comme celle de 2017 qui a touché le village suisse de Bondo. Le dégel du permafrostpermafrost avait provoqué une gigantesque coulée de pierres qui avait fait huit morts. Selon Ludovic Ravanel, « on se dirige vers plus d'événements de ce type. Le permafrost se dégrade et se réchauffe. Il y aura plus d'écoulements et en plus grand volumevolume, donc cela affectera plus les vallées. Le risque est aussi une combinaison de l'aléa climatique et de la vulnérabilité ». Plus d'urbanisation des montagnes et des vallées conduit évidemment à un risque de catastrophe plus grand.
La prochaine catastrophe sera imprévisible
Comment prévenir le risque et contenir les morceaux de glace qui seront amenés à se détacher ? « Il y a plusieurs moyens qui marchent plutôt bien, explique le spécialiste, on fait des pans d'avalanches pour contenir les avalanches et les blocs de glace. Le principe des bâches blanches fonctionne aussi très bien, elles font ce que doit faire la neige au printemps, c'est-à-dire limiter la fonte en renvoyant les rayons solaires vers l'atmosphère, mais elles ne peuvent être utilisées que très localement, pas pour couvrir un glacier tout entier. »
Le principal problème selon Ludovic Ravanel, c'est le côté imprévisible des ruptures : « En Italie, il n'y a pas eu de signal avant-coureur. Le prochain événement nous surprendra de toute manière. Il faut que la population montagnarde fasse remonter les informations sur les événements anormaux, comme des écoulements, car il n'y a pas beaucoup de scientifiques qui étudient les glaciers et on ne peut pas mettre sous surveillance tous les glaciers alpins. »