C’est une première dans le monde animal : Mnemiopsis leidyi, une sorte de méduse, excrète ses déchets alimentaires via un pore anal qui apparaît uniquement en cas de besoin. Cet « anus intermittent » pourrait être la forme primitive de tous les systèmes digestifs.
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Mnemiopsis leidyi n'en finit pas d'épater les scientifiques. Mesurant 5 cm de long environ, ce petit animal marin, de la famille des cténophorescténophores, des invertébrés apparentés aux méduses, avait déjà bluffé les chercheurs en 2016, lorsque ces derniers avaient découvert qu'il était doté d'un véritable système digestif. Les autres espèces de méduses, éponges et placozoaires, ont en effet une seule ouverture par laquelle la nourriture est à la fois ingérée et excrétée. Le cténophore, ou cténaire, dispose, quant à lui, d'un pore anal indépendant fermé par un sphincter, pour éliminer les restes de petits petits poissons et de crevettes qu'il ingère.
Un anus qui apparaît et disparaît à intervalle régulier
Si l'existence de cet organe a longtemps fait douter les scientifiques, c'est qu'il n'apparaît que par intermittence, comme vient de le découvrir Sidney Tamm, du laboratoire de biologie marine à l'Université de Chicago, dans une étude publiée dans Invertebrate Biology. « C'est une observation vraiment spectaculaire, atteste le chercheur au journal New Scientist. À ma connaissance, il n'existe pas d'autre cas documenté d'anusanus transitoire dans le règne animal ».
Mnemiopsis leidyi lors de la phase de défécation. La flèche indique la position du pore anal qui se dilate lors de l’expulsion. Les particules de poissons fluorescentes digérées apparaissent sous forme de taches lumineuses dans les canaux anaux. © Smithsonian
Sidney Tamm a filmé attentivement la cténaire et n'a pas pu observer d'anus en temps que structure permanente. Celui-ci apparaît et disparaît à intervalle régulier, lorsque l'animal a besoin de déféquer. Cet intervalle varie entre 10 minutes, chez la larvelarve, à une heure, chez l'adulte. Lorsque les déchetsdéchets s'accumulent, la partie arrière de l’intestin gonfle jusqu'à ce qu'elle touche l'épidermeépiderme. L'intestin fusionne alors avec l'épiderme, formant un pore anal par lequel les déchets sont évacués. Comme l'animal ne possède qu'une seule couche de cellules d'épaisseur entre les deux, le processus peut se faire relativement rapidement.
Cette découverte pourrait avoir une implication importante pour comprendre l’évolution. Selon Sidney Tamm, l'anus éphémère serait la forme primitive des systèmes digestifs « modernes » du monde vivant, y compris le nôtre. Bon, il est temps d'aller au petit coin, non ?