Les nouvelles prévisions à long terme confirment de plus en plus le retour du phénomène climatique La Niña pour cet été, avec un pic d'intensité à l'automne : le pire moment pour toutes les zones sujettes aux ouragans.


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    Le phénomène climatique réchauffant El Niño touche à sa fin et son homologue froid, La NiñaLa Niña, ne va pas tarder à faire des siennes ! Dans son dernier bulletin de suivi du phénomène Enso (El NiñoEl Niño-SouthernSouthern Oscillation), la NOAANOAA émet sa première « surveillance » pour La Niña 2024. Depuis juin 2023, El Niño s'est additionné au pouvoir réchauffant des gaz à effet de serre issu des activités humaines, et a contribué aux nombreux records de chaleur sur Terre. L'intensité d'El Niño 2023 le place à la cinquième position des plus forts depuis 1950. Cependant, la phase El Niño s'affaiblit : une période neutre devrait se mettre en place entre mars et avril, mais celle-ci sera de courte duréedurée puisque les prévisions confirment de plus en plus l'arrivée de La Niña à partir du mois de juin.  

    La Niña risque de faire exploser le nombre d'ouragans !

    Ce refroidissement des eaux d'une partie du Pacifique aura des conséquences bien différentes d'El Niño aux quatre coins de la Planète : l'un de ses effets les plus remarquables est celui associé aux phénomènes cycloniques. Alors que les années El Niño sont plus calmes en termes d'ouragans, La Niña est bien connue pour donner lieu à des ouragans plus intenses et plus nombreux dans l'océan Atlantique nord, d'autant plus dans un contexte de réchauffement des océans.

    L'effet de La Niña, combiné à une température de l'eau anormalement élevée (le carburant des ouragans) pourrait donner lieu à une situation explosive dans l'Atlantique nord. Or, les dernières prévisions à long terme envisagent un pic d'intensité de La Niña pile au moment de la saison cyclonique, entre octobre et novembre.

    L'humanité est en train d'entrer dans une nouvelle ère des ouragans. Ceux-ci deviennent tellement puissants qu'une nouvelle catégorie devra être créée pour désigner des vents allant à plus de... 308 km/h ! © Futura

    La Niña va faire son retour mais est-ce une bonne nouvelle ?

    Article de Karine DurandKarine Durand, écrit le 7 janvier 2024

    Moins d'un an après sa mise en place, le phénomène El Niño commence à montrer des signes d'affaiblissement. Toutes les prévisions saisonnières s'orientent vers une année 2024 marquée par le retour de La Niña au cours de l'été. Après le double réchauffement de 2023, lié au changement climatique et à El Niño, l'arrivée de La Niña cette année est-elle une bonne nouvelle ?

     

     

    Le moins que l'on puisse dire, c'est que le El Niño 2023 aura fait parler de lui. Son pouvoir réchauffant s'est additionné à celui du réchauffement climatique lié aux émissionsémissions de gaz à effet de serre, et ces deux paramètres, en plus de quelques autres plus minimes, ont donné lieu à l'année la plus chaude enregistrée depuis le début des relevés météo, c'est-à-dire depuis 174 ans.

    El Niño va prendre fin dans les prochaines semaines

    El Niño 2023 aura finalement été fort, mais pas extrême, contrairement à ce que certains organismes météométéo craignaient. Rappelons en effet que pour confirmer un phénomène El Niño, il faut que les températures dans l'océan Pacifique équatorial dépassent les moyennes de 0,5 à 0,8 °C, ce qui s'est produit en juin 2023. Les scientifiques attribuent le qualificatif « super El Niño » lorsque les températures montent à plus de 2 °C au-dessus des normales pendant 3 mois. Le phénomène de cette année a atteint un réchauffement temporaire de 2 °C à l'automne, puis est redescendu à 1,9 °C entre fin décembre 2023 et début janvier 2024, ce qui fait de lui un phénomène tout de même assez puissant.

    Les prévisions climatiques de la NOAA envisagent un affaiblissement marqué entre février et mars, et la fin officielle d'El Niño en avril, voire avant.

    Le pouvoir réchauffant d'El Niño ne sera pas terminé pour autant

    En général, la fin d'une phase (comme El Niño) est suivie d'une période neutre (sans anomalieanomalie chaude ou froide de l'est du Pacifique). Cette phase neutre dure souvent plusieurs mois, un an ou plusieurs années. Mais cette année, le début d'un nouveau cycle ne devrait pas se faire attendre : à peine El Niño terminé, revoilà La Niña ! La Niña est la phase froide qui limite la hausse des températures, et peut même atténuer celle liée au réchauffement climatique. 

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    La Niña se caractérise par une température plus basse que la normale dans l'est du Pacifique (ici en bleu), et c'est l'inverse pour El Niño. © NOAA

    Serait-ce donc une bonne nouvelle ? Tout dépend de quoi, et de qui parle-t-on. Au niveau mondial, même si El Niño disparaît au printemps, son pouvoir réchauffant prend du temps à gagner l'ensemble de la Planète, et le plus fort réchauffement lié à El Niño intervient en général un an après sa mise en place. 2024 devrait donc être encore marqué par des températures anormalement élevées, entre l'effet décalé d'El Niño, et le réchauffement climatique qui continue à s'accentuer.

    Les conséquences de La Niña seront visibles à partir de fin 2024

    D'autre part, si El Niño a des effets négatifs sur certaines régions du monde (caniculecanicule en Australie et en Amérique du Sud, sécheressesécheresse en Amazonie, etc.) et positives sur d'autres (moins d'ouragans dans l'Atlantique Nord, par exemple), La Niña a d'autres conséquences. Lors d'une phase La Niña, le nord de l'Amérique du Sud (Brésil, Venezuela, Colombie), le nord-ouest du continent américain (États-Unis et Canada), le sud de l'Inde, la péninsulepéninsule indochinoise et l'Australie sont confrontés à des températures plus basses que la normale. La sécheresse est généralement plus forte dans le sud des États-Unis, au Mexique, ainsi qu'en Chine. À l'inverse, le sud-est de l'Asie et le Brésil pourraient subir des pluies plus importantes que la normale, tout comme le nord-ouest des États-Unis, le Canada, et l'Australie. La saison des ouragans est également plus violente dans l'Atlantique Nord, tout comme la saison des tornadestornades aux États-Unis.  

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    La Niña entraîne des phénomènes cycloniques plus nombreux et plus intenses dans l'océan Atlantique Nord. © Sasa Kadrijevic, Adobe Stock

    En Europe, les conséquences ne sont pas prouvées : si El Niño est connu pour provoquer un temps plus doux et plus humide (comme c'est le cas depuis l'automne 2023), La Niña serait responsable d'un hiverhiver précoce et plus froid (ce qui ne s'est pas vérifié lors des dernières phases). Cependant, tout comme le pouvoir réchauffant d'El Niño prend des mois à se mettre en place et un an à atteindre son effet le plus fort, le pouvoir refroidissant de La Niña va aussi prendre plusieurs mois à prendre effet : l'effet atténuant sur le réchauffement lié aux émissions de gaz à effet de serre ne sera sans doute perceptible qu'à la fin de l'année 2024, et plus encore, en 2025, tout comme ses conséquences les plus fortes. Il est également étonnant de constater que tous les modèles de prévision climatique estimaient qu'El Niño allait devenir de plus en plus fréquent en raison du changement climatique, or La Niña est clairement majoritaire depuis 15 ans.