De mémoire de shérif, pareille évacuation humaine ne s'était jamais produite. Placé en état d'urgence depuis dimanche, l'État de Californie évacue 200.000 personnes en raison d'un gigantesque incendie. Tandis que la région viticole s'embrase et que les autorités mettent tout en œuvre pour abriter les populations, d'importants dispositifs sont déployés pour prévenir les pillages.


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    Au dernier bilan, ce sont quelque 200.000 personnes qui ont été sommées d'évacuer à cause de l'incendie « Kincade Fire », au nord de San Francisco, et tout l'État de Californie a été placé dimanche en état d'urgence par son gouverneur, Gavin Newsom, alors que le feu continuait sa progression. Selon l'agence des pompiers de Californie, Cal Fire, le sinistre, qui a démarré mercredi soir, a déjà brûlé plus de 12.000 hectares et n'était contenu dimanche soir qu'à 10 %.

    « C'est la plus importante évacuation de mémoire de shérif du comté de Sonoma », qui englobe toute la zone d'évacuation, a tweeté le bureau du shérif. Au moins deux hôpitaux -- Kaiser Permanente Hospital et Sutter Santa Rosa Regional Hospital -- ont évacué leur patients durant le weekend vers d'autres établissements. Des centaines de policierspoliciers ont été déployés pour éviter des pillages de propriétés abandonnées.

    Des pompiers combattent le « Kincade Fire » à Healdsburg en Californie, le 27 octobre 2019. © Philip Pacheco, AFP
    Des pompiers combattent le « Kincade Fire » à Healdsburg en Californie, le 27 octobre 2019. © Philip Pacheco, AFP

    Prévenir les pillages dans les zones évacuées

    Tôt dimanche, le bureau du shérif avait annoncé l'ordre d'évacuer plusieurs zones situées immédiatement au nord de Santa Rosa, ville qui compte elle-même près de 180.000 habitants. La police de la ville a ensuite ordonné l'évacuation de la moitié nord de la commune. En milieu de journée, le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a décrété l'état d'urgence, en raison des effets des vents « sans précédents » dans la région de l'incendie. « Nous mettons en œuvre toutes les ressources disponibles, a-t-il déclaré, cité dans un communiqué. Plus de 3.000 personnes travaillent sur le feufeu au moment où nous parlons, pour s'assurer que l'évacuation se passe bien et que les gens la prennent au sérieux ».

    Plusieurs centres d'hébergement d'urgence affichaient complets, a indiqué la chaîne d'information locale ABC7, et Santa Rosa a dû fermer l'un d'entre eux, le Finley Community Center, qui se trouvait dans la zone à évacuer. Une partie de l'autoroute 101, principale route qui traverse Santa Rosa, a été coupée à la circulation. Le point le plus au sud au sein des zones à évacuer se situe à 70 km de San Francisco à vol d'oiseau.

    Les autorités ont fait montre de précautions, avec en tête le « Camp Fire », un autre incendie qui avait fait 86 morts dans le nord de l'État, en novembre 2018. Santa Rosa se remet, elle, à peine du « Tubbs Fire », qui avait fait 22 victimes et dévasté, en octobre 2017, le quartier de Coffey Park, détruisant plus de 1.400 bâtiments. Quelque 262 agents ont été déployés pour faciliter l'évacuation mais aussi prévenir, autant que possible, le pillage dans les zones évacuées. Des éléments de la garde nationale ont été dépêchés pour leur prêter main forte.

    La trajectoire du feu peut se prévoir mais pas se maîtriser

    La progression du feu du nord vers le sud était facilitée par un temps sec, un taux d'humidité très faible (14 %) et un vent soutenu, avec des rafales pouvant aller jusqu'à près de 130 km/h. Le service de météorologie national (NWS) tablait sur des vents encore importants tout au long de la journée de dimanche, avant une accalmie lundi. La semaine à venir s'annonçait tout aussi sèche que le week-end.

    Ces conditions climatiques ont occasionné plusieurs départs de feu dans d'autres zones proches de l'incendie, notamment, au sud-est, à Vallejo et Crockett, à une trentaine de kilomètres à peine au nord d'Oakland. Analyste de Cal Fire, Steve Volmer a expliqué, lors d'un point de presse, que les pompiers pouvaient prévoir la trajectoire du Kincade Fire, même s'il était loin d'être maîtrisé, mais restaient à la merci de départs de feu dans d'autres zones.

