Difficile de se rendre de compte de la violence d’une avalanche tant qu’on n’en a pas frôlé une. En 2014, Julien Lopez s’est fait happer par une immense coulée, qui l’a traîné sur plus de 500 m avant de le recouvrir complètement. Muni d’une caméra embarquée, le skieur a rendu publique son expérience glaçante.

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    Article paru le 22 janvier 2014

    Quelques minutes de plus et c'était l'asphyxieasphyxie. Par une belle journée du mois d'avril 2013, le champion du monde de ski free ride (hors-piste) Julien Lopez avait planifié de descendre la façade suisse du mont Blanc. Mais au premier virage, la montagne en a décidé autrement. Au bout de quelques secondes seulement, le sommet de la façade enneigée se décroche, une avalanche poursuit le skieur et finit par l'ensevelir. Équipé d'une caméra embarquée et filmé depuis un hélicoptèrehélicoptère, le skieur a rendu publiques des images aussi hallucinantes que glaçantes, dont en voici quelques extraits.


    Julien Lopez est un champion de ski Free ride et a su agir comme il se devait dans ce genre de situation. Happé par l'avalanche, il a pensé à laisser des indices le long de la descente, ouvert son sac gonflable, brassé tant qu'il pouvait pour rester le plus proche possible de la surface, le tout sans céder à la panique, comme en témoignent les images de sa caméra embarquée. © julien lopezTV, YouTube

    Décryptage de la vidéo : seulement quelques secondes pour agir

    Tout est arrivé très vite, Julien Lopez n'a eu qu'une dizaine de secondes pour réagir. Les skis chaussés, il s'est lancé dans un couloir hors-piste de la façade suisse du toittoit des Alpes. Dès le premier virage, il dévisse, toute la plaque se décroche et forme une avalanche qui s'étendra sur plus d'un kilomètre. Il comprend en une fraction de seconde ce qui l'attend et file tout droit. « Partir tout droit semble simple comme ça, mais en réalité, tu as la sensation d'avoir un tapis roulant sous tes pieds qui t'empêche d'avancer », commente-t-il. Il analyse rapidement l'espace et décide de se protéger derrière les barres rocheuses, que l'on peut observer sur la droite de l'écran. Toutefois, au regard de l'ampleur de l'avalanche, il décide de changer de direction, mais chute. Un mal pour un bien, parce qu'on remarque dans la vidéo que le flanc de droite s'est finalement décroché.

    Il se redresse et a la présence d'esprit de se tourner pour se remettre dans le sens de la piste. Le choc aurait pu lui être fatal. La pressionpression exercée par une telle avalanche peut varier entre 30 et 300 kPa, c'est plus violent pour l'Homme que la pression d'une roue sur la chaussée. Ce type d'avalanche dévale le massif à très grande vitessevitesse, pouvant varier entre 100 et 350 km/h. L'impact est extrêmement violent, mais Julien Lopez s'en tirera avec seulement une entorseentorse. L'avalanche le traîne jusqu'à 500 m plus bas. Durant ces quelques minutes, le skieur brasse tant qu'il peut et enclenche son sac airbagairbag. Avec ce dernier, il augmente son volumevolume, ce qui l'aide à rester en surface. Les avalanches provoquées sont les plus mortelles, et dans 25 % des cas, l'asphyxie est la première cause de décès. Après 15 minutes sous la neige, les chances de survie sont seulement de 20 %.

    Julien Lopez prévoyait de protéger derrière cette barre rocheuse, mais s'est rapidement rendu compte que l'avalanche était trop importante. Il a donc choisi de changer de direction, fait une faute de carre et a chuté. © Capture d'écran, JulienLopezTV, YouTube

    Julien Lopez prévoyait de protéger derrière cette barre rocheuse, mais s'est rapidement rendu compte que l'avalanche était trop importante. Il a donc choisi de changer de direction, fait une faute de carre et a chuté. © Capture d'écran, JulienLopezTV, YouTube

    Les avalanches provoquées sont liées à une surcharge locale : passage de skieurs, sérac (bloc de glace) ou explosifs (pour déclencher une avalanche). En saison, MétéoMétéo-France publie un bulletin journalier d'estimation du risque d’avalanche pour chaque massif du pays. Ce bulletin donne une valeur sur une échelle de risque et distingue les possibilités d'avalanches provoquées et spontanées. Dans le cas des avalanches provoquées, les deux principaux points sur lesquels le nivologue s'attarde sont le nombre de secteurs concernés et la surcharge qui déclenchera l'avalanche (un seul skieur, ou plutôt un groupe).

    L’après-vidéo : comprendre le manteau neigeux et l’évaluation de risque

    Le degré de stabilité d'un manteaumanteau neigeux est d'abord évalué à partir des observations. En stations de ski, on compte 150 postes de surveillance, mais il existe également 28 stations automatiques (le réseau Nivôse). Chaque jour, il faut étudier la neige de surface et l'historique des avalanches, les pisteurs réalisent en outre toutes les semaines un profil vertical du manteau neigeux, pour déterminer le type de grain, la taille, la duretédureté, l'humidité, la densité et la température de la neige. Enfin, à l'aide d'outils numériquesnumériques, les nivologues établissent les bulletins de risques d'avalanches pour chaque massif. Si les réseaux d'observation se développent de plus en plus, ils ne peuvent évidemment couvrir toute l'étendue des massifs, et nul n'est à l'abri d'une instabilité locale imprédictible.

    Comme Julien Lopez le mentionne à la fin de sa vidéo, partir en ski hors-piste nécessite quelques précautions essentielles, notamment de s'équiper d'un Arva et d'un sac airbag. L'Arva est un émetteur d'ondes radio, dont la fréquence, 457 kHz, est dédiée à ce système. En mode émissionémission, il permet à l'utilisateur d'être retrouvé, en monde réceptionréception, il permet de repérer un autre utilisateur. Signaler son itinéraire est également important, car plus vite le PGHM sait où chercher, plus vite le skieur peut être retrouvé.

    Les avalanches provoquées sont responsables d'une centaine de disparitions chaque année. Julien Lopez avait appelé, le 28 décembre 2013, sur son compte TwitterTwitter à préférer le « ski-barbar » au hors-piste en cette période d'importants risques d'avalanches.