    Un avion bombardier d'eau survole le Kincade Fire, le 26 octobre 2019 en Californie. © Philip Pacheco, AFP
    Un avion bombardier d'eau survole le Kincade Fire, le 26 octobre 2019 en Californie. © Philip Pacheco, AFP

    Toute une région viticole ravagée

    Relativement préservées lors des précédents incendies de ces dernières années, plusieurs propriétés du comté de Sonoma, connu mondialement pour ses vins, ont été attaquées par les flammes. Des vidéos ont montré le principal bâtiment de la Soda Rock Winery, vieux de 150 ans, devenu un brasier géant, à Healdsburg. Sur FacebookFacebook, les propriétaires ont indiqué que tout le personnel était sain et sauf, se disant anéantis par ces images.

    Selon le San Francisco Chronicle, une autre propriété de Healdsburg, la Field Stone Winery, a également été touchée par l'incendie, de même que Moville Vineyards. Pour maîtriser le feu, « cela va prendre beaucoup de temps », a déclaré David Rabbitt, responsable technique du comté de Sonoma, à la chaîne locale ABC7. L'incendie a démarré au nord-est de Geyserville, mercredi soir.

    Le bâtiment principal de la <em>Soda Rock Winery</em>, propriété viticole de Healdsburg, ravagé par le « Kincade Fire », le 27 octobre 2019 en Californie. © Josh Edelson, AFP
    Le bâtiment principal de la Soda Rock Winery, propriété viticole de Healdsburg, ravagé par le « Kincade Fire », le 27 octobre 2019 en Californie. © Josh Edelson, AFP

    Un incident sur l'une des lignes électriques à l'origine de l'embrasement ?

    Le fournisseur d'électricité PG&E avait annoncé prévoir de couper préventivement le courant à 940.000 foyers à partir de samedi après-midi dans cette région, en raison de ces conditions météorologiques exceptionnelles. Les autorités locales n'ont pas encore déterminé l'origine du sinistre, mais PG&E a fait état d'un incident sur l'une de ses lignes près du point d'origine du « Kincade Fire », seulement sept minutes avant le départ des flammes, selon plusieurs médias locaux. Plus au sud de la Californie, où sévissait un autre incendie, le « Tick Fire », la plupart des avis d'évacuation ont été levés. Le feu avait forcé des dizaines de milliers de personnes à quitter leur maison près de Santa Clarita, au nord de Los Angeles.

    Un pompier traverse une propriété ravagée par le « Kincade Fire », le 27 octobre 2019 à Healdsburg, en Californie. © Josh Edelson, AFP
    Un pompier traverse une propriété ravagée par le « Kincade Fire », le 27 octobre 2019 à Healdsburg, en Californie. © Josh Edelson, AFP

    La Californie en proie aux flammes en 2008

    Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet, publié le 26 juin 2008

    En pleine période de sécheresse, qui dure depuis deux ans, la Californie subit une vague d'incendies. Plus de huit cents foyers ont été allumés par des oragesorages secs, un phénomène rare.

    Les sept mille pompiers engagés dans une lutte contre une série d'incendies annoncent des progrès notables. Mercredi soir, il restait toutefois encore quelque 700 foyers, selon Arnold Schwartzenegger, le gouverneur de Californie.

    Environ 600 kilomètres carrés de forêt et de végétation ont déjà été détruits.
    Entre dimanche et lundi, à l'issue d'un week-end caniculaire, ce grand Etat (le plus peuplé des Etats-Unis) s'est embrasé en de multiples endroits.

    Plus de 800 incendies ont été allumés par la foudrefoudre, provenant d'orages secs, qui ne produisent que peu voire pas du tout de pluie. Ce phénomène rare se produit lorsque l'airair contient très peu d'humidité et quand l'origine des orages se situe à haute altitude. Les précipitationsprécipitations sont alors faibles et peuvent même s'évaporer complètement avant de toucher le sol.

    Depuis deux ans, la Californie vit en état de déficit pluviométrique chronique et son gouverneur a proclamé au début du mois de juin l'état de sécheresse. Les feux de forêts ne sont pas rares. En octobre 2007, une série d'incendies avaient ravagé plus de 2.000 kilomètres carrés de végétation.